Les monuments antiques les plus touristiques d'Égypte seraient en passe de se refaire une beauté. Le gouvernement égyptien a annoncé le lancement d'un projet de restauration de la façade de l'une des pyramides de Gizeh, Mykérinos. Séduisante en premier lieu, l'idée suscite l'inquiétude des archéologues et égyptologues.


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    Une vidéo publiée par le secrétaire général du Conseil suprême des antiquités égyptiennes a lancé un véritable débat en Égypte. Se tenant au pied de la pyramide de Mykérinos, à proximité du Caire, Mostafa Waziry annonçait fin janvier le début d'un chantier pour le moins pharaonique visant à restaurer la structure. Haut de 63 mètres et se situant légèrement en contrebas des pyramides de Kheops et Khephren, le monument accuse son âge, ayant été construit vers -2 500 avant J.-C. L'objectif semble simple : recouvrir de granit les pierres anciennes pour rendre à la pyramide son aspect d'antan. Sur le papier, l'idée peut plaire. Mais elle suscite une levée de boucliers chez les égyptologues et les historienshistoriens, qui craignent notamment que la structure globale de l'édifice soit fragilisée et endommage l'ensemble.

    Des constructions antiques faites pour durer

    Elles font partie des sept merveilles du monde antique, et sont les seules à avoir survécu à l'épreuve du temps. Construites il y a quatre millénaires, les pyramides de Gizeh accusent cependant leur âge. Le processus de leur constructionconstruction reste assez mystérieux, dû à la complexité de l'ouvrage et bien que des vestiges archéologiques aient été trouvés dans la région, éclairant les archéologues sur la construction desdites pyramides. Les blocs de pierre de 2,5 tonnes amoncelées sur plusieurs dizaines de mètres de hauteurs étaient initialement recouverts d'un granit blanc. Un aspect que souhaite retrouver le Conseil suprême des antiquités égyptiennes.

    Après la publication d'une vidéo explicative relayée par Mostafa Waziry, l'égyptologue renommée Monica Hanna interpellait le responsable gouvernemental sur X (anciennement TwitterTwitter). Pointant une frénésie de la restauration, sa principale inquiétude est la modification substantielle de l'un des plus anciens monuments du monde. Elle renvoie notamment à la rénovationrénovation d'une statue devant le temple de Louxor, mal proportionnée et ne correspondant pas aux standards de construction de l'Antiquité.

    Problèmes structurels

    L'une des photos publiées par Monica Hanna permet de visualiser ce qui pourrait constituer la grande œuvre du gouvernement égyptien. Les blocs de granit viendraient se superposer à la structure déjà existante, formant un revêtement. Au-delà des problèmes d'authenticité, ce sont des questionnements structurels qui surgissent. La pyramide pourra-t-elle encaisser le poids ajouté de nouveaux blocs de pierre, tout aussi lourds ? Le risque de perdre la pyramide existe, supposant qu'elle s'effondre sous son propre poids. Une hypothèse catastrophique, sur laquelle devrait se pencher un comité scientifique constitué pour examiner la viabilité du projet.

    On observe ici le revêtement en granit apposé à la base de la pyramide de Mykérinos. © Jon Bodsworth, Wikimedia Commons
    On observe ici le revêtement en granit apposé à la base de la pyramide de Mykérinos. © Jon Bodsworth, Wikimedia Commons

    Cette idée en apparence démesurée s'ancre dans la politique de l'Égypte de restaurer la grandeur de ses sites archéologiques, après une décennie marquée par la guerre civile, les attentats terroristes puis l'épidémieépidémie de Covid-19Covid-19, ayant freiné le tourisme. Si la rénovation de la pyramide de Mykérinos est validée, le chantier pourrait alors s'étendre sur trois ans.