Grâce à l'ExoMars Trace Gas Orbiter, une équipe de scientifiques européens a réussi à détecter la raie verte de l'oxygène dans le spectre de l'atmosphère martienne. C'est la première fois que cette lueur est observée autour d'une autre planète que la Terre.


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    Sur Terre, l'oxygène de l'atmosphèreatmosphère peut produire une lueur verte qui peut s'observer lors d'aurores polaires. Ces aurores se produisent lorsque des électrons énergétiques de l'espace interplanétaire frappent la haute atmosphère. Cependant, cette lumière verte peut également être produite par d'autres phénomènes, de jour comme de nuit. La lueur nocturne est produite par la recombinaison de moléculesmolécules « cassées » alors que la lueur diurnediurne est le résultat de l'excitation d'atomesatomes et molécules atmosphériques (oxygène, azoteazote...) par la lumière du SoleilSoleil.

    Ces phénomènes ne sont cependant pas spécifiques à la Planète bleue. Sa voisine, Mars, nous a montré elle aussi cette lueur caractéristique de l'oxygène dans son atmosphère, une première autour d'une autre planète que la Terre. L'atmosphère martienne est essentiellement constituée de dioxyde de carbonedioxyde de carbone (95,3 %), avec une petite part de diazote (2,6 %) et d'argonargon (1,9 %) ainsi que des traces d'autres composés dont le dioxygène, qui arrive en quatrième position avec environ 0,17 %. « L'existence de cette émissionémission sur Mars a été prédite il y a environ 40 ans, et grâce à TGO, nous l'avons trouvée », se réjouit l'astronomeastronome belge Jean-Claude Gérard, professeur à l'université de Liège, en Belgique, et auteur principal de la nouvelle étude publiée le 15 juin dans Nature Astronomy.

    Comparaison entre l'émission diurne mesurée par l'<em>ExoMars Trace Gas Orbiter</em> (en vert) et le modèle correspondant (en rouge). © J.-C. Gérard et al. (2020)
    Comparaison entre l'émission diurne mesurée par l'ExoMars Trace Gas Orbiter (en vert) et le modèle correspondant (en rouge). © J.-C. Gérard et al. (2020)

    ExoMars Trace Gas Orbiter regarde Mars de côté

    TGO, c'est l'ExoMars Trace Gas Orbiter, une sonde de l'Agence spatiale européenneAgence spatiale européenne en orbiteorbite autour de Mars depuis octobre 2016. Sur Terre, cette lueur verte est plus facilement visible « de côté », comme on peut le voir sur certaines photos prises depuis la Station spatiale internationaleStation spatiale internationale (ISS). La faible luminositéluminosité de cette lueur rend cependant difficile sa détection autour d'autres planètes, en raison de la luminosité propre de la planète. Pour ce faire, l'équipe de scientifiques a utilisé la suite d'instruments Nomad de TGO et, en particulier, l'instrument Uvis.

    Nomad peut observer dans différentes configurations, dont une qui pointe les instruments directement vers la surface de Mars, ce qui est appelé le canal « nadir ». Cependant, pour tenter d'observer cette lueur verte, l'équipe de scientifiques a décidé de réorienter le canal nadirnadir d'Uvis pour pointer vers le « bord » de Mars. Ils ont alors utilisé cet instrument entre le 24 avril et le 1er décembre 2019 pour balayer des altitudes allant de 20 à 400 kilomètres de la surface martienne deux fois par orbite. Lorsqu'ils ont analysé ces jeux de données, ils ont trouvé l'émission verte de l'oxygène dans chacun d'eux, avec un maximum autour de 80 kilomètres et une variation en fonction de la distance entre Mars et le Soleil.

    Évolution avec l'altitude de l'émission de l'oxygène dans le limbe diurne avec l'instrument Nomad/Uvis de la sonde <em>ExoMars Trace Gras Orbiter</em>. © J.-C. Gérard et al. (2020)
    Évolution avec l'altitude de l'émission de l'oxygène dans le limbe diurne avec l'instrument Nomad/Uvis de la sonde ExoMars Trace Gras Orbiter. © J.-C. Gérard et al. (2020)

    Jean-Claude Gérard et ses collègues ont modélisé cette émission et ont constaté qu'elle provient principalement de la décomposition du dioxyde de carbone en monoxyde de carbonemonoxyde de carbone et oxygène. Les chercheurs ont pu voir les atomes d'oxygène produits briller à la fois en lumière visible (la raie verte à 557,7 nanomètresnanomètres) et ultraviolette (raie à 297,2 nanomètres) et, en les comparant, ils ont pu montrer que l'émission visible était 16,5 fois plus intense que l'émission ultraviolette.

    Jean-Claude Gérard explique que ces « observations sur Mars sont en accord avec les modèles théoriques précédents, mais pas avec le rayonnement réel que nous avons repéré autour de la Terre, où l'émission visible est beaucoup plus faible. Cela suggère que nous avons plus à apprendre sur le comportement des atomes d'oxygène, ce qui est extrêmement important pour notre compréhension des physiquesphysiques atomique et quantique ».

    Comprendre les propriétés de l'atmosphère de Mars est non seulement intéressant sur le plan scientifique mais également essentiel pour mener à bien les missions que nous envoyons sur la Planète rouge.