Capter le dioxyde de carbone (CO2) dans l’atmosphère. Pour nous sortir de la crise climatique, nous allons désormais devoir en passer par là, estiment les chercheurs. Ce qui ne veut pas dire que nous pourrons… nous contenter de ça !


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    L'année dernière, la Silicon ValleySilicon Valley a investi quelque 50 milliards de dollars dans des technologies dites climatiques. Plus précisément, l'initiative Frontier ambitionne d'injecter rapidement près d'un milliard dans les technologies de captage de dioxyde de carbone (CO2). Partout dans le monde, des projets se développent autour de la question du captage et du stockage de carbone, le CSC, comme disent les experts. La semaine dernière encore, des chercheurs de l'université Lehigh (États-Unis) présentaient une nouvelle solution. Un filtre polymèrepolymère capable de convertir un CO2 directement capturé dans l'airair en un bicarbonatebicarbonate de sodiumsodium qui peut alors être rejeté dans les océans.

    Selon les chercheurs, l'usage d'un tel matériaumatériau hybride permettrait de faire grimper l'efficacité du captage de carbone de 300 % par rapport aux méthodes existantes. « Je ne cherche pas à développer une technologie pour gagner de l'argentargent, mais pour sauver le monde, déclarait Arup SenGupta, auteur principal des travaux, dans un communiqué de l’université Lehigh. Parce que réduire nos émissionsémissions ne résoudra pas le problème posé par le CO2 déjà présent dans notre atmosphère ».

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    C'est un peu ce que concluait aussi le Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climatGroupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (Giec) il y a un peu plus d'un an. Pour atteindre les objectifs de zéro émission nette, il faudra en passer par le déploiement de technologies de captage et stockage du carbone (CSC), voire par la création de puits de carbone artificiels, comprenez par la mise en œuvre de technologies qui captureront directement le CO2 dans l'air -- comme le font naturellement les arbres.

    Mais vanter aujourd'hui ces technologies -- dont certaines sont tout à fait prêtes à fonctionner -- est-il sans risque ? C'est la question que se sont posée des chercheurs de l’université de Lancaster (Royaume-Uni). Plus précisément, ils se sont demandé si la possibilité qu'offrent les technologies de CSC d'éliminer le carbone de l'atmosphère ne risque pas de retarder encore un peu plus les efforts de réduction de nos émissions de gaz à effet de serre.

    Ne pas perdre de vue l’importance de la réduction des émissions

    Ils rapportent ainsi que certains modèles informatiques complexes développés pour simuler comment les émissions changent en fonction des technologies à disposition montrent que l'option captage du carbone a effectivement tendance à se substituer aux mesures de réduction des émissions. Et si quelques critiques ont été formulées quant à la pertinence de ces résultats, il se trouve qu'ils ont tout de même tendance à orienter les politiques et de fait... à gagner en pertinence.

    Les chercheurs présentent aussi d'autres études qui évaluent l'intérêt du public pour les technologies de captage du CO2. Des études qui semblent conclure à un faible risque de substitution des mesures de réduction des émissions par le CSC, voire à un effet contraire. Mais les chercheurs soutiennent que c'est compter un peu trop sur la rationalité des décisions prises. Selon eux, un certain nombre de paramètres sociaux, culturels, politiques et économiques n'ont pas été suffisamment considérés.

    Même si des études plus poussées seront encore nécessaires pour conclure, les chercheurs de l'université de Lancaster soulignent que l'influence exercée par les plus puissants intérêts économiques sur les politiques gouvernementales a bel et bien tendance à favoriser le développement de technologies de captage de carbone au détriment des mesures de réduction des émissions. Ils donnent pour exemple le nouveau plan rendu public par le gouvernement du Royaume-Uni. Celui-ci comprend le financement à hauteur de près de 25 milliards de dollars sur 20 ans de nouveaux sites de captage et de projets de stockage de CO2 en mer du Nord. Il n'annonce en revanche par exemple aucune mesure destinée à isoler les bâtiments pour réduire les consommations d’énergie et ainsi, les émissions de gaz à effet de serregaz à effet de serre.