Les exoplanètes super-enflées (en anglais, super-puff) seraient un nouveau type d'exoplanète avec une densité inférieure à celle de l’eau. Mais il se pourrait que le rayon de ces astres, pour une même masse, ait été surestimé parce que l’on n’avait pas compris qu’elles étaient entourées d’anneaux comme Saturne.


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    Le satellite Kepler a achevé sa mission de détection des exoplanètes par la méthode des transits et le relais a été pris par Tess, toujours sous l'égide de la Nasa. Les astrophysiciensastrophysiciens n'en continuent pas moins à dépouiller les données de Kepler qui leur ont notamment signalé l'existence possible et intrigante des exoplanètes super-enflées (en anglais, super-puff). Il s'agirait d'un type d'exoplanète dont la masse n'est que quelques fois celle de la Terre mais dont le rayon est plus grand que celui de NeptuneNeptune, ce qui leur donne une densité inférieure à celle de l'eau, en dessous 0,3 g/cm3.

    Même SaturneSaturne, qui est pourtant la planète la moins dense du Système solaire, les surclasse avec une densité de 0,6873 g/cm3. Plusieurs hypothèses ont donc été avancées pour rendre compte de l'existence de tels astres et la dernière vient d'être proposée dans un article publié dans The Astronomical Journal (mais disponible sur arXiv) par Anthony Piro de la Carnegie Institution for Science et Shreyas Vissapragada du célèbre Caltech, là où ont enseigné plusieurs prix Nobel de légende comme Richard FeynmanRichard Feynman, Murray Gell-Man et actuellement Kip Thorne.

    Les deux chercheurs proposent tout simplement qu'au moins certaines des exoplanètes super-enflées n'existent tout simplement pas mais qu'à la place, on a observé sans le réaliser immédiatement des exosaturnes, si l'on peut dire car après tout, JupiterJupiter, Uranus et Neptune ont aussi des anneaux bien que nettement moins spectaculaires.

    Les méthodes de détection des exoplanètes se sont largement diversifiées depuis les années 1990. Elles peuvent se classer en deux grandes catégories, les méthodes directes et les méthodes indirectes. Les trois méthodes principales sont la méthode directe d’imagerie, la méthode indirecte du transit et la méthode indirecte de la vitesse radiale. © CEA Recherche

    Pour comprendre leur raisonnement, il faut se souvenir qu'il y a essentiellement deux méthodes principales pour détecter des exoplanètes, celle du transit planétairetransit planétaire et celle des vitessesvitesses radiales comme l'explique la vidéo du CEA ci-dessus.

    Kepler utilisait celle du transit planétaire, c'est-à-dire le passage répété d'une exoplanète devant son étoileétoile hôte, ce qui produit un petit creux périodique dans la courbe de lumièrelumière de l'étoile, à savoir une légère baisse de l'intensité lumineuse mesurée. On peut, de cette manière, obtenir le rayon de l'exoplanète.

    Des densités sous-estimées à cause de rayons surestimés

    L'autre méthode consiste à mesurer les variations de vitesse par l'effet Dopplereffet Doppler sur le décalage spectral d'une étoile en mouvementmouvement en réponse à l'attraction d'une exoplanète proche. Cette méthode permet d'estimer la masse de l'exoplanète et en particulier, plutôt précisément, si l'exoplanète effectue un transit -- la masse estimée dépend du sinus de l'inclinaison de la normale du plan orbital de la planète par rapport à l'axe de visée, quand cet angle est de 90 °, le sinus vaut 1, c'est le cas d'un transit idéal et l'on obtient donc la masse sans ambiguité.

    En disposant d'une masse précise et d'un rayon qui l'est tout autant, on peut déterminer une densité, cela renseigne sur la composition d'une exoplanète et nous dit si l'on est en présence d'une planète rocheuseplanète rocheuse, d'une géante gazeusegéante gazeuse, voire d'une planète océanplanète océan. Anthony Piro et Shreyas Vissapragada sont partis de l'hypothèse que le rayon des exoplanètes super-enflées avait été surestimé parce que l'on n'avait pas compris qu'elles étaient entourées d'anneaux comme Saturne. Pour tester leur hypothèse, les chercheurs ont conduit des simulations de transit pour voir s'il était vraiment possible ensuite, en comparant les résultats calculés aux observations, de rendre compte de celles concernant des exoplanètes comme Kepler 51b, 51c, 51d, et 79d ou Kepler 87c et 177c.

    Une illustration du transit simulé d'une exosaturne. © Anthony Piro, Shreyas Vissapragada
    Une illustration du transit simulé d'une exosaturne. © Anthony Piro, Shreyas Vissapragada

    Anthony Piro a commenté les conclusions de son travail avec son collègue en ces termes : « Ces planètes ont tendance à orbiterorbiter à proximité de leurs étoiles hôtes, ce qui signifie que les anneaux devraient être composés de particules rocheuses plutôt que glacées. Mais les rayons de ces anneaux rocheux ne peuvent être aussi grands, à moins que la roche des particules ne soit très poreuse, or toutes les super-enflées ne correspondent pas facilement à ces contraintes ».

