La start-up Codagenix veut injecter un virus vivant mais « désoptimisé » dans l’organisme pour induire une réponse immunitaire plus forte qu’avec un vaccin classique. Une approche qui présente beaucoup d’avantages mais que certains jugent trop risquée.


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    Plus de 200 vaccins contre le coronavirus sont actuellement en cours de développement. Ces derniers ont adopté différentes approches pour lutter contre la maladie (voir encadré plus bas). Ces méthodes présentent cependant chacune des inconvénients : effets secondaires, faible efficacité, réponse immunitaire insuffisante, possibilité de fabrication limitée... La start-upstart-up Codagenix a donc une nouvelle idée, bien plus simple et plus rapide à mettre en œuvre : injecter le « vrai » coronavirus, mais en version « ralentie », pour qu'il se réplique moins efficacement.

    « Chaque virus, qu'il s'agisse de la grippe, du Zika ou du rhume, utilise la machinerie de la cellule hôte (ribosome) pour traduire son génomegénome et synthétiser ses protéinesprotéines, explique la start-up. Notre algorithme informatique recode et "désoptimise" les codonscodons des gènesgènes viraux, plaçant les gènes dans un langage qui est lu plus lentement par le ribosome de la cellule hôte ». En résumé, les gènes « désoptimisés » codent les mêmes séquences protéiques que dans le virus normal, mais de manière moins efficace.

     Les modifications effectuées dans le code génétique du virus l’empêchent de se répliquer efficacement. © Tierney, Adobe Stock© Tierney, Adobe Stock
     Les modifications effectuées dans le code génétique du virus l’empêchent de se répliquer efficacement. © Tierney, Adobe Stock© Tierney, Adobe Stock

    Un virus ralenti d’un facteur 1.000

    Alors que le coronavirus peut généralement se répliquer 100 millions de fois à l'intérieur d'une cellule en 24 heures, sa version « désoptimisée » produit deux fois moins de copies en laboratoire. « Dans l'organisme, il pourrait être moins copié par un facteur 1.000, ce qui donnera davantage de temps au système immunitairesystème immunitaire pour réagir », décrit Robert Coleman, le président de Codagenix, dans Technology Review. Non seulement ce « sous-virus » est moins pathogènepathogène, mais il induit une réponse immunitaire bien plus puissante que les vaccinsvaccins classiques, étant donné que tous les antigènesantigènes du virus normal sont présents.

    Ainsi, avec un vaccin utilisant une souche vivante, l'organisme rencontre l'ensemble du virus et pas uniquement les protéines de pointe. Le corps réagit alors non seulement en produisant des anticorpsanticorps, mais aussi des lymphocyteslymphocytes TT et des formes d'immunitéimmunité dans les voies nasales, ce qui permet d'élargir la protection. Dernier avantage et non des moindres : si le virus mute, pas besoin d'élaborer un nouveau vaccin puisqu'on utilise la vraie souche.

    Une vieille recette remise au goût du jour

    Avec son vaccin vivant, Codagenix ne fait que remettre au goût du jour la forme la plus ancienne de vaccin, celle du virus affaibli. Depuis des décennies, le vaccin de la varicellevaricelle, de la polio ou de la fièvre jaunefièvre jaune sont fabriqués sur ce concept sauf que, habituellement, on les cultive dans des œufs de poulets ou d'autres animaux afin qu'ils s'adaptent à cet hôte et deviennent moins virulents pour l'humain.

    Malgré tous leurs avantages, relativement peu de virus vivants sont pourtant mis sur le marché. « Il faut ajuster le code en permanence, explique au New York Times Robert Coleman, le directeur général de Codagenix. On ne peut jamais savoir exactement comment les mutations vont se comporter ». D'où l'idée de recourir à l'intelligence artificielleintelligence artificielle pour élaborer le meilleur code possible.

    Le saviez-vous ?

    Les différents types de vaccin en cours contre le coronavirus

    • Vaccin recombinant : un virus est isolé et inactivé au moyen d’un traitement chimique ou thermique, puis il est modifié pour ajouter à sa surface les protéines de pointe servant à la reconnaissance du virus par les cellules immunitaires. C’est, par exemple, le principe du vaccin contre la rougeole.
    • Vaccin à protéines virales : les protéines de pointe sont injectées dans l’organisme pour faire produire des anticorps correspondants, mais sans aucun matériel génétique, de telle sorte que le virus ne peut pas se multiplier. C’est l’approche adoptée par Novavax ou Sanofi et GSK.
    • Vaccin à ADN ou ARNm : un fragment d’ADN codant pour les protéines virales est amené dans la cellule qui va elle-même les transcrire en antigènes auxquels l’organisme va réagir. C’est le principe du vaccin de Moderna ou BioNTech.
    • Vaccin à vecteur viral : il fonctionne sur le même principe que le vaccin à ARN sauf que la séquence codant pour la protéine virale est amenée au moyen d’un virus inactivé dans la cellule. Johnson & Johnson a annoncé un vaccin reposant sur cette technologie.

    Risque de mutation

    D'autres scientifiques avouent leur scepticisme. « Le vaccin contre le coronavirus est très facile à fabriquer avec les protéines de pointe, souligne Michael Farzan, professeur d'immunologie et de microbiologie à l'Institut de recherche Scripps. Je ne vois pas dans ce cas l'intérêt d'apporter le risque d'apporter un virus vivant qui se multiplie dans l'organisme ».

    Un virus vivant, même atténuéatténué, est en effet potentiellement plus dangereux, surtout chez les personnes possédant un système immunitaire affaibli. Un autre risque est que le virus corrige lui-même les erreurs artificielles de codons et revienne à sa forme normale. C'est ce qui se produit avec la polio chez certains patients vaccinés qui sont alors atteints d'une forme plus grave que la maladie originale. À priori, les modifications génétiquesgénétiques programmées par Codagenix sont cependant trop nombreuses pour qu'un tel événement survienne, indique la start-up.

    Gouttes nasales

    Après des essais réussis chez l'animal, Codagenix se prépare à entamer un essai de phase 1 avec l'un de ces coronavirus synthétisés d'ici la fin de l'année. La fabrication est d'ores et déjà effectuée « à grande échelle » par le Serum Institute of India, le leader mondial du vaccin. Il sera administré sous forme de spray nasal, une procédure bien plus pratique que l'injection intra-musculaire et qui ne nécessite pas l'intervention d'un professionnel de santé. Malgré un léger retard par rapport à d'autres vaccins déjà en phase 3, Codegenix est donc bien parti pour figurer dans la liste des différentes solutions anti-Covid qui vont sans doute coexister.