Au Salon du Bourget, EADS dévoile l'E-Fan, un concept d’avion de tourisme électrique qui préfigure peut-être une future génération. Rencontre avec Emmanuel Joubert, le responsable propulsion de la branche des concepts avancés chez EADS.

au sommaire


    Sur ce même salon, il y a deux ans, EADSEADS présentait une version électrique du Cri-Cri, un minuscule bimoteur monoplace, conçu par Michel Colomban au début des années 1970 et doté de deux moteurs de petite cylindrée. Sur les deux nacelles, EADS avait installé non pas deux mais quatre moteurs électriques, tandis qu'une autre nouvelle version du Cri-Cri, le E-Cristalline, piloté par Hugues Duval, battait un record de vitesse avec deux moteurs électriques.

    Si le quadrimoteur miniature d'EADS a aujourd'hui rejoint le musée des concepts avancés d'EADS, son développement n'a pas été inutile. Bien au contraire. Il a servi de base au développement de l'E-Fan un démonstrateurdémonstrateur électrique d'avion-école biplace, « autrement plus ambitieux que le Cri-Cri », explique Emmanuel Joubert à Futura-Sciences.

    Le Cri-Cri électrique présenté par EADS au Salon du Bourget 2011. Cet appareil très léger a été équipé de moteurs électriques à diverses reprises. Le modèle d'EADS porte quatre moteurs : c'est le plus petit quadrimoteur du monde. Construit à un unique exemplaire, il est d'abord un moyen d'étudier cette motorisation. © EADS

    Le Cri-Cri électrique présenté par EADS au Salon du Bourget 2011. Cet appareil très léger a été équipé de moteurs électriques à diverses reprises. Le modèle d'EADS porte quatre moteurs : c'est le plus petit quadrimoteur du monde. Construit à un unique exemplaire, il est d'abord un moyen d'étudier cette motorisation. © EADS

    Un laboratoire pour étudier les avions du futur

    C'est la première fois qu'un avion est conçu autour d'une motorisation électrique. Jusque-là, en effet, à l'exception notable de l'avion solaire de Solar Impulse, la démarche est de remplacer le moteur thermiquemoteur thermique sur un avion existant, comme c'est le cas pour le SportStar Epos. La faible puissance disponible a conduit à donner à l'E-Fan des formes très aérodynamiques, qui le font quelque peu ressembler à un avion de chasse. Le but principal de ce programme est vraiment la « réduction des émissions et du bruit » et de parvenir à construire, à très long terme, un avion de ligne 100 % électrique. « C'est une première brique concrète dans l'aviation du futur. »

    L'E-Fan est développé par EADS Innovation Works en coopération avec Aero Composite Saintonge, les régions Poitou-Charentes et Aquitaine, et avec le soutien technique de la DGAC. À la différence du petit Cri-Cri monoplace, l'E-Fan accueille deux personnes, installées en tandem (c'est-à-dire l'une derrière l'autre). Entièrement réalisé en carbone, il est mû par deux moteurs et pèse seulement 550 kgkg, pour 6,70 m de longueur et 9,50 m d'envergure. Administrativement, il entre dans la nouvelle catégorie d'avions légers LSA (Light Sport Aircraft). Pour l'instant, il n'a fait que rouler. Le premier vol d'essai est prévu en septembre.

    Une des originalités de l'E-Fan : les deux moteurs électriques entraînent les roues. On évite ainsi d'utiliser les hélices pour le roulage, un moyen commode mais qui consomme davantage. © Remy Decourt, Futura-Sciences

    Une des originalités de l'E-Fan : les deux moteurs électriques entraînent les roues. On évite ainsi d'utiliser les hélices pour le roulage, un moyen commode mais qui consomme davantage. © Remy Decourt, Futura-Sciences

    Les moteurs font tourner les roues de l'E-Fan

    Le roulage est déjà original car les hélices sont arrêtées : les moteurs électriques font directement tourner les roues et peuvent amener l'appareil jusqu'à la piste de décollage, à une vitesse maximale de 60 km/h. Cette solution pourrait être appliquée aux gros porteurs, puisqu'un Airbus A320 fait tous les jours au Salon du Bourget la démonstration d'un équipement expérimental de ce genre, conçu par le Français SafranSafran et l'Américain Honeywell. Ses deux batteries, « une pour chaque moteur », sont fixées sous les ailes et se rechargent en une heure. D'un poids de 6,7 kg, elles fournissent une puissance de 30 kilowatts (conduisant à une poussée de 1,5 kilonewton), « un très bon rapport poids/puissance ». Résultat, l'avion peut atteindre « une vitesse de pointe de 220 km/h et 160 en croisière avec une autonomieautonomie de 45 minutes ». 

    Comme tous les avions électriques actuels, l'engin ne peut donc aller bien loin mais Emmanuel Joubert estime que « cela correspond à un besoin réel de faire des tours de piste pour les avion-écoles ». L'idée est de le commercialiser d'ici quatre ans au prix de 150.000 euros et d'en vendre « de 10 à 100 exemplaires », souligne Jean Botti, directeur de la technologie d'EADS. Cet E-Fan à deux places n'est qu'une étape. Le développement devrait se poursuivre pour amener à la mise au point d'un démonstrateur à quatre places.