« Manger le matin comme un roi, déjeuner comme un prince et dîner comme un pauvre », énonce le diction populaire. Le premier repas de la journée permettrait en effet de brûler plus de calories, de prévenir l’obésité ou de lutter contre le diabète. Ces études sont-elles fiables ? Faut-il absolument s’obliger à manger le matin lorsqu’on n’a pas faim ?


au sommaire


    Plus de deux adultes français sur 10 sautent le petit déjeuner au moins une fois par semaine, une proportion qui a doublé en dix ans, selon le Crédoc, le Centre de recherche pour l'étude et l'observation des conditions de vie. C'est même le cas pour 29 % des 3-14 ans. Pourtant, d'innombrables études montrent les bénéfices du petit déjeuner sur la santé. Des chercheurs ont, par exemple, démontré que sauter le petit déjeuner multiplie par 4,5 le risque d'être en surpoids. Une autre étude de 2019 affirme que les personnes ne prenant jamais de petit déjeuner ont un risque de mortalité par incident cardiovasculaire supérieur de 87 %, et de mortalité toutes causes confondues 19 % plus élevé par rapport aux personnes qui mangent tous les matins. Une méta-analyse conduite en 2019 révèle de son côté que manquer le petit déjeuner accroît de 33 % les risques de développer un diabète de type 2.

    Pourquoi le petit déjeuner est bénéfique pour la santé

    Plusieurs explications peuvent être avancées pour expliquer ces effets :

    • sauter un petit déjeuner favorise le grignotage et des repas plus caloriques le midi et le soir pour compenser ;
    • plus le temps de jeûne est long, plus la concentration de ghréline (l'hormone qui régule l'appétit) augmente et plus celle d'insuline diminue, ce qui pourrait induire la faim et la prise de nourriture ;
    • le petit déjeuner contribue à augmenter la variété des nutrimentsnutriments dans l'alimentation ; il a par exemple été montré que les enfants qui mangent le matin absorbent plus de fibres ;
    • l'omission du petit déjeuner est souvent liée à des régimes restrictifs qui mettent l'organisme sur un mode d'économie d'énergieénergie amenant le corps à davantage « stocker » ;
    • les enfants et les adolescents qui sautent le petit déjeuner sont également moins actifs physiquement.
    L’absence de petit déjeuner est lié à un plus fort risque d’obésité et de diabète. Mais pourquoi ? © MK studio, Fotolia
    L’absence de petit déjeuner est lié à un plus fort risque d’obésité et de diabète. Mais pourquoi ? © MK studio, Fotolia

    Toutefois, les conclusions sont majoritairement basées sur des études d'observation réalisées auprès d'échantillons de personnes sans groupe témoin. Dès lors, comment savoir si les bénéfices supposés sont attribuables au petit déjeuner lui-même ou au fait que les personnes qui mangent un petit déjeuner ont un mode de vie plus sain ?

    Le saviez-vous ?

    D’où vient le mythe du petit déjeuner bon pour la santé ? Le mythe du petit déjeuner comme « repas le plus important de la journée » a été imposé en grande partie par le chirurgien américain Kellogg, l’inventeur des corn-flakes et fondateur de la Kellogg Company, qui a promu le petit déjeuner comme repas sain – il pensait d’ailleurs que les céréales aidaient à réduire la libido. La croyance a aussi servi à alimenter les ventes de nombreux produits comme le café, le jus d’orange, ou le bacon dans les pays anglo-saxons.

    Manger le matin augmente l’apport alimentaire global

    Une étude randomiséeétude randomisée de l’Université de Bath, en Grande-Bretagne, montre que les personnes prenant un copieux petit déjeuner (au moins 700 kcal avant 11 h) ne brûlent pas plus de caloriescalories que le groupe jeûnant jusqu'à midi. De plus, le groupe ayant sauté le petit déjeuner ne se « rattrape » pas totalement dans le reste de la journée, ce qui signifie qu'au final, ils absorbent 539 calories de moins durant la journée. En revanche, les consommateurs de petit déjeuner ont une activité physiquephysique supérieure et dépensent par conséquent 440 kcal de plus par jour. Il est également faux de penser que l'on brûle plus de calories le matin, c'est même l'inverse d'après une étude parue en 2018 dans la revue Current Biology : c'est autour de 5 heures de l'après-midi que le corps dépense le maximum d'énergie.

    Le groupe qui ne mange pas de petit déjeuner absorbe en moyenne 539 calories de moins dans la journée que ceux qui prennent un petit déjeuner. Leur métabolisme est identique mais ils font moins d’activité physique. <i>© </i>Céline Deluzarche, Futura, d’après James A Betts,<i> The American Journal of Clinical Nutrition</i>, 2014
    Le groupe qui ne mange pas de petit déjeuner absorbe en moyenne 539 calories de moins dans la journée que ceux qui prennent un petit déjeuner. Leur métabolisme est identique mais ils font moins d’activité physique. © Céline Deluzarche, Futura, d’après James A Betts, The American Journal of Clinical Nutrition, 2014

    Sauter le petit déjeuner : cause ou conséquence de l’obésité ?

    De même, le fait que les obèses mangent moins au petit déjeuner n'est pas la cause de leur obésité mais la conséquence. « C'est parce que l'on est en surcharge pondérale qu'on va avoir tendance à avoir moins faim le matin et donc à moins manger, explique Patrick Tounian, chef du service de nutrition et gastroentérologie pédiatrique de l'hôpital Armand-Trousseau à Paris. Pour résumer, sauter le petit déjeuner n'a jamais rendu qui que ce soit obèse, mais s'obliger à prendre un petit déjeuner peut être un moyen pour se restreindre lorsqu'on essaye de maigrir. » Les personnes ayant un poids normal ne doivent en revanche pas se contraindre.