Des chercheurs chinois ont créé des vers à soie génétiquement modifiés pour fabriquer un fil contenant des protéines de soie d’araignée. Connu pour être résistant et extensible, le fil d'araignée pourrait offrir de nombreuses applications à l’industrie, à condition de trouver le moyen de le produire facilement et en grande quantité.

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    La soie d’araignée est une fibre naturelle aux propriétés mécaniques particulièrement intéressantes. Elle est à la fois résistante, souple, légère, ce qui lui permettrait d'être utilisée pour de nombreuses applicationsapplications, pour l'industrie militaire ou médicale : pour des gilets pare-balle dans l'armée, pour du fil chirurgical... Mais il est compliqué de faire produire ce fil par des élevages d'araignées car elles se mangent entre elles pour défendre leur territoire !

    Une première solution envisagée a été d'insérer des gènesgènes d'araignée dans des mamelles de chèvre pour qu'elles produisent les protéinesprotéines de soie dans leur lait. Le problème est que cette méthode ne permet pas d'obtenir directement la soie d'araignée. D'où l'idée d'utiliser un autre animal, qui produit déjà un fil de soie en élevage : le ver à soie Bombyx mori.

    Le saviez-vous ?

    Le ver à soie, ou Bombyx du mûrier, fabrique son cocon pour se préparer à sa métamorphose en papillon. Le cocon est un long fil de soie.

    À Shanghai, des chercheurs ont voulu se servir de l'édition génomiqueédition génomique pour qu'en plus de leur soie habituelle les vers à soie ajoutent celle de l'araignée Nephila clavipes, réputée pour sa toile particulièrement résistante. Pour modifier le génomegénome des vers à soie, les chercheurs ont eu recours à l'outil TalenTalen, qui, comme Crispr, coupe l'ADNADN à un endroit précis du génome. En 2012, d'autres chercheurs avaient déjà modifié génétiquement des vers à soie pour leur faire produire de la soie d'araignée, mais avec une autre technique (piggyBac) ; la soie obtenue ne contenait que 2 à 5 % de soie d'araignée.

    Une soie hybride aux propriétés mécaniques modifiées

    Mais quels gènes les chercheurs devaient-ils utiliser ? De manière générale, la fibre produite par le ver à soie contient deux types de complexes protéiques : des séricines et des fibroïnes. Les fibroïnes sont des protéines insolubles, comprenant une chaîne lourde appelée FibH, et une chaîne légère FibL. La soie d'araignée contient la protéine MaSp (major ampullate silk protein).

    Cocons normaux (en haut) et contenant de la fibre d’araignée (en bas à droite). © Xu <em>et al, PNAS 2018</em>

    Cocons normaux (en haut) et contenant de la fibre d’araignée (en bas à droite). © Xu et al, PNAS 2018

    La protéine FibH du ver à soie a des similitudes avec la protéine MaSp de l'araignée : toutes deux ont un poids moléculaire élevé et une structure répétitive. C'est pourquoi les chercheurs ont ciblé ces deux gènes. Ils ont remplacé le gène FibH du ver à soie par une fusionfusion de deux gènes, comprenant le gène MaSp1 de l'araignée Nephila clavipes, fusionné avec une petite partie du gène FibH du ver.

    Résultats : dans les cocons, la soie obtenue était un mélange dans lequel la protéine MaSp1 chimèrechimère représentait 35 % du poids total, soit un rendement meilleur que les expériences précédentes. La fibre produite n'était pas aussi résistante que la soie pure de ver à soie mais elle était quand même plus extensible.

    Voir aussi

    Des vers nourris au graphène et des OGM pour une soie super-résistante

    Le gros avantage de cette méthode est que la soie est prête à être utilisée, dès qu'elle sort de la chenille. Nul besoin de l'extraire ou de la purifier comme dans le lait de chèvre... D'après les auteurs qui publient leurs résultats dans Pnas, il serait possible d'envisager une production de massemasse avec cette technique.