Une première analyse des anomalies de performances des réseaux Wi-Fi(1) a été réalisée par quatre chercheurs de l'unité Logiciels Systèmes Réseaux de l'Institut d'Informatique et de Mathématiques Appliquées de Grenoble (IMAG) du CNRS. Martin Heusse, Franck Rousseau, Gilles Berger-Sabbatel, et Andrzej Duda viennent de publier les résultats surprenants de leur étude, à l'occasion de la conférence INFOCOM de San Francisco, une des plus prestigieuses dans le domaine de la recherche en réseaux. Elle révèle que dans certaines circonstances très banales, ce type de réseau sans fil présente une anomalie de performances relativement pénalisante : les utilisateurs pouvant disposer d'une meilleure connectivité, et donc d'un meilleur débit, sont pénalisés par ceux disposant de conditions dégradées.

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    Anomalies dans les performances des réseaux Wi-Fi

    Anomalies dans les performances des réseaux Wi-Fi

    Les réseaux locaux sans fil basés sur la norme Wi-Fi (IEEE 802.11b) commencent à être déployés de manière relativement large et de nombreux modèles d'ordinateurs portables sont désormais pré-équipés d'une carte réseau de ce type. Les expériences visant à fournir la connectivité dans les lieux publics, par l'intermédiaire de ce que l'on nomme des hot spotshot spots(2), sont de plus en plus nombreuses. Le nombre d'utilisateurs potentiels est en forte croissance, et les premières expériences hot spots bien avancées. Mais les réseaux Wi-Fi peuvent-ils résister à la charge du nombre d'utilisateurs et du débit demandé ?

    Dans leur mode de fonctionnement classique, les réseaux de type Wi-Fi reposent sur une infrastructure filaire fixe. Des points d'accès sans fil sont reliés à un réseau localréseau local à haut débit, le plus souvent de type Ethernet, et effectuent la liaison entre les équipements connectés par réseau sans fil et le réseau local filaire puis Internet. Les cartes réseau sans fil disposent de quatre niveaux de débit différents correspondant, en réalité, à différentes techniques de modulationmodulation du signal qui seront sélectionnées en fonction de la qualité de la connexion au point d'accès. Plus simplement, un équipement près d'un point d'accès dispose d'un bon débit, nominalement 11 mégabits par seconde (Mbits/s.), puis, lorsqu'il s'éloigne, celui-ci passe à 5,5 Mbit/s., 2 Mbit/s., et finalement 1 Mbits/s. à mesure que le signal s'affaiblit et se dégrade.

    Voici ce qui peut se produire sur les réseaux Wi-Fi : quelques utilisateurs disposent potentiellement du meilleur débit dans la zone de couverture d'un point d'accès soit 11 Mbit/s. car ils en sont proches. Un utilisateur entre dans cette zone de couverture et, se situant relativement loin, est donc connecté à 1 Mbit/s. Lorsque ce dernier utilisera le canal sans fil pour communiquer, c'est à dire qu'il transmettra des données, cette activité provoquera une chute de débit pour tous les autres, ramenant ceux-ci à un débit apparent identique au sien, soit 1 Mbit/s. Ce même type d'observation est valable quelles que soient les valeurs parmi les quatre citées plus haut, le plus faible débit sera observé par tous les hôteshôtes.

    Cette anomalieanomalie, inhérente au protocole dprotocole d'accès CSMA/CA (Carrier Sense Multiple AccessMultiple Access/ Collision Avoidance) défini dans la norme Wi-Fi et révélée par l'équipe de recherche du CNRS est pénalisante pour les utilisateurs du réseau. Malgré une bonne connexion, leurs performances apparentes peuvent se trouver fortement dégradées à leur insu et de manière totalement imprévisible, du simple fait de l'activité d'un hôte tiers moins bien connecté vers le même point d'accès sans fil.

    Toutefois, bien qu'étant parfaitement observable sur n'importe quel réseau de ce type, l'impact de cette anomalie doit être quelque peu tempéré pour deux raisons. Premièrement par le fait qu'aujourd'hui la plupart des équipements connectés au réseau l'utilisent de manière sporadique et non continue : les périodes d'activité, comme le téléchargement d'une page web, sont relativement courtes par rapport au temps mis pour la lire ; par contre, si une communication de longue duréedurée est en cours - téléchargement, connexion audio et vidéo par exemple - elle pénalisera de manière continue les utilisateurs. Un second facteur atténuant vient des protocoles de niveaux supérieurs, principalement TCP(3) dont les mécanismes internes ont un effet de régulation sur les débits observés.

    Les chercheurs travaillent actuellement à rechercher des solutions afin de limiter ou supprimer cette anomalie, qui pourrait se révéler très pénalisante avec le développement des nouvelles applicationsapplications de communication, notamment audio et vidéo sur Internet.

    Notes :

    (1) Wi-Fi (Wireless Fidelity) est une nouvelle technologie de réseaux locaux sans fil.
    (2) Endroits où l'accès sans fil est fourni : gares, cafés, hôtels...
    (3) TCP : Transmission Control Protocol