Depuis le bannissement des CFC, qui dévoraient l'ozone stratosphérique, le protoxyde d'azote (N2O), produit en masse par l'agriculture, devient le principal ennemi de cette couche protectrice, en plus d'être un puissant gaz à effet de serre. Deux études en démontrent les effets très nocifs...

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    Une partie de la stratosphère (dont le le plancher se trouve entre 8 et 20 km d'altitude) contient une concentration plus forte d'ozone (O3), de l'ordre de un pour mille, qui absorbe assez fortement les rayons ultraviolets provenant du Soleil. © NOAA

    Une partie de la stratosphère (dont le le plancher se trouve entre 8 et 20 km d'altitude) contient une concentration plus forte d'ozone (O3), de l'ordre de un pour mille, qui absorbe assez fortement les rayons ultraviolets provenant du Soleil. © NOAA

    Après la chasse au dioxyde de carbone (CO2), faut-il déclarer la guerre au N2O ? Le protoxyde d'azoteprotoxyde d'azote, alias oxyde nitreux ou encore gazgaz hilarant, est produit naturellement (par la terre et par les océans). Mais aujourd'hui le tiers des émanations est dû aux activités humaines, et en particulier à l'épandage de lisier et d'engrais azotés.

    Deux équipes viennent d'en démontrer le danger, à la fois pour le maintien d'une forte concentration d'ozoneozone dans la stratosphère, que l'on appelle la couche d'ozone et qui protège les êtres vivants des rayons UVUV, et pour le climat car le protoxyde d'azote est un puissant gaz à effet de serregaz à effet de serre, 275 fois plus efficace que le CO2.

    Akkihebbal Ravishankara et son équipe du Earth System Research Laboratory, au sein de la NOAA (National Oceanic and Atmospheric AdministrationNational Oceanic and Atmospheric Administration), ont étudié l'impact du N2O sur l'ozone stratosphérique, ce qui, semble-t-il n'avait encore jamais été fait. Les auteurs ont voulu déterminer l'importance relative du protoxyde d'azote par rapport aux effets d'autres gaz connus pour dégrader l'ozone de la stratosphère.

    En 1987, le protocole de Montréalprotocole de Montréal bannissait les CFCCFC (ou chlorofluorocarbures, abondamment utilisés dans l'industrie du froid ou comme gaz propulseurpropulseur) et d'autres moléculesmolécules, comme les HCFC (hydrochlorofluorocarbureshydrochlorofluorocarbures) et les hydrocarbureshydrocarbures halogénés. Ces substances, qui dégradent l'ozone stratosphérique, ont été progressivement abandonnées par un très grand nombre de pays.

    Mais le protoxyde d'azote n'a pas été inclus dans ce protocole et, de ce fait, devient aujourd'hui le premier ennemi de la couche d'ozonecouche d'ozone, concluent Akkihebbal Ravishankara et ses collègues dans un article publié dans Science. Selon les auteurs, il le restera durant tout le vingt-et-unième siècle.

    De l'azote dans la terre, c'est de l'azote en l'air et de l'ozone en moins

    Les activités humaines, en effet, en émettent beaucoup et de plus en plus. La principale source est l'épandage de lisier, de fumier et d'engrais azotés. Voilà donc l'élevage et l'agricultureagriculture intensive de nouveau sur la sellette, après les études démontrant que le méthane produit par les vachesvaches augmente l'effet de serre...

    Dans la revue Nature Geoscience, Eric Davidson, biogéochimiste au Woods Hole Research Center (Massachusetts), a comptabilisé les productions d'origine humaine. Selon lui, le lisier et le fumier relâchent dans l'atmosphèreatmosphère 2% de l'azote qu'ils contiennent et les engrais azotés 2,5%. Au total, explique-t-il, les déjections animales, par l'intermédiaire du fumier et du lisier, exhalent chaque année 2,8 millions de tonnes de N2O, venant s'ajouter aux 2,2 millions de tonnes provenant des engrais synthétiques.

    Loin derrière, l'industrie rejette 0,8 million de tonnes et la combustioncombustion de la biomassebiomasse 0,5 million de tonnes. En prenant compte l'évolution de l'agriculture, Davidson a estimé l'injection de protoxyde d'azote dans l'atmosphère entre 1860 et 2005. La concentration dans l'atmosphère serait passée de 270 à 319 ppb (parties par milliard).

    L'auteur remarque que la proportion de protéinesprotéines animales dans l'alimentation humaine étant en augmentation, la gestion du fumier deviendra « une composante importante des efforts pour réduire la production humaine d'oxyde nitreux ». Bientôt une taxe N2O ?