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Les pigeons voyageurs (Columba livia)) intriguent depuis des siècles par leurs étonnantes facultés de navigation. Elles leur permettent par exemple de revenir à leurs pigeonniers après avoir été déplacés par l'Homme vers des lieux inconnus. Nos aînés ont d'ailleurs su exploiter cette caractéristique, puisque des pigeons ont notamment été utilisés comme messager durant la première guerre mondiale par l'armée belge. Mais que sait-on au sujet de ces capacités ? Quelques faits semblent avérés. Ainsi, comme les oiseaux migrateurs, les pigeons voyageurs utiliseraient le SoleilSoleil, les étoilesétoiles et le champ magnétique terrestre pour naviguer.
Ceci dit, cette information n'explique pas comment ils opèrent pour toujours revenir avec précision vers leur résidence principale. À ce sujet, deux hypothèses s'affrontent. Selon la première, les volatiles agiraient « mécaniquement ». Ils connaîtraient les coordonnées géographiques de leurs pigeonniers, et chercheraient à les rejoindre quoi qu'il arrive s'ils sont déplacés. La deuxième hypothèse les dote de meilleures capacités cognitives. Les Columba livia voyageurs auraient pleinement conscience de l'environnement qui les entoure, et de leur position par rapport à leur pigeonnier. En d'autres mots, ils auraient une carte dans la tête qu'ils pourraient interpréter.
Pour prouver l'une ou l'autre de ces théories, une doctorante de l'université suisse de Zurich, Nicole Blaser, a mené une expérience avec 131 volatiles équipés de mini-enregistreurs GPS. Les résultats viennent d'être publiés dans la revue Journal of Experimental Biology (JEB). C'est confirmé : les pigeons voyageurs ne sont pas des robotsrobots !
Ce pigeon voyageur a pris part à l'expérience de Nicole Blaser. Dans ce cadre, il a été équipé de l'enregistreur GPS no 13. Classiquement, le poids d'un appareil électronique de géolocalisation ne doit pas excéder 3 % du poids de l'oiseau sur lequel il est fixé. © UZH
Les pigeons affamés volent vers la nourriture
Contrairement à ce qui se fait avant les compétitions colombophiles, les pigeons n'ont pas été conditionnés, par exemple en recevant de la nourriture dans leur pigeonnier d'origine, avant d'être déplacés. Attention, cela ne signifie pas qu'ils n'ont pas été nourris. Ils ont bien reçu des graines, mais dans un autre pigeonnier situé à 30 km du premier. Après cela, les volatiles ont été emmenés sur un troisième site qui leur était inconnu, au sein d'un territoire non-familier. Il se trouve à équidistance des deux sites précédemment évoqués, dont la vue était masquée par des obstacles naturels.
C'est à ce stade qu'intervient l'astuce de l'expérience. Deux groupes de pigeons ont été constitués. Les volatiles du premier ensemble ont pu se nourrir jusqu'à satiété avant de prendre leur envol. Les autres sont partis sans avoir mangé, donc en ayant faim. La question posée était alors la suivante : vont-ils rejoindre leur pigeonnier d'origine, puis se rendre sur le « site alimentaire », ou directement voler vers ce celui-ci ?
Résultats : les oiseaux rassasiés ont volé en direction de leur pigeonnier d'origine, tout en évitant parfois quelques obstacles topographiques. Les pigeons affamés ont pour leur part décollé en direction du site alimentaire. Ils ont eux aussi eu à contourner quelques obstacles, mais ont toujours su reprendre la bonne direction par la suite. Ainsi, les Columba livia voyageurs savent bien déterminer leur position, puis suivre une route pour rejoindre une cible... de leur choix. Ils ont donc une carte de navigation dans la tête, qu'ils exploitent au moyen de leurs capacités cognitives. CQFD !