Après une année de débats intenses et de campagnes propagandistes, la Haute Autorité de santé (HAS) vient de rendre son avis - défavorable - au maintien du remboursement des granules. Cela ne surprend personne au sein de la communauté médicale, hormis les homéopathes.


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    La création de cette discipline est attribuée à Samuel Hahnemann, un médecin allemand du XVIIIe siècle. Selon lui, les maladies pouvaient être soignées en diluant « à l'infini » le pathogène responsable des symptômes. Cette hypothèse naît avant la découverte du nombre d'Avogadronombre d'Avogadro. À une époque où la médecine moderne n'est pas encore au goût du jour, la technique de Hahnemann est plutôt un bénéfice pour certains patients qui ont plus de chance de survie sans « traitement » (saignéesaignée ou purge).

    Pour faire un petit bonbon homéopathique, il faut :

    • trouver un pathogène qui crée les symptômes du patient,
    • le diluer de façon infinitésimale,
    • dynamiser cette solution,
    • individualiser le traitement pour le patient.

    On trouve, bien sûr, un lot de contre-exemples au sein même des médicaments homéopathiques qui ne respectent pas ces quatre principes. Mais ce qui est étrange, c'est que ces granules aient obtenu le titre de médicament sans jamais avoir besoin de prouver ni les principes qui sous-tendent à la discipline, pispis encore, ni l'efficacité propre des remèdes associés. Les choses ont changé, ce vendredi 28 juin, la Haute Autorité de santé (HAS) a rendu public son rapport et la France devrait rejoindre la grande majorité des pays européens qui ne remboursent pas les médicaments homéopathiques.

    L’agence rappelle que son but n’était pas de statuer sur la pratique médicale homéopathique ou son enseignement. © Marc Roche, Fotolia
    L’agence rappelle que son but n’était pas de statuer sur la pratique médicale homéopathique ou son enseignement. © Marc Roche, Fotolia

    Ce que dit la Haute Autorité de santé

    Dans son communiqué de presse publié dernièrement, la HASHAS donne un avis défavorable au maintien du remboursement de l’homéopathie pour plusieurs raisons :

    • Pas de preuve de l'efficacité́ des médicaments dans les études scientifiques sur l'ensemble des 24 symptômes ou affections étudiées ;
    • Pas de données d'efficacité́ disponibles (ou données insuffisantes) pour toutes les autres affections, au-delà̀ de celles identifiées par la commission ;
    • Pas de nécessité de recourir aux médicaments classiques et aux médicaments homéopathiques dans des pathologies sans gravité ou qui guérissent spontanément ;
    • Pas d'étude robuste sur la qualité de vie des patients consommant des médicaments homéopathiques. Par conséquent, il n'a pas été possible d'apprécier l'impact en termes de qualité de vie ;
    • Pas d'impact attribuable aux médicaments homéopathiques sur la consommation d'autres médicaments, la diminution du mésusage, le nombre d'hospitalisations, les retards à la prise en charge ou sur l'organisation des soins et donc, sur la santé publique en général.

    Lors de la conférence de presse qui s'est également tenue ce vendredi 28 juin, la présidente de la HAS, Dominique Le Guludec, a tout de même voulu signaler « que le recours à l'homéopathie ne doit pas retarder la prescription des soins nécessaires à la prise en charge des patients, en particulier pour les maladies graves et évolutives. » D'autres membres présents affirment « vouloir sortir de la culture du tout médicament et recourir aux approches préventives ou thérapeutiques non médicamenteuses (par exemple, l'activité physiquephysique) qui ont une efficacité prouvée sur la santé. »

    L'agence rappelle que son but n'était pas de statuer sur la pratique médicale homéopathique ou son enseignement. Dès lors, se pose la question de la suite : que va devenir l'homéopathie ?

    Pour certains, c’est peut-être le moment de s’éloigner de la culture du « tout médicament » et de privilégier des approches préventives. © Robert Kneschke
    Pour certains, c’est peut-être le moment de s’éloigner de la culture du « tout médicament » et de privilégier des approches préventives. © Robert Kneschke

    Quel avenir pour les granules ?

    Madame Agnès Buzyn, la ministre des Solidarités et de la Santé, a déclaré que « la décision peut attendre, la caniculecanicule actuelle est ma priorité ». Soit ! cela se comprend aisément. Il faut espérer cependant que des influences en tous genres ne viennent pas perturber la décision de la ministre qui avait affirmé qu'elle « se tiendrait à l'avis de la HAS ». Nous saurons donc, dans quelques jours ou dans quelques semaines, si la politique française en matièrematière de santé bascule (ou non) vers le côté obscur de la granule.

    Si les granules homéopathiques seront probablement déremboursées, il reste donc le problème de son enseignement (enseigner des principes qui n'ont pas été démontrés posent quelques problèmes d'éthique intellectuelle) et de sa pratique. Rappelons que si vous êtes un fervent adepte de ces granules, elles seront toujours disponibles à la vente. Il faudra juste les payer de votre poche.

    À dire vrai, il semble qu'on assiste ici à un phénomène d'ordre sociologique où les gens cherchent un absolu qui les rassure, alors qu'il faudrait, semble-t-il, plus de bienveillance au sein de la médecine moderne, même si elle n'en est pas dépourvue, loin de là.