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    Les découvertes archéologiques sont d'abord, le plus souvent, le fruit du hasard. Ce n'est qu'ensuite qu'il est possible de mettre en œuvre un peu d'ordre et de rationalité. Les techniques et les procédures scientifiques ne sont employées que bien après... Il en est ainsi pour Bornéo.

    Bornéo est la troisième île du monde par sa superficie. Une succession de hasards fit apparaître l'espace indonésien de cette île (partie sud-est) comme étant vierge de toute investigation archéologique.

    Bornéo est l'île des découvertes archéologiques. Ici, l'entrée d'une grotte. © Starlightchild, CC by-sa 3.0
    Bornéo est l'île des découvertes archéologiques. Ici, l'entrée d'une grotte. © Starlightchild, CC by-sa 3.0

    La cavité de Liang Kaung

    D'abord, lors d'une traversée pédestre organisée en 1988 par une équipe de spéléologues, L. H. Fage, également photographe-documentariste et amateur d'archéologie, observa plus particulièrement une cavité appelée Liang Kaung, dont un plafond présentait des dessins au charboncharbon de boisbois. Il mit dès lors tout en œuvre pour se documenter, y revenir et pouvoir tourner un documentaire de vulgarisation scientifique.

    Ensuite, c'est notre rencontre imprévisible, à partir d'un article que j'avais publié dans une revue de vulgarisation scientifique en 1992, portant sur le peuplement de l'Océanie. Une carte y montrait très synthétiquement le parcours supposé des Austronésiens depuis l'Asie du Sud-Est jusqu'à l'île de Pâques. Traversant encore plus schématiquement de part en part l'île de Bornéo, il pointait en apparence l'emplacement de Liang Kaung !

    Dès lors, ce n'est que grâce à l'invitation de L. H. Fage à participer à son expédition, à notre entente et notre collaboration complémentaire que toutes les découvertes et les travaux scientifiques fructueux qui en ont découlé jusqu'à ce jour purent être impulsés.

    Carte de localisation générale des sites.
    Carte de localisation générale des sites.

    L'invitation de L. H. Fage à faire une visite d'évaluation dans cette cavité, située en plein cœur de Bornéo (voir la carte ci-dessus) me permit de dégager à proximité quelques éclats de débitage en silex, mais surtout d'y découvrir les fragments d'une céramiquecéramique posée sur un lit de charbons qui sera ensuite datée de 3.000 ans.

    Ce résultat, ajouté au fait que cet immense territoire grand comme la France était resté vierge de toute investigation archéologique antérieure (une exception inimaginable auparavant), fournissait les motivations nécessaires pour élaborer un programme de recherche et d'investigations extensives.

    La forêt de Bornéo et les monts Müller

    Ce programme devant se dérouler dans une zone vierge de toute investigation antérieure, il devait être spécifique, mais néanmoins adapté, aux contingences environnementales exceptionnelles de la forêt tropicale ainsi qu'aux possibilités matérielles d'accès à des falaises immenses. Nous avons donc d'abord utilisé quelques repérages antérieurs effectués par des équipes franco-indonésiennes de spéléologues.

    Vue d'avion du karst de Marang. © DR
    Vue d'avion du karst de Marang. © DR

    Les cavités étant situées dans des massifs de karsts à cônescônes au relief démesuré (image ci-dessus) et naturellement riches en grottes et en abris-sous-roche, on eut recours à toutes les compétences techniques particulières de la spéléologiespéléologie de L. H. Fage. Rapidement, les découvertes faites successivement, à partir des deux versants de la chaîne centrale des monts Müller, ainsi qu'à l'extrémité orientale de Bornéo, confirmèrent une occupation effective de nombreuses cavités, s'étendant du centre de l'île à ses rivages les plus orientaux (voir la carte ci-dessus).

    Cette phase a permis d'évaluer la richesse archéologique potentielle de cette zone et de la mettre en corrélation avec les quelques sites des pays limitrophes, et déjà partiellement connus, de l'Asie du Sud-Est insulaire (provinces de Malaisie orientale, îles de Palawan et de Sulawesi notamment).