L’incaprettamento, cette méthode d’homicide brutale pratiquée par la mafia italienne qui consiste à étrangler une victime sous son propre poids, aurait déjà été pratiquée il y a 6 000 ans dans les communautés néolithiques européennes. C’est ce que révèle la découverte d’une étrange tombe dans la vallée du Rhône.


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    C'est à Saint-Paul-Trois-Châteaux, dans la vallée du Rhône en France, que des archéologues ont fait une étonnante, et plutôt macabre, découverte qui nous renseigne néanmoins sur les pratiques sacrificielles au Néolithique. Trois squelettes de femmes ont en effet été découverts au fond d'une fosse, sur un site présentant d'autres silos dont certains étaient vraisemblablement utilisés pour le stockage de denrées alimentaires. Si l'emplacement de la « tombe » est déjà étrange, la position des corps a immédiatement intrigué les scientifiques, les laissant penser qu'il ne s'agissait pas là d'une sépulturesépulture classique.

    Deux corps de femmes dans une position qui suppose l’auto-strangulation

    Alors que l'une des femmes semble dans une position mortuaire « conventionnelle » pour l'époque, sur le côté avec les jambes pliées, les deux autres présentent d'étranges postures. L'une est sur le dosdos, l'autre sur le ventre. L'angle de leurs jambes repliées suggère que leurs chevilleschevilles ont été ligotées et reliées par une corde à leur cou. Une grosse pierre a été placée sur le dos de celle positionnée sur le ventre, certainement pour l'empêcher de bouger. Sa tête repose sur le thoraxthorax de celle positionnée sur le dos.

    Les trois corps de femmes retrouvés dans un silo sur le site de Saint-Paul-Trois-Châteaux, en France. Si l'une présente une posture d'inhumation classique (1), la posture des deux autres suggère qu'elles sont mortes par auto-strangulation. © Ludes et al. 2024, <em>Science Advances</em>
    Les trois corps de femmes retrouvés dans un silo sur le site de Saint-Paul-Trois-Châteaux, en France. Si l'une présente une posture d'inhumation classique (1), la posture des deux autres suggère qu'elles sont mortes par auto-strangulation. © Ludes et al. 2024, Science Advances

    Une scène qui suggère que ces deux femmes sont mortes par strangulation, suivant la méthode dite de l'incaprettamento, qui consiste à ligaturer les chevilles au cou pour que le supplicié s'étrangle lui-même. Une forme rituelle d'homicide bien connue chez... la mafia italienne !

    Méthode de l<em>'incaprettamento</em> entraînant la mort par auto-strangulation. © Ludes et al. 2024, Science Advances
    Méthode de l'incaprettamento entraînant la mort par auto-strangulation. © Ludes et al. 2024, Science Advances

    Un rituel sacrificiel dans un contexte de développement de l’agriculture

    L'étude publiée dans la revue Science Advances révèle que les organisations criminelles n'ont donc rien inventé et que cette pratique macabre était déjà d'usage au début du Néolithique, il y a environ 6 000 ans en Europe. De plus amples recherches ont d'ailleurs montré que le cas de Saint-Paul-Trois-Châteaux n'est pas unique. En tout, 20 autres cas de morts similaires ont été identifiés dans toute l'Europe.

    Pour les chercheurs, plusieurs indices suggèrent qu'il pourrait s'agir d’un rituel sacrificiel associé à l'agricultureagriculture. Le silo où ont été retrouvés les corps ressemble en effet à ceux utilisés pour stocker les denrées alimentaires. Il a été creusé parmi d'autres au sein d'un site aligné sur la direction des solstices d’hiver et de d’été, qui symbolisent le cycle des cultures dans les populations néolithiques.