Le sismomètre d'InSight enregistre non seulement des séismes à la surface de Mars, mais réagit également de manière inattendue aux éclipses solaires observables sur la planète. Lorsque Phobos cache le Soleil, l'instrument s'incline légèrement d'un côté. Cet effet minuscule pourrait aider les chercheurs à déterminer l'intérieur de la Planète rouge.


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    Mars a deux petits satellites naturels, PhobosPhobos et Déimos. Depuis la surface de la planète, on peut voir Phobos traverser le ciel toutes les cinq heures et, depuis un point donné sur cette surface, on peut observer environ une éclipse de Soleil par an due à ce satellite. Plus précisément, quand Phobos passe entre le Soleil et un point donné de Mars, le satellite produit alors de une à sept éclipses solaires en l'espace de trois jours. Il y a donc plus d'éclipses solaires sur Mars que sur Terre, mais elles ne durent que 30 secondes et ne sont jamais totales. De telles éclipses partielles ont été photographiées par OpportunityOpportunity et CuriosityCuriosity, rovers martiensrovers martiens de la Nasa.

    Une éclipse partielle de Soleil par Phobos. © Nasa, JPL-Caltech, MSSS
    Une éclipse partielle de Soleil par Phobos. © Nasa, JPL-Caltech, MSSS

    InSight détecte des éclipses

    « Lorsque la Terre subit une éclipse solaire, les instruments peuvent détecter une baisse de température et des rafales de ventvent rapides, car l'atmosphèreatmosphère se refroidit à un endroit particulier et l'air se précipite loin de cet endroit », explique Simon Stähler, sismologuesismologue à l'Institut de géophysique de l'École polytechnique fédérale de Zurich (EPFZ, Suisse). La même chose devrait donc être observable sur Mars.

    En avril 2019, une première série d'éclipses solaires était visible depuis le site d'atterrissage d'InSight, atterrisseur de la Nasa stationné depuis novembre 2018 dans la région d'Elysium Planitia, mais seules certaines des données acquises ont été enregistrées. Les premières indications de ces données ont incité Stähler et une équipe de recherche internationale à se préparer pour la série d'éclipses suivante, prévue le 24 avril 2020. Ils ont publié les résultats de leurs observations en août dans la revue Geophysical Research Letters.

    Comme prévu, les cellules solaires d'InSight ont enregistré les transitstransits, la quantité de lumièrelumière les atteignant baissant de 30 % pendant ces événements. Cependant, les instruments météorologiques d'InSight n'ont indiqué aucun changement atmosphérique et les vents n'ont pas changé comme prévu. D'autres instruments ont cependant livré une surprise : le sismomètre et le magnétomètremagnétomètre.

    Vue d'artiste de l'atterrisseur InSight. © Nasa, JPL-Caltech
    Vue d'artiste de l'atterrisseur InSight. © Nasa, JPL-Caltech

    Anna Mittelholz, qui a rejoint il y a peu l'équipe Mars de l'EPFZ, explique que le signal du magnétomètre est probablement dû à la baisse de l'électricité des cellules solaires. Le signal du sismomètresismomètre est lui par contre inattendu. Lors de l'éclipse, l'instrument s'est légèrement incliné dans une direction particulière, ce qui n'était pas prévu. Stähler précise que cette inclinaison est très petite : 10-8, un effet faible mais clair. Sa cause la plus probable ? « Lors d'une éclipse, le sol se refroidit. Il se déforme de manière inégale, ce qui incline l'instrument », explique Martin van Driel, du groupe de recherche SismologieSismologie et physiquephysique des ondes. Un capteurcapteur infrarougeinfrarouge a en effet mesuré un refroidissement du sol sur Mars de deux degrés. Les calculs ont révélé que dans les 30 secondes de l'éclipse, le « front froid » ne pouvait pénétrer dans le sol que sur une profondeur de micro- ou millimètres, un effet faible mais suffisant pour agir sur le sismomètre.

    Un potentiel pour des connaissances plus précises de Mars

    Ces signaux devraient aider à cartographier plus précisément l'orbiteorbite de Phobos, ce qui est important pour les futures missions spatiales. Cela pourrait également nous en apprendre plus sur le fonctionnement interne de Mars car, comme l'explique Amir Khan, également à l'Institut de géophysique de l'EPFZ, le fait que Phobos s'approche progressivement de Mars peut être utilisé pour estimer l'élasticitéélasticité et donc la chaleurchaleur de l'intérieur de Mars. Les chercheurs veulent savoir si Mars a été formé à partir du même matériaumatériau que la Terre, ou si différents composants pourraient expliquer pourquoi la Terre a une tectonique des plaquestectonique des plaques, une atmosphère dense et des conditions qui soutiennent la vie, des caractéristiques absentes sur Mars.