Indispensable en agriculture, pour les travaux publics et la construction, le nitrate d'ammonium est pourtant à l'origine de nombreuses catastrophes dans le monde. Mardi 4 août, les 2.750 tonnes de ce comburant qui ont dévasté Beyrouth, la capitale libanaise, ont de nouveau causé une véritable tragédie.


au sommaire


    Le nitrate d'ammonium à l'origine des explosions de Beyrouth mardi est un sel blanc et inodore utilisé comme base de nombreux engrais azotés sous forme de granulés, et a causé plusieurs accidentsaccidents industriels dont l'explosion de l'usine AZF à Toulouse en 2001. Selon le Premier ministre libanais, environ 2.750 tonnes de nitrate d'ammonium étaient stockées dans l'entrepôt du port de Beyrouth qui a explosé, causant au moins une centaine de morts et 4.000 blessés ainsi que des dégâts sans précédent dans la capitale libanaise.

     L'usine AZF, le 21 septembre 2001, à Toulouse, peu après l'explosion. © Éric Cabanis, AFP
     L'usine AZF, le 21 septembre 2001, à Toulouse, peu après l'explosion. © Éric Cabanis, AFP

    Comment se produit la détonation ? 

    Les nitrates d'ammonium composent les engrais appelés ammonitrates, que les agriculteurs achètent en gros sacs ou en vrac. Ce ne sont pas des produits combustiblescombustibles : ce sont des comburantscomburants, c'est-à-dire qu'ils permettent la combustion d'une autre substance déjà en feufeu. « C'est très difficile de le brûler, dit à l'AFP Jimmie Oxley, professeure de chimiechimie à l'université du Rhode Island, qui a elle même travaillé sur la combustioncombustion du nitrate d'ammonium. Ce n'est pas facile de le faire détoner ».

    La détonation n'est possible qu'avec une contaminationcontamination par une substance incompatible ou une source intense de chaleurchaleur. Et le stockage doit donc suivre des règles pour isoler le nitrate d'ammonium de liquidesliquides inflammables (essence, huiles...), de liquides corrosifs, de solidessolides inflammables ou encore de substances qui dégagent une chaleur importante, parmi d'autres interdits, selon une fiche technique du ministère français de l'Agriculture.

    Une longue liste de drames d'origine accidentelle ou criminelle

    De nombreuses tragédies dans le monde, accidentelles et criminelles, ont comme source le nitrate d'ammonium. L'un des tout premiers accidents fit 561 morts en 1921 à Oppau, en Allemagne, dans une usine BASF. En 1947, la ville de Brest fut secouée par l'explosion du cargo norvégien Ocean Liberty qui transportait la substance.

    En France aussi, empilées en vrac dans un hangar de l'usine chimique AZF, dans la banlieue sud de Toulouse, quelque 300 tonnes de nitrates d'ammonium ont subitement explosé et fait souffler un vent de mort et de désolation sur la quatrième ville de France le 21 septembre 2001 : 31 personnes sont mortes, et la déflagration fut entendue 80 km à la ronde.

    Voir aussi

    L'explosion de l'usine AZF de Toulouse

    Aux États-Unis, une terrible explosion à l'usine d'engrais West Fertilizer, à West, au Texas, fit 15 morts en 2013. Un stock de nitrates d'ammonium a explosé à cause d'un incendie d'origine criminelle ; l'absence de normes de stockage avait été mise en cause par les enquêteurs.

    Le nitrate d'ammonium peut aussi être utilisé dans des engins explosifs. Le 19 avril 1995, Timothy McVeigh avait fait exploser une bombe fabriquée à partir de deux tonnes de l'engrais devant un bâtiment fédéral à Oklahoma City, tuant 168 personnes. Mais la professeure Oxley nuance en rappelant que le nitrate d'ammonium est devenu indispensable à l'agriculture et à la constructionconstruction. « Nous n'aurions pas ce monde moderne sans explosifs, et nous ne pourrions pas nourrir la population actuelle sans les engrais au nitrate d'ammonium, dit-elle. Nous en avons besoin, mais il faut faire vraiment attention à ce qu'on fait avec ».