Des nanomoteurs légèrement plus petits que le micromètre, fabriqués par une équipe de chercheurs états-uniens, viennent de battre les records de vitesse de rotation et d'endurance. Ces nanomoteurs, que l'on peut considérer comme les plus petits et les plus rapides du monde, pourraient avoir des applications en nanomédecine dans un avenir proche. Ils pavent aussi la longue voie menant peut-être à terme vers les nanorobots d'Eric Drexeler.

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    Les gourous du transhumanismetranshumanisme, tel Ray Kurzweil, estiment que les progrès des nanotechnologiesnanotechnologies, de la biologie, des neurosciences et de l'informatique vont radicalement changer notre monde dans moins de 50 ans. L'un des premiers prophètes de ce nouvel âge, où tout serait possible ou presque, est l'ingénieur états-unien K. Eric Drexler. Il a exposé ses idées dans un livre paru en 1986, Engines of Creation, et il est clair que certaines des idées de Drexler et Kurzweil sont reprises dans le film Transcendance qui devrait sortir en juin en France.

    L'une des inspirations du livre de Drexler est une conférence donnée en 1959 par le légendaire Richard Feynman. Le prix Nobel de physique y lançait notamment un défi doté d'un prix de 1.000 dollars : la constructionconstruction d'un moteur électrique tenant dans un cube de 6,35 mm d'arête. Onze mois plus tard, l'ingénieur William McLellan remporta le prix en construisant un moteur de 250 mg tournant à 2.000 tours/minute, fait de 13 pièces.

    Des nanomoteurs électromagnétiques

    Drexler prit connaissance du compte rendu de cette conférence en 1979. Il explore depuis lors l'idée de manipuler la matière à l'échelle des atomes et des molécules pour réaliser des exploits jusque-là impossibles. Il est ainsi, par exemple, envisageable de réparer des cellules à l'aide de nanorobots fonctionnant à l'aide de nanomoteurs. Beaucoup partagent des espoirs similaires et des équipes de par le monde se sont lancées dans la course à la réalisation des nanomoteurs. Le dernier exploit en date provient d'une équipe de chercheurs de la Cockrell School of Engineering de l'université du Texas à Austin. Les résultats de leur travaux ont été publiés dans un article de Nature Communications.


    Une vidéo de présentation des nanomoteurs obtenus par les chercheurs. Pour obtenir une traduction en français assez fidèle, cliquez sur le rectangle avec deux barres horizontales en bas à droite. Les sous-titres en anglais devraient alors apparaître, si ce n'est pas déjà le cas. En passant simplement la souris sur le rectangle, vous devriez voir l'expression « Traduire les sous-titres ». Cliquez pour faire apparaître le menu du choix de la langue, choisissez « français », puis cliquez sur « OK ». © Cockrell School, YouTube

    Les chercheurs ont réussi à assembler et à faire fonctionner in vitroin vitro des nanomoteurs de la taille d'une cellule et capables d'effectuer 18.000 rotations par minute, soit la vitesse de rotationvitesse de rotation de certains moteurs d'avions (à turbine). Tout en pulvérisant les précédents records de vitesse de rotation, les physiciensphysiciens ont aussi largement franchi les limites des temps de fonctionnement avec ces nano-objets puisqu'ils ont maintenu cette vitesse de rotation pendant 15 heures. Les précédents nanomoteurs ne pouvaient fonctionner que de quelques secondes à quelques minutes avec des vitesses de rotation allant de 14 à 500 rotations par minute.

    Des substances actives libérées sur demande

    Pour assembler les nanomoteurs dans le nanomonde, des techniques basées sur des champs électriques statiques et oscillants ont été utilisées pour manipuler des nanofilaments servant de rotor, des microélectrodes quadripolaires comme stator et des nanoaimants comme palier (organes mécaniques supportant et guidant, en rotation, des axes tournants). Ces mêmes champs pouvaient permettre de contrôler à volonté les vitesses ainsi que les sens de rotation des nanomoteurs.

    Les rotors ayant été couverts par des molécules pouvant jouer le rôle de substances activessubstances actives pour un traitement médical, les chercheurs ont constaté que ces molécules étaient libérées d'autant plus rapidement que les vitesses de rotation étaient plus élevées. Il est donc possible de contrôler cette libération dans un organisme ayant ingéré ces nanomoteurs, contrairement au cas des simples nanoparticules.

    Il y a encore beaucoup à faire, par exemple des tests in vivoin vivo, avant que ces nanomoteurs n'équipent les nanorobots dont les auteurs de science-fiction et les transhumanistes rêvent. Mais incontestablement, le travail des membres de la Cockrell School of Engineering nous en rapprochent un tout petit peu plus. Qui peut savoir où en sera cette technologie dans 30 ans ?