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    Le 13 janvier, Arianna Huffington, fondatrice du Huffington Post, le désormais célèbre site InternetInternet américain d'information et de blogsblogs, s'est retrouvée à la une de son propre média. Son fait d'armes : avoir retiré une lame de la gorge de l'avaleur de sabres Dan Meyer, titulaire de plusieurs records dans cette discipline multimillénaire.

    L'avaleur de sabre. © Rodw<em> Wikimedia commons</em>, DP
    L'avaleur de sabre. © Rodw Wikimedia commons, DP

    Mais Arianna Huffington devait ignorer que Dan Meyer est, avec le radiologue britannique Brian Witcombe, le coauteur d'une étude publiée en décembre 2006 dans le fort sérieux British Medical Journal (BMJ). L'article en question, qui leur a valu dès 2007 un IgNobel, récompense suprême de la science improbable, est consacré aux petits problèmes de santé que rencontrent les avaleurs de sabres (qui, techniquement parlant, sont plus souvent des épées).

    Le performeur Dan Meyer a remporté un IgNobel en 2007 avec le radiologue Brian Witcombe pour un article sur les problèmes de santé des avaleurs de sabres. © Gandolf5, CC by-sa 3.0 
    Le performeur Dan Meyer a remporté un IgNobel en 2007 avec le radiologue Brian Witcombe pour un article sur les problèmes de santé des avaleurs de sabres. © Gandolf5, CC by-sa 3.0 

    « N'est pas engloutisseur de sabres qui veut ! »

    Mais attention ! On ne parle là que des véritables spécialistes reconnus par la très officielle Association internationale des avaleurs de sabres (SSAI, d'après l'acronyme anglais). Les gobeurs de cure-dents et d'épingles à nourrice n'ont pas été retenus dans cette étude, laquelle précise bien qu'« ont été exclus les cas où la blessure a été faite en avalant des objets autres que des épées, comme des verresverres, des tubes de néontubes de néon, des fusils-harpons ou des marteaux-piqueurs ». N'est pas engloutisseur de sabres qui veut. Pour obtenir le fameux triple A - authentique avaleur d'armes blanches - et l'homologation de la SSAI, les candidats doivent fournir les preuves de leurs gorges profondes. C'est-à-dire des vidéos où ils utilisent de véritables épées en acier, non rétractables, dont la lame mesure au minimum 38 cm de long pour 1,3 cm de large.

    Pour collecter les données de leur étude, Brian Witcombe et Dan Meyer ont écrit à 110 membres de la SSAI afin de leur demander des détails sur leur pratique (à quel âge et comment ils avaient appris cet art, quelle avait été leur consommation de lames au cours des trois derniers mois) et une quarantaine d'entre eux ont accepté d'ouvrir bouches et dossiers médicaux. Certains gloutonsgloutons ont ainsi reconnu avoir avalé plusieurs épées en même temps (jusqu'à 16 !), d'autres en avoir ingurgité 300 au cours du trimestre précédant l'enquête, et un dernier a même avoué s'être envoyé une lame de 79 cm de long derrière la cravate.

    Un minimum de 38 cm dans la longueur de la lame est nécessaire pour être reconnu par la SSAI, Association internationale des avaleurs de sabres. © Whysteriastar, CC by-sa 3.0 
    Un minimum de 38 cm dans la longueur de la lame est nécessaire pour être reconnu par la SSAI, Association internationale des avaleurs de sabres. © Whysteriastar, CC by-sa 3.0 

    Une technique et une discipline de fer

    Une telle boulimieboulimie de flamberges ne peut que laisser des traces, même si certains se remplissent l'estomac de nourriture ou de boisson pour le lester et le mettre dans une position plus verticale, ce qui facilite l'insertion des armes les plus longues jusque dans cet organe. Pendant la descente aux enfers gastriques, l'épée, dans son fourreau œsophagien, passe au ras du cœur, de l'aorte et des poumonspoumons, mais les auteurs de l'article du BMJ ne sont pas parvenus à trouver trace d'accidentaccident mortel récent. En revanche, parmi le panel d'avaleurs interrogés, certains ont admis avoir quelquefois des douleursdouleurs dans la poitrine ou ont retiré une épée ensanglantée de leur gosier. Les cas les plus graves ont été des perforations du pharynxpharynx et de l'œsophageœsophage, mais l'étude relativise ces accidents en expliquant qu'il arrive de temps à autre aux médecins pratiquant une endoscopie de rater leur coup, avec des conséquences parfois mortelles. Ceci dit, le symptômesymptôme le plus fréquent chez les membres de la SSAI est un mal de gorge qui les gêne pour... avaler leur nourriture. Devrait-on leur conseiller de ne pas manger fourchettes et couteaux avec ?