On pense que l'hydrogène moléculaire H2 est un élément clé de la formation des premières étoiles de l'univers observable. De nouveaux calculs quantiques du comportement de cette molécule pourraient aider à comprendre cette étape importante de l'évolution du cosmos, ainsi que l'origine de l'eau des océans.
- Lorsque l'univers formait les étoiles, un dossier à découvrir
Les poussières et certaines molécules comportant des atomes lourds jouent un rôle important dans la formation des étoiles depuis des milliards d'années, en permettant aux nuages interstellaires en train de s'effondrer gravitationnellement de continuer à le faire en dissipant de l'énergie thermique. Sans elles, la température et les augmentations de pressions résultantes dans ces nuages finiraient par contrecarrer puis stopper l'effondrement, avant qu'une étoile ne se forme. Cette constatation a conduit à une énigme concernant la formation des premières étoiles.
Comment ont-elles pu apparaître puisque ce sont précisément les réactions thermonucléaires dans ces étoiles qui ont fabriqué les premiers atomes lourds de carbone, d'oxygène et de silicium composant les poussières interstellaires ?
On pense que les molécules d'hydrogène primordiales ont servi d'agents de refroidissement dans ces nuages. Mais pour comprendre leur rôle, il faut bien connaître leurs propriétés et les réactions qu'elles peuvent subir, comme celle faisant intervenir H+ et H2.
Un groupe de chercheurs français et espagnol vient justement de déterminer avec plus de précision le taux de conversion entre deux formes de l'hydrogène moléculaire, appelées ortho-H2 et para-H2. Elles diffèrent par l'orientation relative des moments cinétiques des protons dans chacun de leurs deux atomes. Dans le premier cas, les spins sont parallèles, et antiparallèles dans le second cas.
Une clé pour décrypter l'énigme de l'origine de l'eau terrestre
Les astrophysiciens ont fait de savants calculs de mécanique quantique pour améliorer leur connaissance du taux de conversion entre ces états de la molécule d'hydrogène. Ce n'est pas la première fois que le monde des atomes apporte une clé pour comprendre celui des étoiles, le cas de la raie à 21 cm de l'hydrogène en est un bon exemple.
En plus de nous aider à comprendre la formation des étoiles, une étape fondamentale de l'évolution du Big Bang au vivant, ce travail pourrait jeter une lumière nouvelle sur l'origine des océans. En effet, il devrait avoir des implications pour les réactions faisant intervenir de l'eau deutérée (HDO, où D est le symbole du deutérieum). Or, jusqu'à présent, l'hypothèse d'une origine essentiellement cométaire de l'eau des océans bute sur le fait que la concentration en deutérium est deux fois plus élevée dans l'eau cométaire que dans l'eau terrestre. Ce qui suggère une autre origine pour l'eau terrestre. Comme la chimie du deutérium dépend de manière importante de l'abondance en ortho-H2, il y a là une voie de recherche pour expliquer, d'une façon ou d'une autre, cette différence d'abondance des isotopes de l'hydrogène dans le Système solaire.