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Depuis plusieurs années déjà, de nombreux apiculteurs déplorent une diminution marquée de leur cheptel. Le sujet est régulièrement abordé, et plusieurs coupables potentiels ont été identifiés. Parmi eux figurent entre autres les pesticides de la famille des néonicotinoïdes, et leurs effets neurotoxiques avérés, ou des parasites tel le varroa. Si ce fait tracasse, c'est notamment pour une bonne raison : les abeilles domestiques (Apis mellifera)) sont des pollinisatrices.
Ainsi, les abeilles se raréfient par endroit... mais l'agriculture ne s'arrête pas pour autant. D'ailleurs, de plus en plus de cultures nécessitant leurs soins ont vu le jour ces dernières années. Elles ont par exemple été favorisées par la politique européenne qui vise à promouvoir les agrocarburants, et donc à planter des champs de colza ou de tournesoltournesol. Heureusement, les pollinisateurs sauvages tels les bourdons et les syrphides sont à même de remplacer les abeilles pour le moment. Mais que se passera-t-il si eux aussi rencontrent un jour des difficultés ?
Dans ce contexte, des recherches ont été menées sous la direction de Simon Potts de l'université de Reading (Royaume-Uni) pour mieux caractériser cette problématique à l'échelle européenne, mais aussi dans 41 pays se trouvant sur ce continent. Les résultats viennent d'être présentés dans la revue Plos One. Entre 2005 et 2010, les besoins en pollinisation ont augmenté cinq fois plus rapidement que le nombre de colonies d'insectesinsectes disponible. Par conséquent, l'Europe manque cruellement d'abeilles.
Le bourdon terrestre Bombus terrestris appartient à la famille des abeilles, les apidés. Il établit chaque année de nouveaux nids sous terre. Végétarien, cet animal se nourrit exclusivement de pollen et de nectar. Selon une étude récente, il pollinise tout aussi bien les cultures que les abeilles domestiques. © nosha, Flickr, CC by-sa 2.0
Un déficit d'abeilles, y compris en France
Nous ne posséderions que deux tiers des abeilles domestiques requises pour polliniser les cultures, ce qui représente un déficit d'environ 13,4 millions de colonies. La politique européenne en matièrematière d'agrocarburantsagrocarburants, qui pousse au développement de cultures oléagineuses, nous rend donc de plus en plus dépendant des pollinisateurs sauvages. Ce détail qui n'a certainement pas été prévu à l'origine. Il doit cependant être précisé que tous les pays ne sont pas logés à la même enseigne.
Dix neuf contrées disposent d'Apis mellifera en suffisance pour répondre à plus de 90 % aux besoins en pollinisation. Ainsi, il en reste 22 où les abeilles font défaut à des degrés variables. Le Royaume-Uni, l'Allemagne, l'Italie et la France figurent parmi eux. L'Hexagone ne compte par exemple que 25 à 50 % des pollinisateurs domestiques dont il a besoin. La situation est pire encore au Royaume-Uni, où ce nombre est inférieur à 25 %. Seule la Moldavie se trouve en plus mauvaise posture.
Cette étude souligne donc un manque de coordination entre les politiques européennes agricoles et environnementales (des cultures sont par exemple promues, mais pas les habitats des insectes dont elles dépendent). Par ailleurs, comme l'a souligné Simon Potts dans un communiqué : « nous nous dirigeons vers une catastrophe dans les années à venir, sauf si nous agissons dès maintenant. Les pollinisateurs sauvages ont besoin d'une meilleure protection. » Le message va-t-il passer ?