Remplacer les colorants polluants issus de la pétrochimie par des pigments écologiques naturellement fabriqués par les bactéries : c’est l’objectif de la start-up Pili qui développe toute une gamme des molécules colorantes pour l’industrie textile. Son P.-D.G., Jérémie Blache, nous explique comment ça fonctionne et les énormes avantages de cette technologie.


au sommaire


    L'industrie textile consomme plus d'un million de tonnes de colorants chaque année pour fabriquer nos T-shirts, jeans, rideaux, revêtements automobilesautomobiles et autres tissus. Or, la quasi totalité de ces colorants provient de la pétrochimie. « Chaque kilogramme de colorant synthétique nécessite ainsi l'utilisation de 100 kg de pétrole, 10 kg de produits chimiques toxiques et de 1.000 litres d'eau, sans compter l'énergie pour chauffer à haute température », témoigne Jérémie Blache, cofondateur et dirigeant de la start-up Pili, qui a décidé de s'attaquer à cette pollution invisible.

    Jérémie Blache, cofondateur de la startup Pili. © Pili
    Jérémie Blache, cofondateur de la startup Pili. © Pili

    Les bactéries, formidables usines à pigments

    La start-upstart-up, créée en 2015 et installée au sein de l'accélérateur TWB (Toulouse White Biotechnology) situé à Ramonville-Saint-Agne, s'appuie pour cela sur un procédé conçu depuis plusieurs dizaines d'années : la synthèse enzymatiqueenzymatique qui consiste à faire fabriquer des molécules chimiques par des bactériesbactéries et levureslevures. Le procédé est déjà utilisé dans plusieurs domaines, comme la production de biomédicaments, de parfums, de produits cosmétiques, de carburant ou de bioplastique.
     

    Les bactéries produisent naturellement des pigments pour leur activité biologique, stocker du carbone et de l'énergie, ou juste comme processus issue de l’évolution. © Pili

    Pili a décidé de s'intéresser aux colorants, et en priorité au secteur du textile, car c'est celui qui représente le plus gros potentiel (8 milliards d'euros par an). « La synthèse enzymatique est particulièrement intéressante car elle possède une efficacité énergétique remarquable et une grande spécificité dans la production de molécules, explique Jérémie Blache, cofondateur et dirigeant de la start-up. Pour la même quantité de colorant que ceux produits par pétrochimie, nos micro-organismesmicro-organismes n'utilisent eux ni pétrole ni produit chimique, 5 fois moins d'eau et beaucoup moins d'énergie car ils produisent à température ambiante ».

    Un Lego géant de molécules pour obtenir la bonne teinte

    Les bactéries, nourries au sucresucre, sont cultivées dans d'immenses fermenteurs de plusieurs centaines de litres, un peu comme ceux utilisés pour la bière. Comme elles se reproduisent très rapidement, des quantités industrielles sont facilement obtenues. « Chaque micro-organisme se reproduit presque toutes les 20 minutes. À la fin de la journée, nous avons des milliards de micro-organismes produisant chacun des pigments ! » s'enthousiasme Jérémie Blache. Ces pigments sont ensuite filtrés pour les séparer des bactéries, 1.000 fois plus grosses, puis assemblés afin de couvrir toute la gamme de couleurscouleurs. « C'est un peu comme un Lego géant : on a différentes molécules et on les assemble pour obtenir la teinte désirée, détaille cet entrepreneur.

    Les bactéries sont cultivées dans d’immenses cuves, puis les molécules sont séparées et mélangées pour obtenir la teinte désirée. © Pili
    Les bactéries sont cultivées dans d’immenses cuves, puis les molécules sont séparées et mélangées pour obtenir la teinte désirée. © Pili

    Une nouvelle levée de fonds de 3,6 millions d’euros pour accélérer le développement

    Après un premier tour de financement de 2,5 millions d'euros en avril 2018 auprès d'investisseurs privés et de la plateforme de financement participatif Wiseed, la startup vient de boucler une nouvelle levée de fonds de 3,6 millions d'euros auprès d'Elaia, de SOSV, d'investisseurs privés, de business angels et de BPI France. Une somme qui lui permettra d'élargir sa palette de couleurs, de protéger sa propriété intellectuelle et de valider ses procédés de fabrication avant de les déployer à grande échelle. Pili vise un lancement commercial d'ici deux ans. Si tout se passe bien, d'autres secteurs pourraient ensuite être explorés, comme les encres, la cosmétique ou les plastiquesplastiques.

    Portrait Pili

    • Domaine : biotechnologiesbiotechnologies ;
    • Date de création : 2015 ;
    • Fondateurs : Jérémie Blache, Guillaume Boissonnat, Marie-Sarah Adenis, Thomas Landrain ;
    • Localisation : Toulouse et Paris ;
    • Montant des fonds levés : 6,1 millions €.