L’Etna est un des volcans les plus actifs de la Planète, avec une grande majorité d’éruptions au niveau de la zone sommitale qui, en conséquence, est en perpétuelle évolution. Le dernier né des quatre cratères sommitaux, le cratère Sud-Est, est apparu en 1971 et depuis plus de cinquante ans, il ne cesse de grandir. Tant et si bien que l’année dernière, sa cime dépassa celle du cratère Nord-Est, devenant ainsi le sommet du Mongibello. Mais, parfois, il se détruit aussi partiellement, comme le 10 février dernier…


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    Au début du XXe siècle, le sommet de l'Etna ne comptait qu'un seul cratère : le cratère central. En 1911, un nouveau cônecône s'édifia au nord-est de celui-ci et en 1945 et 1970, deux cratères distincts se formèrent à l'intérieur du cratère central, la Voragine et la Bocca Nuova respectivement. En 1971, un petit évent s'ouvrit sur le flanc inférieur sud-est du cratère central, sans activité manifeste jusqu'en avril 1978, date d'une violente éruption marquant le début d'une longue série encore en cours qui construit le cratère Sud-Est. Depuis cette date, et même si les autres cratères sommitaux sont encore actifs et présentent parfois une activité éruptiveéruptive, le cratère Sud-Est accapare presque totalement l'activité.

    Carte topographique de la zone sommitale de l'Etna en 1932. À cette date, seul le cratère central et le cratère Nord-Est existent. © Institut géographique militaire italien
    Carte topographique de la zone sommitale de l'Etna en 1932. À cette date, seul le cratère central et le cratère Nord-Est existent. © Institut géographique militaire italien
    Vue aérienne des cratères sommitaux de l'Etna il y a quelques années. Les dates entre parenthèses indiquent leur année de naissance. © Marco Neri, INGV
    Vue aérienne des cratères sommitaux de l'Etna il y a quelques années. Les dates entre parenthèses indiquent leur année de naissance. © Marco Neri, INGV

    À force de paroxysmes, des phases brèves et intenses d'activité, et de périodes avec une activité explosive moins intense mais continue pendant parfois plusieurs mois, un premier cône volcanique se forma entre 1978 et 2007, d'environ 250 mètres de haut. À l'été 2007, exactement comme en 1971, un évent s'ouvrit sur le flanc est de ce cône volcanique et concentra l'activité éruptive. Un cône se forma autour de cette nouvelle bouche : le nouveau cratère Sud-Est. En quelques années seulement, il atteignit la même altitude que le cône contre lequel il s'était formé qui, lui, s'était construit en plus de trente ans ! Ces deux cônes finirent par totalement fusionner, si bien qu'aujourd'hui la distinction entre les deux n'a plus lieu d'être.

    Vues de la zone sommitale depuis le sud, en janvier 2011 (a) et janvier 2018 (b). Le nouveau cratère Sud-Est a bien grandi ! © Boris Behncke, INGV
    Vues de la zone sommitale depuis le sud, en janvier 2011 (a) et janvier 2018 (b). Le nouveau cratère Sud-Est a bien grandi ! © Boris Behncke, INGV

    Un cône qui se construit vite… et qui se détruit encore plus rapidement !

    L'année dernière, le cratère Sud-Est a produit cinquante-deux paroxysmes, avec des fontaines de lave de 500 à 1.000 mètres de haut dont les lambeaux de lave, à chaque fois, retombèrent sur le cône et permirent de le construire très rapidement. En six mois, il s'éleva ainsi de 30 mètres pour culminer à 3.357 mètres d'altitude début août 2021, ravissant ainsi le sommet du Mongibello au cratère Nord-Est qu'il fut pendant une quarantaine d'années ! Mais, pour chaque mètre de haut gagné, ce sont aussi des centaines de milliers de mde projections qui s'entassent et qui font grossir ce cône ! D'une emprise à la base d'environ 1.000 mètres de diamètre, il atteint aujourd'hui plus de 350 mètres de hauteur : plus haut que la Tour Eiffel !

    Cet immense cône n'est pas comparable aux petits cônes éruptifs formés lors des éruptions du Piton de la Fournaise qui atteignent entre 30 et 50 mètres de haut. En revanche, il l'est un peu plus du cône volcanique que l'éruption sur l’île de La Palma, aux Canaries, a construit l'année dernière : environ 800 mètres de diamètre pour une hauteur de 200 mètres. Mais, à la différence de ces cônes volcaniques qui sont monogéniques, c'est-à-dire construits en une seule éruption et définitivement éteints après, le cratère Sud-Est est un édifice polygénique, formé par de nombreuses éruptions. C'est donc un vrai centre éruptif. En outre, en cinquante ans d'activité, ce sont essentiellement des paroxysmes de quelques heures maximum qui l'ont construit : sa croissance est donc vraiment impressionnante !

    Séquence d'images thermiques montrant la progression de la coulée pyroclastique à 22 h 26, le 10 février 2022, vu depuis le sud. Le cône remarquable devant la coulée pyroclastique est le cône aval des monts Barbagallo. © INGV
    Séquence d'images thermiques montrant la progression de la coulée pyroclastique à 22 h 26, le 10 février 2022, vu depuis le sud. Le cône remarquable devant la coulée pyroclastique est le cône aval des monts Barbagallo. © INGV

    Si la constructionconstruction d'un tel cône ne fait aucun doute dans le temps, il faut également noter quelques épisodes de destruction lors d'événements assez soudains en général, ce qui rappelle que ces cônes volcaniques ne sont jamais très solides.

    Le 10 février 2022, la surpression engendrée par le paroxysme força vraisemblablement le magma à percer le flanc sud du cratère Sud-Est, ce qui le déstabilisa et provoqua son effondrementeffondrement. C'est la caméra thermique et l'analyse du dépôt qui permettent de comprendre ce qu'il s'est passé car, à cet instant, les fontaines de lave de plus de 1.000 mètres de haut mitraillaient toute la zone : des bombes volcaniques tombèrent sur les monts Barbagallo, des cônes volcaniques monogéniques situés à plus d'un kilomètre des bouches éruptives !

    À 22 h 26, une coulée pyroclastiquecoulée pyroclastique parcourut 1.600 mètres vers le sud, recouvrant d'ailleurs le cône amont des monts Barbagallo et s'arrêtant vers 2.750 mètres d'altitude, un peu plus bas qu'une petite cabane qu'elle brûla modestement. Le dépôt formé est constitué de matériaux à granulométrie variable, de la cendre fine au bloc décamétrique. Ce sont donc à la fois des anciens morceaux du cône qui ont glissé et qui ont été emportés par le flux, mais aussi des cendres issues du magma et des morceaux pulvérisés. La cicatricecicatrice formée entaille l'intégralité du cratère Sud-Est sur environ 500 mètres de long pour 100 à 200 mètres de large : une vraie balafre ! Se fera-t-elle recouvrir par l'activité future ?

    Le cratère Sud-Est, le 12 février 2022, avec sa récente et profonde cicatrice. © Francesco Ciancitto, INGV
    Le cratère Sud-Est, le 12 février 2022, avec sa récente et profonde cicatrice. © Francesco Ciancitto, INGV
    La cabane brûlée par la coulée pyroclastique du 10 février 2022. © Francesco Ciancitto, INGV
    La cabane brûlée par la coulée pyroclastique du 10 février 2022. © Francesco Ciancitto, INGV

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