    Selon Piro et Vissapragada, trois super-enflées sont de particulièrement bonnes candidates pour être des sortes d'exosaturne, Kepler 87c et 177c, ainsi que HIP 41378f qui possède peut-être une exolune. Il est vraiment difficile de rendre compte des exoplanètes de Kepler 51 avec des anneaux par contre, sauf, on l'a dit, si les particules rocheuses sont poreuses.

    Comment vraiment tester ce scénario par rapport aux autres ? Pour les deux chercheurs, on ne pourra pas tant que le James Webb Space Telescope ne sera pas en orbiteorbite.


    On a peut-être découvert une exosaturne géante

    Article de Laurent SaccoLaurent Sacco publié le 17/01/2012

    Une exosaturne géante tourne peut-être autour d'une étoile de l'association Scorpion-Centaure, à environ 420 années-lumièreannées-lumière du SoleilSoleil. À coup sûr, l'astre orbitant autour de l'étoile 1SWASP J140747.93-394542.6 est entouré d'un gigantesque anneau de poussières.

    À environ 400 années-lumière de la Terre, on trouve la plus proche association stellaire connue, celle du Scorpion-Centaure. En l'occurrence, il s'agit d'une association OBassociation OB, un groupement de supergéantes bleuessupergéantes bleues de types O et B, très chaudes, jeunes et massives. Rappelons que le terme d'association stellaire a été introduit en 1949 par l'astrophysicien arménien Viktor Ambartsumian. Il désigne un groupe d'étoiles dont le même mouvement propre trahit une origine commune. Mais il ne s'agit pas d'un amas stellaire, qu'il soit ouvert ou globulaire, car dans ces deux cas les étoiles sont en interaction gravitationnelle. Dans une association stellaire, les étoiles ne sont plus liées gravitationnellement, bien qu'elles aient dû l'être à leur naissance en formant un amas ouvertamas ouvert.

    Un groupe de chercheurs, occupé en 2007 à étudier l'étoile 1SWASP J140747.93-394542.6 de l'association du Scorpion-Centaure dans le cadre du projet Superwasp (Wide Angle Search for Planets), a fait une étrange découverte. Superwasp permet de partir à la chasse aux exoplanètes par la méthode des transits. Mais la courbe de lumière de l'étoile montrait une diminution périodique de la luminositéluminosité de l'astre qui ne pouvait pas s'interpréter comme un transit ordinaire d'une exoplanète devant son étoile hôte.

    Une vue d'artiste des anneaux entourant peut-être une naine rouge autour de l'étoile 1SWASP J140747.93-394542.6. © Mike Osadciw
    Une vue d'artiste des anneaux entourant peut-être une naine rouge autour de l'étoile 1SWASP J140747.93-394542.6. © Mike Osadciw

    Les astronomesastronomes ont fini par trouver un début d'explication et ils viennent de l'exposer dans un article publié sur arxiv.

    La courbe de lumière obtenue fait penser à celle que l'on connaissait déjà avec l'étoile EE Cephei. Dans ce cas précis, on pense qu'un épais disque protoplanétairedisque protoplanétaire riche en gazgaz et poussières provoque une éclipseéclipse périodique de l'étoile pour un observateur terrestre.

    Pour 1SWASP J140747.93-394542.6, le blocage de 95 % de la lumière de l'étoile avec une période de 54 jours a des caractéristiques qui s'expliqueraient par le transit d'anneaux de poussières entourant un astre orbitant autour de l'étoile.

    Une naine brune ou une exosaturne ?

    La nature de cet astre n'est pas encore bien claire. Il pourrait s'agir d'une naine rougenaine rouge, d'une naine brune ou peut-être d'une géante gazeuse. Dans cette dernière hypothèse, la taille des anneaux est telle que l'exosaturne qui se trouverait dans l'association stellaire du Scorpion-Centaure surpasserait celle de la Saturne de notre Système solaire.

    Les astronomes estiment en effet que le rayon de l'anneau le plus éloigné de l'astre doit être de plusieurs dizaines de millions de kilomètres. La masse totale de la matièrematière présente dans les anneaux (il y en aurait au moins quatre) serait comparable à celle de la LuneLune. Les quatre anneaux détectés jusqu'à présent ont été surnommés « Rochester », « Sutherland », « Campanas » et « Tololo », d'après les sites où les transits ont d'abord été détectés et analysés.

    Pour savoir si l'on est vraiment en présence d'une exosaturne avec peut-être une lune en formation, il faut impérativement mesurer la masse de l'astre central. Pour cela, la méthode des vitesses radialesméthode des vitesses radiales doit être mise en pratique avec d'autres télescopestélescopes. S'il s'avère que sa masse est comprise entre 13 MJ (masses de Jupiter) et 75 MJ, on saura qu'il s'agit en fait d'un disque de matière autour d'une naine brunenaine brune inférieure, et on peut rêver du spectacle que donnerait l'équivalent d'une mission Cassini pour explorer ces anneaux. L'étoile 1SWASP J140747.93-394542.6 est cependant trop jeune, environ 16 millions d'années, pour qu'un « exo-André Brahic » soit en train d'explorer une telle exosaturne potentielle...