Halloween oblige, peut-être avez-vous enfourché votre balai et mis votre plus beau chapeau pointu le 31 octobre dernier, sans vous poser plus de questions. Pourtant, connaissez-vous l'origine de l'attirail de la parfaite sorcière, si ancré dans l'imaginaire collectif ? La réponse, fascinante, est à découvrir au Pays Basque, entre croyances populaires, légendes et chasse aux sorcières...


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    L'image d'Épinal de la sorcière au neznez crochu perchée sur un balai a mis des siècles à se construire, et fait aujourd'hui partie intégrante d'un imaginaire collectif qui doit beaucoup à... la mythologie basque ! Ce peuple, rétif à la royauté et christianisé seulement depuis le XIe siècle, a longtemps gardé ses rituels et traditions, au point de s'attirer les foudresfoudres du tribunal laïque d'Henri IV et de l'Inquisition espagnole

    Du balai au chaudron, en passant par la grenouille

    Les traditions en question confinent à la légende et se sont surtout répandues via les rapports des procès de l'époque et les écrits d'un juge : Pierre de Lancre. Y sont ainsi évoqués des rites mêlant croyances basques et chrétiennes célébrés dans des Akelarre, lieux où des assemblées se réunissaient pour danser, chanter et consommer des substances hallucinogènes. Souvent toxiques, celles-ci étaient, dit-on, enduites sur des branches ou des balais avant d'être appliquées sur les muqueusesmuqueuses par voie rectale ou vaginale... d'où la légende de la sorcière sur son balai. Les sorcières basques, proches des crapauds, auraient même préparé leurs potions dans des chaudrons !

    Depuis 2020, le guide basque Julien Gaüzère propose la « marche aux sorcières », une randonnée transfrontalière de huit kilomètres entre les grottes de Sare et le village de Zugarramurdi. © Asmus Koefoed, Adobe Stock
    Depuis 2020, le guide basque Julien Gaüzère propose la « marche aux sorcières », une randonnée transfrontalière de huit kilomètres entre les grottes de Sare et le village de Zugarramurdi. © Asmus Koefoed, Adobe Stock

    Derrière le mythe : des femmes persécutées

    Si ces textes ont permis de construire le mythe de la sorcière populaire que l'on connaît, ils cachent une réalité beaucoup plus sombre : celle de la persécution des Basques à la Renaissance. En cause : la langue, bien sûr, une des plus vieilles d'Europe dont les origines demeurent obscures, et que l'on a attribuées au Diable lui-même. La liberté des femmes, ensuite : souvent livrées à elles-mêmes tandis que leurs époux partaient en mer, elles participaient aux Biltzar, des assemblées démocratiques locales dont la noblesse et le clergé étaient exclus, et votaient les décisions du village.

    Des pratiques très éloignées du reste de l'Europe de l'époque. Afin de soumettre les Basques, une gigantesque chasse aux sorcières est alors lancée. Menée par le fameux Pierre de Lancre, elle ne durera que quatre mois, entre fin juin et début octobre 1609, mais marque profondément le peuple. Le Pays basque s'est aujourd'hui réapproprié cet épisode de son histoire longtemps délaissé, et propose aux curieux des visites de lieux emblématiques, sur les pas des premières sorcières.