Avant l'introduction du cheval domestique, les Mésopotamiens ont effectué des croisements entre espèces afin de générer une monture prestigieuse et utile à la guerre. Une hybridation entre équidés a permis de créer le kunga, un animal qui avait hérité des caractéristiques avantageuses de ses deux parents puisqu'il était à la fois docile, rapide et fort.


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    Il y a environ 4.500 ans, en Mésopotamie, des représentations et des textes ont été produits qui montrent qu'une élite de personnes utilisait des équidés, non seulement pour se déplacer en temps normal mais également pour faire la guerre. Or, la présence de chevaux domestiqués n'a été rapportée qu'à partir de 4.000 ans en arrière dans cette région, ce qui signifie que les équidés, appelés kungas, utilisés par les Sumériens n'étaient pas des chevaux domestiques.

    Afin de comprendre quelle était la nature de ces mystérieux et précieux animaux, une équipe spécialisée en paléogénomique a analysé les génomesgénomes de certains kungas identifiés par une archéozoologue et enterrés dans des tombes séparées. Ils étaient inhumés dans le complexe funéraire princier d'Umm el-Marra, situé à 60 kilomètres à l'est de la ville d'Alep, en Syrie.

    Les prestigieux kungas du site Umm el-Marra disposaient de leur propre tombe. © Glenn Schwartz, <em>John Hopkins University</em>
    Les prestigieux kungas du site Umm el-Marra disposaient de leur propre tombe. © Glenn Schwartz, John Hopkins University

    Ce site a été fondé au cours des premiers événements d'urbanisation et a été occupé tout au long de l'Âge du bronzebronze (entre 2.700 et 800 ans avant J.-C. environ). Les résultats de l'étude du génome de ces individus ont été publiés dans le journal Science Advances.

    Une hybridation bien pensée

    Ils ont ainsi pu identifier que les kungas étaient le résultat d'un croisement entre une ânesse domestique (Equus asinus) et un hémionehémione (Equus hemionus). Les hémiones sont des ânes sauvages et les auteurs ont pu analyser l'ADNADN de ces spécimens récents ainsi que d'un individu provenant du site de Göbekli Tepe (fondé il y a au moins 11.000 ans en arrière). Les kungas étaient par ailleurs stériles, ce qui signifie que les populations qui les utilisaient devaient forcer chaque croisement afin d'obtenir la précieuse monture.

    L'hémione est un équidé sauvage dont la rapidité et la robustesse ont attiré l'intérêt des Mésopotamiens, il y a 4.500 ans. © milanvachal, Adobe Stock
    L'hémione est un équidé sauvage dont la rapidité et la robustesse ont attiré l'intérêt des Mésopotamiens, il y a 4.500 ans. © milanvachal, Adobe Stock

    Un tel résultat d'hybridationhybridation au sein des équidés n'est pas surprenant, il rappelle notamment le cas du bardot, issu du croisement entre un étalon (Equus caballus) et une ânesse, ainsi que du mulet, issu de l'hybridation entre un âne et une jument domestique. Par sa mère, le kunga devait donc être relativement docile et de par son père, il était probablement plus fort et plus rapide que les ânes domestiques.

    S'il devait être aisé de favoriser les reproductions entre ânes et ânesses domestiques, la production de kungas devait être beaucoup plus contraignante car il était nécessaire de capturer et de canaliser des hémiones sauvages pour la reproduction. La difficulté de reproduction est probablement la raison pour laquelle les kungas ont ensuite été supplantés par les chevaux domestiques lorsque ceux-ci ont été introduits depuis les steppes d'Europe de l'Est.