L'accès aux traitements antirétroviraux des personnes vivant avec le VIH dans les pays du Sud constitue une priorité sanitaire mondiale. Une des stratégies adoptées consiste à utiliser des combinaisons d'antirétroviraux génériques à doses fixes, qui associent trois médicaments de deux classes différentes dans un même comprimé. Mais ces combinaisons, n'ayant fait l'objet d'aucune évaluation complète, suscitent des interrogations quant à leur efficacité et leur innocuité. Des chercheurs de l'IRD, en collaboration avec d'autres organismes et avec le soutien de l'ANRS, viennent de démontrer, à l'issue d'un essai clinique mené au Cameroun, que l'une des combinaisons les plus répandues actuellement en Afrique, associant la névirapine, la stavudine et la lamivudine, satisfait à ces critères. L'ensemble des résultats, publiés et commentés dans la revue The Lancet, confirme que cette trithérapie générique peut être utilisée en traitement de première intention dans les pays en développement.

au sommaire


    Sida : trithérapie générique en un comprimé testée avec succès au Cameroun

    Sida : trithérapie générique en un comprimé testée avec succès au Cameroun

    L'objectif de l'OMS est de permettre à 3 millions de personnes vivant avec le VIH d'accéder aux traitements antirétroviraux d'ici 2005. Le développement de thérapies génériques combinées et à doses fixes, simples et bon marché, apparaît la solution la plus adaptée pour favoriser cet accès aux traitements dans les pays en développement, aux faibles ressources.
    Les trithérapies associant deux classes différentes d'antirétroviraux (deux inhibiteurs nucléosidiques de la transcriptase inverse et un inhibiteur non nucléosidique de cette même enzymeenzyme virale), utilisées en traitement de première intention, sont efficaces et bien tolérées. Leur forme combinée en un seul comprimé, développée par les firmes de médicaments génériques, favorise une meilleure compliance au traitement et simplifie la gestion des commandes et du stockage des médicaments. En raison de leur coût très inférieur à celui des trithérapies de médicaments brevetés, ces formes combinées génériques offrent la possibilité de soigner un nombre plus élevé de personnes infectées par le VIH. Cependant, bien que pré-qualifiées par l'OMS et disponibles dans de nombreux pays en développement, elles ne sont actuellement pas reconnues par certaines agences d'aide internationales impliquées dans les programmes d'accès aux antirétroviraux. La principale raison invoquée est l'absence d'études cliniquesétudes cliniques complètes permettant d'attester de leur efficacité, de leur innocuité et de leur qualité.

    Des chercheurs de l'IRDIRD et leurs partenaires viennent de démontrer, à travers un essai clinique réalisé au Cameroun, que la trithérapie antirétrovirale générique à doses fixes actuellement la plus répandue dans les pays d'Afrique, satisfait à ces critères. Ce traitement associe une dose de névirapine, une de stavudine et une autre de lamivudine dans un seul comprimé.


    Sida : une trithérapie générique en un comprimé unique (©IRD/Dargouge, Olivier)

    L'essai a été réalisé à la faveur d'un projet pilote d'accès aux médicaments antirétroviraux initié à Yaoundé, la capitale du Cameroun. Pendant six mois, 60 adultes infectés par le VIH-1VIH-1 ont été traités à raison d'un comprimé deux fois par jour, dans deux hôpitaux de la ville. Le suivi clinique et biologique de ces personnes infectées a permis d'analyser l'évolution de leur état de santé et d'évaluer l'efficacité, la tolérance et la compliance au traitement. L'apparition de résistancerésistance ainsi que la qualité des différents lots de médicaments administrés dans le cadre de l'essai ont également été étudiées.

    Au terme de six mois de traitement, la charge viralecharge virale de 80 % des patients était indétectable (inférieure à 400 copies/ml). Le taux de lymphocyteslymphocytes T CD4 avait augmenté de 83 cellules/µl, signe d'une restauration immunitaire satisfaisante. Le traitement appliqué s'est ainsi révélé aussi efficace que les trithérapies conventionnelles. D'après le témoignage des patients, les prises de médicaments ont été respectées dans 99 % des cas. Cette très bonne compliance au traitement a été confirmée par la mesure régulière des concentrations sanguines de chacun des trois antirétroviraux. Sur les 60 personnes de l'étude, un seul cas d'intolérance a été relevé, nécessitant une modification du traitement. Les chercheurs ont par ailleurs observé deux cas de résistance, l'un chez une personne n'ayant pas suivi correctement son traitement, l'autre chez une femme ayant reçu, avant le début de l'essai, de la névirapine en préventionprévention de la transmission mère-enfant du VIH.
    Parallèlement, l'analyse de plusieurs comprimés de chacune des sept boîtes de médicaments génériques distribuées aux patients de l'essai, a permis de vérifier que ces comprimés contenaient effectivement les principes actifsprincipes actifs pour lesquels ils étaient commercialisés, dans les doses attendues.

    Ces résultats démontrent que la trithérapie générique à doses fixes étudiée est à la fois efficace, bien tolérée et de qualité. Ils apportent des arguments en faveur de son utilisation comme traitement de première intention dans les pays en développement.

    L'étude se poursuit actuellement pour confirmer, sur le long terme, les résultats obtenus. Ceux-ci font l'objet d'une publication commentée dans la revue The Lancet du 3 juillet et seront présentés lors de la conférence internationale sur le sidasida, qui aura lieu à Bangkok, à la mi-juillet.