La fusée Safir récemment lancée par l’Iran transportait-elle réellement un satellite, ou s’agissait-il d’une simple étape dans la préparation d’un programme spatial ? La réponse est peut-être entre les deux…


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    Le lanceur Safir présenté sur le site de l'agence spatiale iranienne.

    Le lanceur Safir présenté sur le site de l'agence spatiale iranienne.

    Le dimanche 17 août dernier, Téhéran annonçait avoir lancé avec succès la fuséefusée de fabrication locale Safir 1, porteuse d'un satellite commercial qui avait été placé en orbite. « La fusée Safir a été lancée avec succès. Tous ses systèmes, notamment de télécommande et de contrôle, sont de fabrication iranienne », déclarait alors à la télévision d'Etat Reza Taghipour, responsable de l'Agence spatiale iranienne.

    L'annonce du lancement à la télévision iranienne. Capture TV.

    L'annonce du lancement à la télévision iranienne. Capture TV.

    Mais dès le lendemain, alors que personne n'arrivait à détecter le satellite et que les responsables du Norad américain restaient sans réaction à ce sujet, l'enthousiasme retombait quelque peu. Dans les communiqués iraniens, le "satellite commercial" devenait un simple satellite de télécommunications puis un étrange "satellite factice".

    Enfin, Téhéran accusait les correspondants de presse d'avoir mal traduit les informations originales et que "lancement d'un satellite factice" devait se comprendre comme "simulation d'un lancement de satellite", précisant que le tir de la fusée Safir à deux étages avait parfaitement réussi et préparait la première mise en orbite prévue incessamment.

    Un vrai-faux satellite ?

    Quel crédit accorder à ces informations ? Dans un premier temps, le porteporte-parole du gouvernement iranien, Gholamhossein Elham, ainsi qu'indépendamment un communiqué (multilingue) de l'Etat-Major des forces armées, reproduit par la branche officielle de l'agence de presse iranienne Omid, avaient bien affirmé que « Le second lancement de la fusée Safir porteuse du satellite Omid a été effectué avec succès ». Cette information, en provenance de plusieurs sources indépendantes mais officielles, a ensuite été démentie par un seul communiqué transmis à l'agence France-Presse.

    Safir 1 à l'instant de la mise à feu. Crédit : télévision iranienne.

    Safir 1 à l'instant de la mise à feu. Crédit : télévision iranienne.

    Alors, qui croire ? Venant de plusieurs sources iraniennes, l'erreur de traduction n'est pas plausible. Par contre, il serait plausible que ces communiqués visiblement préparés à l'avance, comme il est de coutume de le faire lors de déclarations politiques ou de prestige, se soient vus contrariés par un évènement imprévu, comme un échec du lancement.

    Ainsi, un responsable du Ministère de la Défense américain n'hésite pas à confirmer, sous le couvert de l'anonymat, que le tir du lanceur Safir a bien été détecté le 16 août mais qu'aucune charge n'a été placée en orbite. Charles Vick, un analyste de l'organisation américaine Global Security, affirme que même s'il semble que le deuxième étage du lanceur se soit bien mis à feu, un incident grave s'est produit ensuite qui a empêché la fusée de poursuivre son ascension. Fondant son analyse sur les photographiesphotographies, les images transmises par la télévision et les agences iraniennes ainsi que les premiers communiqués, il estime cependant que l'expérience acquise permettra à l'Iran de perfectionner son système de lancement, mais aussi de développer un vecteur capable de transporter une arme nucléaire vers l'Europe ou la Chine.

    Le lanceur Safir

    La fusée Safir apparaît très similaire au missile Shahab-3, dont un exemplaire avait été lancé le 25 février 2007 à 150 kilomètres d'altitude et était déjà annoncé comme les prémices d'une satellisation.

    Le lanceur Shahab-3 (version militaire). Crédit : Federation of American Scientists.

    Le lanceur Shahab-3 (version militaire). Crédit : Federation of American Scientists.

    Sa longueur de 22 mètres correspond à celle de Shahab (17 mètres) à laquelle on aurait ajouté un étage, et son diamètre (1,25 mètre) ainsi que sa masse au décollage (26 tonnes) la rapprochent de nombreux types de lanceurs russeslanceurs russes ou américains.

    Le satellite Omed dont la mise en orbite aurait échoué était un simple démonstrateurdémonstrateur technologique de 20 kgkg, dont on ne saura pas grand-chose de plus... jusqu'au prochain lancement.