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Cette image prise avec un microscope électronique montre un nanofilament de silicium entouré d'une coque protectrice. Composée d'alumine, elle est visible en fausse couleur bleue. Des nanofilaments identiques ont été synthétisés par des chercheurs de l'université Harvard cherchant à améliorer les dispositifs nanoélectroniques pour des applications biomédicales. © Lieber Research Group, université Harvard
Comme pour la nanoélectronique, on peut prévoir que la nanomédecine va prendre de plus en plus d'importance dans les décennies à venir. Reste à savoir si les deux disciplines permettront d'accomplir les miracles technologiques prophétisés par les gourous du transhumanismetranshumanisme d'ici 2045. Une chose semble certaine : alors que les robots sont en train de se rapprocher des êtres humains, l'inverse est aussi vrai. En plus de prothèsesprothèses cybernétiques rendant l'usage de la vue et remplaçant des membres, on peut prévoir que nous finirons par être dotés de dispositifs microscopiques implantés dans notre corps et mesurant divers paramètres en continu.
Équipés de nanocapteurs, ces dispositifs pourraient surveiller la composition chimique de notre sang à l'affût de signaux précurseurs de maladies comme le cancercancer ou le diabètediabète. On peut aussi rêver qu'ils permettront d'augmenter nos capacités physiques ou cognitives, par exemple avec des respirocytes. À cet égard, une publication récente dans Nano Letters par des membres du Lieber Research Group (menés par l'un des professeurs de chimie de la célèbre université Harvard, Charles M. Lieber) a retenu l'intérêt des transhumanistes tel Ray Kurzweil.
Charles M. Lieber, chercheur de l’université Harvard, dirige l'équipe qui a réalisé des tissus cyborgs intégrant des circuits nanoélectroniques. Il vient de trouver le moyen d'augmenter la durée de vie de nanofilaments en silicium in vivo. © Kris Snibbe
L'idée d'introduire dans notre corps des dispositifs microscopiques bourrés de nanocomposants électroniques n'est cependant pas sans poser de nombreux problèmes. Le plus évident est celui de la biocompatibilité de tels systèmes. On sait que les nanoparticulesnanoparticules et les nanotubes ne sont pas forcément sans danger pour l'organisme. Bien sûr, on pourrait faire valoir aussi que ces dispositifs peuvent devenir d'extraordinaires moyens de surveillance à disposition d'une société totalitaire, et qu'ils constituent donc en réalité plutôt une menace pour la vie des individus et un moyen de les contrôler.
Nanoélectronique et nanomédecine in vitro
Mais avant d'être confronté à ces questions, il y en a une toute simple à laquelle il faut répondre. Combien de temps de tels dispositifs peuvent-ils fonctionner sans être endommagés gravement in vivoin vivo ?
Il se trouve que des nanofilaments de silicium montrent des signes de dissolution dans un organisme en moins de dix jours. C'est pour tenter de résoudre ce problème que les chercheurs ont eu l'idée de recouvrir ces filaments d'un revêtement en alumine de dix nanomètres d'épaisseur. Ils les ont ensuite plongés dans un tampon phosphatephosphate salin (souvent abrégé PBS, de l'anglais phosphate buffered saline, une solution couramment utilisée en biochimie), auquel ont été ajoutées des cellules mises en culture. Il s'agissait de simuler les conditions rencontrées à l'intérieur du corps humain.
Les résultats ont été très encourageants. Les nanofilaments de siliciumsilicium protégés par l'alumine ont maintenant une résistancerésistance à la dissolution durant 100 jours. Ils ont même servi comme transistors à effet de champ dans une solution PBS tiède pendant quatre mois. Des tests in vivo avec des rongeursrongeurs sont en cours.