Munchies en anglais, « foncedalle » en français. Que l’on soit utilisateur de cannabis ou non, cette sensation de faim qui suit la consommation d’un joint est un phénomène bien connu. Et une équipe de chercheurs vient de faire la lumière sur la façon dont il fonctionne...


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    Un adulte sur deux a déjà consommé du cannabis en France et a donc probablement fait l'expérience de ce que l'on nomme communément « la foncedalle », cette sensation de bouche pâteuse et de faim irrépressible qui pousse les consommateurs à manger tout et n'importe quoi après avoir fumé un joint. Si vous vous demandiez pourquoi ce phénomène existe, vous êtes au bon endroit.

    Pas le temps de lire ? Découvrez cette actu au format audio dans notre chronique Futura SANTÉ, disponible sur le podcast Fil de Science. © Futura

    Estomac ou cerveau ?

    Une récente étude vient en effet de mettre en évidence par quel biais le cannabis donne faim. Verdict : rien à voir avoir l'estomac. La drogue agit en fait sur des neurones spécifiques, qui s'activent normalement quand vous anticipez la consommation d'aliments savoureux. En utilisant un vaporisateur de cannabis sur des souris, couplé à des techniques d'imageries calciques, qui témoignent de la dépolarisation des neurones - comprenez leur activation -, et des outils issus de la manipulation génétique, qui permettent d'activer et de désactiver des réseaux de neurones à leur guise, les scientifiques ont mis en évidence les effets du cannabis sur certaines cellules qui régissent notre appétit.

    Ils ont montré que l'exposition au cannabis activait spécifiquement les neurones AgRP pour Agouti related protein neuronneuron, des cellules présentes dans l'hypothalamus, qui produisent un neuropeptide jouant un rôle crucial dans la prise alimentaire, en contrebalançant les effets d'autres moléculesmolécules anorexigènesanorexigènes, comme la mélanocortine. Autrement dit, et même, plus simplement dit, lorsqu'il est sécrété, il nous donne faim. Pour s'assurer de l'implication de ces neurones dans le mécanisme de la foncedalle, ils les ont inhibés à l'aide d'un virusvirus qui était chargé de les cibler. Chez les souris dont les neurones AgRP étaient inhibés, le cannabis n'avait plus d'effets significatifs sur leur prise alimentaire, ce qui démontre clairement que c'est par ces cellules que le cannabis agit sur notre sensation de faim.

    L'étude démontre l'implication des neurones AgRP dans le mécanisme de la foncedalle. © MMPhoto21, Adobe Stock
    L'étude démontre l'implication des neurones AgRP dans le mécanisme de la foncedalle. © MMPhoto21, Adobe Stock

    Un mystère enfin résolu ?

    Ces résultats s'ajoutent à ceux de nombreuses autres études, qui ont, des années durant, tenté de faire la lumièrelumière sur ce phénomène surprenant. L'une d'elles, parue en 2014 dans la revue Nature Neuroscience, suggère notamment que la THCTHC, la molécule phare du cannabis, aiguiserait notre perception des odeurs et du goût. Mais il est bien possible qu'avec les neurones AgRP, les chercheurs aient découvert la clé ultime de ce grand mystère. Point bonus : ces recherches permettent d'en savoir toujours plus sur les mécanismes neurophysiologiques de notre prise alimentaire. Une autre étude récente, parue en novembre 2023 dans la revue Nature, a montré que la satiété était un processus séquentiel, avec des neurones chargés d'adapter notre comportement à très court terme et d'autres à long terme. Il faut espérer que ce genre de découvertes puisse se traduire en progrès clinique contre des maladies comme l’obésité, l’anorexie mentale ou la dénutrition dans des pathologiespathologies graves comme le cancercancer.