La connaissance précise de l’intensité du champ de gravitation de la Terre est utilisée depuis longtemps pour chercher du pétrole ou des minerais. Le ralentissement du temps provoquée par ce champ, prédit par la relativité générale d’Einstein, devrait bientôt permettre de le mesurer à l'aide d'horloges atomiques et d'atteindre une résolution spatiale meilleure que celle que l'on obtient avec des satellites.

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    La théorie de la relativité générale d'Einstein semblait encore destinée à être confinée à la recherche la plus fondamentale il y a 50 ans. On l'utilise quotidiennement  avec le GPS et elle pourrait bientôt aider à trouver du pétrole et des minerais. © DP

    La théorie de la relativité générale d'Einstein semblait encore destinée à être confinée à la recherche la plus fondamentale il y a 50 ans. On l'utilise quotidiennement avec le GPS et elle pourrait bientôt aider à trouver du pétrole et des minerais. © DP

    La précision des horloges atomiqueshorloges atomiques n'a cessé de progresser depuis les travaux de pionniers comme Norman Ramsey. Elles sont si sensibles que l'on peut désormais mesurer l'effet de ralentissement de l'écoulement de temps, découlant des équationséquations de la relativité générale, avec deux horloges séparées par une altitude de seulement 30 cm. Il existe d'ailleurs des projets d'horloges atomiques pour tester précisément la théorie d'EinsteinEinstein, afin de montrer l'existence d'effets relevant d'une nouvelle physiquephysique, comme une violation du principe d'équivalence. C'est ce que vont tenter de faire les physiciensphysiciens et ingénieurs travaillant sur la mission Space-Time Explorer and QUantum Equivalence Principle Space Test (STE-Quest) de l'Esa.

    C'est en s'intéressant à cette mission qu'un chercheur de l'université de Zurich a découvert avec ses collègues que la précision des horloges atomiques portables allait bientôt être telle qu'elles pourraient servir à compléter les mesures gravimétriques des satellites en orbiteorbite, comme celui de la mission Goce.

    Sur cette image de la Terre, où le relief a bien sûr été fortement exagéré, on peut voir les creux (de -11 m à 0 m, couleurs froides) et bosses (de 22 m à 88 m, en couleurs chaudes) du géoïde par rapport à un ellipsoïde de référence. On observe une bosse sur l'Atlantique nord et un creux important au sud de l'Inde. © Wolfgang Köhler, ICGEM

    Sur cette image de la Terre, où le relief a bien sûr été fortement exagéré, on peut voir les creux (de -11 m à 0 m, couleurs froides) et bosses (de 22 m à 88 m, en couleurs chaudes) du géoïde par rapport à un ellipsoïde de référence. On observe une bosse sur l'Atlantique nord et un creux important au sud de l'Inde. © Wolfgang Köhler, ICGEM

    Pour comprendre le dessein des chercheurs, exposé dans l'article sur arxiv, rappelons que le géoïde est, sommairement, la forme de la surface que prendrait un océan s'il recouvrait la Planète. Plus précisément, le géoïde dit marin représente la surface équipotentielle du champ de pesanteur de la Terre qui coïncide avec le niveau moyen des océans (on ne tient pas compte des effets des circulations océanique et atmosphérique).

    Cette surface est de nos jours déterminée à l'aide des satellites qui survolent le globe dont les distances à la surface des océans sont mesurées par ondes radar. On obtient donc finalement la forme du géoïde marin, mais il faut ensuite prolonger ce géoïde aux continents. Si la Terre était un ellipsoïde parfait de composition homogène, la définition d'un géoïde serait simple. Mais comme la répartition et la densité des massesmasses à l'intérieur et à la surface de la Terre sont complexes, on obtient une surface équipotentielle déformée avec des bosses et des creux, comme le montre l'image ci-dessus où l'on a augmenté les différences d'altitudes pour les rendre visibles.

    Les horloges atomiques, un outil de plus pour la gravimétrie

    Inversement, en mesurant finement le géoïde sur les continents, il est possible d'en déduire des répartitions de masses, comme des gisements de pétrolepétrole ou de minerais à l'intérieur de la Terre, ou des structures géologiques particulières. Les géophysiciens exploitent donc des mesures de l'intensité du champ de pesanteur de la Planète bleuePlanète bleue depuis longtemps dans ce but. C'est l'objet d'une discipline que l'on appelle la gravimétrie, la science de la mesure et de l'étude de la pesanteur.

    Les mesures gravimétriques du géoïde sur les continents se font avec des satellites. Mais c'est une méthode indirecte, bien que précise. L'analyse des observations, du fait de la complexité de la répartition des masses dans les continents, n'est pas simple, la prospection géophysique sur les continents par gravimétriegravimétrie ne l'est donc pas non plus. Or, les horloges atomiques précises que l'on développe pour faire des tests dans l'espace sont conçues pour être transportables. Avec la précision que l'on va bientôt atteindre grâce à elles, les chercheurs affirment que les perturbations locales du champ de pesanteur seront mesurables directement et précisément par leur effet sur le ralentissement du temps. Il suffira de comparer des différences de vitessevitesse d'écoulement du temps par rapport à une horloge au niveau de la mer. Il deviendra donc possible de dresser directement des cartes du géoïde continental.

    Toutefois, les physiciens précisent que cette nouvelle méthode n'évitera ni le recours à des satellites ni l'utilisation d'autres gravimètres au sol pour la gravimétrie. Il s'agit essentiellement d'une nouvelle méthode de mesure directe du géoïde qui peut compléter les autres, chacune ayant ses points forts et ses points faibles.