au sommaire
Inaugurée en 1977, la centrale géothermique de Krafla ne cesse depuis de fournir de l'électricité à la population islandaise, avec une production annuelle de 500 GWh (chiffre de l'opérateur Landsvirkjun)). Pour ce faire, 18 puits récupèrent de l'eau chauffée dans les entrailles de la Terre, qui se transforme partiellement en vapeur lors de sa remontée puis de son cheminement vers les deux turbines de 30 MW du site. Ce succès, tout comme celui d'autres installations semblables actives sur l'île volcanique, n'empêchent pas la recherche d'eau toujours plus chaude, voire même supercritique, puisqu'elle véhicule une plus grande quantité d'énergieénergie exploitable. Ces travaux sont réalisés sous la houlette d'un consortium gouvernemental du nom d'Iceland Deep Drilling Project (IDDP).
En 2009, le premier forage réalisé dans ce cadre a été au centre d'une certaine agitation médiatique. Il avait pour objectif de creuser un puits de 4.500 m de profondeur, afin d'atteindre une poche d'eau supercritique, donc maintenue à une température supérieure à 374 °C et à une pressionpression d'au minimum 22 mégapascals (MPa). Cependant, un étonnant événement est survenu à 2.096 m de profondeur : les contraintes mécaniques s'opposant au trépan ont brusquement chuté. Après analyse, il s'est avéré qu'une poche de magma avait été percée ! Auparavant, un tel événement n'était survenu qu'une fois dans le monde, à Hawaï en 2007.
Détail intéressant, le magma atteint présente une température comprise entre 900 et 1.000 °C, ce qui a attisé l'intérêt des chercheurs. Quatre ans plus tard, une édition complète de la revue Geothermics vient d'être dédiée, sous la direction de Wilfred Elders de l'université de Californie à Riverside (États-Unis), aux retombées scientifiques et industrielles de cette découverte. Selon lui, « le succès de ce forage et des projets de recherche pourraient révolutionner l'efficacité énergétique des zones géothermiques à hautes-températures dans le monde ».
Au premier plan le cratère Viti datant de l'éruption de 1787 avec à l'arrière plan la station de forage située dans la zone de Krafla. © G.O. Fridleifsson-W. Elders, UC Riverside
L’eau surchauffée à 450 °C pour une électricité verte
Que s'est-il passé depuis 2009 ? L'année suivante, les chercheurs ont descendu un dispositif en acieracier au fond du puits, où il a été cimenté à proximité du magma. Cette structure était perforée du côté de la roche en fusionfusion et a été utilisée pour récupérer de l'eau surchauffée par la présence du magma (température supérieure à 374 °C, mais pression inférieure à 22 MPa). En surface, la vapeur a alors alimenté les turbines de la centrale de Krafla durant deux ans, jusqu'en juillet 2012.
À cette occasion, un record du monde a même été battu. Cette première installation géothermique profitant au plus près de la chaleurchaleur générée par le magma a fonctionné avec de l'eau chauffée à plus de 440 °C (enthalpieenthalpie de 3.200 kJ/kgkg). Le puits n'a toujours pas été rouvert depuis juillet 2012, car des installations de surface en lien avec son exploitation nécessitent des réparations. Selon Wilfred Elders, le personnel du site aurait rencontré quelques revers, comme la corrosion accélérée de certains équipements à cause du chlorure d'hydrogènechlorure d'hydrogène présent dans la vapeur (90 mg/kg). Cependant, le géologuegéologue émérite a précisé que ces problèmes avaient été très instructifs et que des rapports sur les leçons à retenir sur leur existence étaient en cours de rédaction.
À l'avenir, un nouveau forage devant atteindre de l'eau supercritique est prévu pour 2014-2015. Une fois encore, il sera réalisé dans le cadre de l'IDDP, mais dans le sud-ouest de l'Islande, à Reykjanes. Quoi qu'il en soit, les tests faits à Krafla démontrent que l'on peut forer dans une poche magmatique tout en contrôlant la situation, puis tirer profit de la lavelave en fusion pour produire une énergie renouvelable avec efficacité. Krafla pourrait marquer une nouvelle ère dans l'exploitation des ressources géothermiques dans le monde.