Eau de consommation, irrigation… toute cette eau douce que nous utilisons quotidiennement provient en grande partie de nappes souterraines. Une étude montre cependant que ce pompage excessif aurait eu d’étonnantes répercussions sur l’axe de rotation de la Terre !


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    Si l'action sur l'environnement d'un seul individu peut paraître dérisoire à l'échelle de la Terre, il en va différemment si l'on considère l'humanité tout entière. Pour preuve, le dérèglement climatique et la pollution généralisée. Mais l'action humaine a un autre effet, plutôt surprenant et qui témoigne de notre capacité à impacter, par accumulation de petites actions, la planète sur laquelle nous vivons.

    Une nouvelle étude révèle ainsi que la Terre aurait basculé sur son axe d'environ 80 centimètres entre 1993 et 2010. En cause : le pompage et la redistribution d'importantes massesmasses d'eau du sous-sol !

    De précédentes estimations montraient qu'en seulement 17 ans, environ 2 150 gigatonnes d’eau avaient été pompées du sous-sol, soit l'équivalent d'une hausse de six millimètres du niveau des océans. Une importante redistribution de masse à la surface du globe qui aurait eu comme effet de modifier l'inclinaison de l'axe de rotation. Ce dernier résultat a été publié dans la revue Geophysical Research Letters.

    Un effet plus important que celui de la fonte des glaces !

    La Terre tourne en effet sur elle-même autour d'un axe reliant les deux pôles, incliné par rapport à la verticale. La position exacte de cet axe dépend cependant de la distribution des masses à l'intérieur de la Terre mais également en surface. Les phénomènes pouvant impacter l'inclinaison de l'axe sont donc nombreux : mouvementsmouvements du ferfer liquideliquide au sein du noyau externe, courants océaniques, ouragans, tsunamis... sans oublier les masses d'eau. Étant donné les quantités d'eau présentes sur Terre, celles-ci jouent en effet un rôle primordial. L'impact de la distribution des masses d'eau sur l'axe de rotation du globe a ainsi été établi en 2016, mais la contribution bien spécifique des eaux souterraines restait à déterminer. Car d'autres phénomènes sont à prendre en compte dans ce contexte, notamment la fonte des glaciers et des calottes polaires.

    Le pompage des nappes souterraines pour l'irrigation aurait participé à la migration de l'axe de rotation de la Terre. © Bits and Splits, Adobe Stock
    Le pompage des nappes souterraines pour l'irrigation aurait participé à la migration de l'axe de rotation de la Terre. © Bits and Splits, Adobe Stock

    En se basant sur l'observation de l'évolution récente de l'inclinaison de l'axe terrestre, les chercheurs ont donc effectué des séries de modélisationsmodélisations numériquesnumériques afin d'extraire la composante liée au pompage des masses d'eaux souterraines. Car il apparaît que l'effet causé par la constructionconstruction de barrages et par la fontefonte des glaciers n'était pas suffisant pour expliquer la migration de l'axe de rotation. La contribution de la redistribution des eaux souterraines est donc devenue évidente et a permis de faire corréler modèle et observations. Sur la période considérée, cet effet serait d'ailleurs supérieur à celui de la fonte des glaces du Groenland et d'Antarctique !

    Un pompage principalement dans l’hémisphère nord

    Un effet amplifié par le fait que la plupart de l'eau soutirée du sous-sol provient des moyennes latitudeslatitudes de l'hémisphère nordhémisphère nord. De l'eau utilisée pour notre consommation mais également pour l'irrigationirrigation, qui, une fois utilisée, va rejoindre les océans. Pour les chercheurs, si le pompage avait principalement eu lieu près de l'équateuréquateur ou des pôles, l'effet aurait été bien moins visible.

    Les zones de pompage les plus importantes sont situées dans les moyennes latitudes de l'hémisphère nord (a), induisant une hausse du niveau marin (b). © Seo et al. 2023, <em>Geophysical Research Letters</em>, CC by-nc-nd 4.0
    Les zones de pompage les plus importantes sont situées dans les moyennes latitudes de l'hémisphère nord (a), induisant une hausse du niveau marin (b). © Seo et al. 2023, Geophysical Research Letters, CC by-nc-nd 4.0

    Que l'on se rassure, ce phénomène est de trop faible amplitude pour avoir un impact sur les saisons ou le climatclimat, mais il révèle, si c'était encore nécessaire, l'impact global et à grande échelle que peuvent avoir les actions humaines. Ces résultats devraient également aider les scientifiques à évaluer d'autres phénomènes, notamment les changements de régime hydrologique au cours du dernier siècle en lien avec le réchauffement du climat.