Découvert dans les années 1950, le site préhistorique des chutes de Kalambo, dans l’actuelle Zambie, regorge d’artefacts archéologiques. Les archéologues viennent d’y découvrir une structure en bois façonnée à la main datant d’il y a environ 476 000 ans. Une découverte étonnante, car nous pensions que les hominidés de l'époque n'utilisaient du bois que pour le feu ou pour tailler des bouts de bois pour la chasse !


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    Situé au-dessus d'une magnifique chute d'eau de 235 mètres, le site archéologique de Kalambo, situé à la frontière entre la Zambie et la Tanzanie, a été fouillé pour la première fois dans les années 1950. Les archéologues y avaient trouvé de nombreux vestiges archéologiques, comme des bâtons taillés, des gourdins de boisbois ou des outils en pierre, sans cependant parvenir à les dater. Le site est aujourd'hui classé dans la liste indicative de l'Unesco pour devenir un patrimoine mondial, en raison de son importance archéologique.

    Une structure en bois étonnamment bien préservée

    Lors de fouilles en 2019, une équipe d'archéologues a découvert fortuitement sur le site un morceau de bois sortant d'une falaise. Les fouilles ont alors révélé deux rondins de bois de plus d'un mètre de long emboîtés l'un dans l'autre, reliés par une entaille d'origine non naturelle. Un réel trésor, car il est très rare de trouver du bois aussi bien conservé dans des sites aussi anciens : d'habitude, il pourrit et se détériore rapidement, avant de disparaître. Selon les chercheurs, les conditions extrêmement humides du site de Kalambo ont rendu possible la conservation de cette structure. L'équipe d'archéologues pense que la structure devait vraisemblablement servir de fondation pour une plateforme surélevée ou d'une partie d'un logement. Ils publient leurs résultats dans la revue Nature.

    Ce trésor nouvellement découvert a été daté grâce à une technique de datation par luminescence, récemment mise au point. Elle consiste à déterminer à quel moment les dépôts entourant la structure (sédimentssédiments) ont pour la dernière fois été exposés à la lumière du Soleil, dont on peut déduire le moment où la pièce de bois a été enfouie. Résultat : la structure aurait été enfouie il y a environ 476 000 ans. Pour rappel, les plus anciens fossiles d'Homo sapiensHomo sapiens jamais découverts datent d'il y a environ 300 000 ans, soit plus d'une centaine de milliers d'années plus tard ! Notons également que la plus ancienne structure en bois découverte avant celle de Kalambo ne datait que d'il y a 9 000 ans.

    Image du site Futura Sciences
    Le rondin de bois du bas passe par une entaille centrale coupée dans le rondin du haut (noté « Object 1033 ») et s’étend dans la section. À gauche, une vue en plan de la structure, à droite, la structure lors de l'excavation. Les chiffres font référence à la distance en centimètres.

    © Barham et al, 2023

    Des hominidés plus avancés qu’on ne le pensait

    Les scientifiques peinent cependant à déterminer quelle espèceespèce d'hominidéshominidés a exploité ce site. Leur hypothèse la plus probable pointe du doigt l'espèce Homo heidelbergensis, éteinte il y a environ 200 000 ans. Il n'y a en effet que très peu de fossilesfossiles d'hominidés découverts dans la région, mis à part un crânecrâne d'Homo heidelbergensisHomo heidelbergensis découvert en Zambie dans les années 1920.

    Quoi qu'il en soit, cette découverte change notre vision de la vie des anciens hominidés, et permet des conjectures très intéressantes. La constructionconstruction d'une telle structure démontre d'une certaine intelligenceintelligence, permettant aux hominidés d'il y a un demi-million d'années de façonner des objets qu'ils n'avaient jamais vus auparavant (contrairement à des bâtons taillés, trouvables dans la nature et donc imitables), montrant une capacité d'imagination. Les chercheurs en déduisent également un possible mode de vie sédentaire des hominidés de l'époque, bien que cette hypothèse soit pour le moment à prendre avec des pincettes.

    L'équipe de scientifiques estime que l'usage du bois était possiblement bien plus répandu qu'on ne le pensait chez les anciens hominidés ; selon eux, le manque d'informations à ce sujet viendrait ainsi de la conservation très difficile de ce matériau sur de grandes échelles de temps.