Pour mieux comprendre les hallucinations, des chercheurs ont imaginé une expérience basée sur une vidéo très simple dont ils peuvent varier les paramètres. Premier résultat ludique : elle fonctionne avec presque tout le monde. Mais l'intérêt premier est médical, pour explorer ce dysfonctionnement mental, comme on ne l'avait jamais fait. Il naîtrait dans le cortex visuel, affirment les chercheurs.

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    Connues depuis la nuit des temps, les hallucinations apparaissent chez des personnes atteintes de maladies psychiatriques ou sous l'emprise de drogues. On ne sait pas grand-chose des mécanismes neuronaux qui, dans le champ visuel, font apparaître des formes, osciller des objets ou changer les couleurscouleurs.

    Joel Pearson (University of New South Wales, en Australie) et son équipe disent être les premiers à trouver le moyen de créer une hallucination, de manière maîtrisée, chez presque tous les sujets. Ils détaillent leur expérience dans la revue eLife. La vidéo, rendue publique, fait le tour du Web. Elle montre un cercle blanc clignotant sur un carré noir et entourant, en son centre, un point blanc que le regard doit fixer. Apparaît alors sur le cercle une série de disques gris qui n'existent nulle part ailleurs que dans le cerveau du spectateur.


    La vidéo de l'expérience. Elle montre un cercle clignotant. En fixant le regard sur le point central, le spectateur voit apparaître des disques gris sur ce cercle, en nombre variable et pouvant tourner dans un sens ou dans l'autre. L'hallucination se crée dans le cortex visuel, là où le cerveau analyse les images provenant de chacun des yeux. La suite... reste à comprendre. © YouTube, Joel Pearson

    L'hallucination naît dans le cortex visuel

    Les chercheurs font varier la fréquence de clignotement entre 2 et 30 HzHz et les volontaires racontent ce qu'ils voient. Les cercles gris se mettent en général à tourner, d'abord dans un sens puis dans l'autre. Pour estimer la netteté de la perception, des cercles blancs avec de véritables disques gris, plus ou moins foncés, sont présentés aux sujets pour qu'ils puissent ensuite comparer avec leur hallucination. Résultat : la perception la plus nette a lieu à 11 Hz.

    Pour mieux comprendre où, dans la chaîne du traitement visuel, naît cette hallucination, une variante de l'expérience a exploré l'effet de la vision stéréoscopique, avec deux vidéos vues séparément par chaque œil. Avec un seul œil, les sujets commencent à percevoir l'hallucination à partir de 2,5 Hz et leur perception est alors la même qu'en binoculaire à 5 Hz. Et le plus fort contrastecontraste est atteint à 5 Hz en monoculaire, c'est-à-dire à près de la moitié des 11 Hz correspondant au pic observé avec les deux yeux. Conclusion des auteurs : l'hallucination ne naît pas dans la rétine mais dans le cortexcortex visuel, au moins au niveau du cerveau où se rejoignent les images de chaque œil.

    Pour l'instant, les chercheurs en sont là mais ils poursuivent leur travail, notamment avec des mathématiciensmathématiciens. Leur procédé expérimental, simple, permet de faire varier un petit nombre de paramètres et d'en mesurer précisément les effets. Ces scientifiques espèrent ainsi progresser dans la compréhension de ce dysfonctionnement mental, autrement bien difficile à cerner.