L’histoire de l’araignée, c’est un peu celle d’un succès écologique. Un succès qu’elle doit en partie à sa toile. Et des chercheurs sont aujourd’hui parvenus à démêler son architecture complexe à l’échelle du micron. Pour la traduire en rythmes et en mélodies. Une musique qui, si elle n’apparaît pas particulièrement douce à nos oreilles, pourrait, à l’avenir, nous permettre de… parler aux araignées. 


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    Il y a quelques années, des chercheurs proposaient de s'inspirer des toiles d'araignées pour imaginer des structures capables de nous isoler du bruit. En ce début de semaine, une équipe du Massachusetts Institute of Technology (MIT, États-Unis) a annoncé, à l'occasion du meeting de printemps de la Société américaine de chimiechimie (ACS), avoir, au contraire, traduit la structure d'une toile d'araignée en rythmes et mélodies. Peut-être un moyen de pouvoir, à l'avenir, communiquer avec ces petites bêtes à huit pattes. Et plus prosaïquement, d'améliorer nos technologies d'impression 3D.

    Car les araignées apparaissent comme des maîtresses en matièrematière de constructionconstruction 3D. Plus de 47.000 espèces différentes sont là pour témoigner de l'efficacité de leurs œuvres à les protéger et à leur servir de maison et de piège à proies. Réussir à comprendre comment les araignées bâtissent leurs toiles dans l'espace pourrait aider les ingénieurs à appréhender plus efficacement les techniques d'impression 3D.

    Mais l'idée leur est surtout venue du fait que les araignées vivent dans des environnements de « cordes vibrantes ». « Les araignées ne voient pas très bien. Elles sentent le monde à travers les vibrationsvibrations qui se produisent, par exemple, lorsqu'elles tirent un brin de soie pendant la construction de leur toile ou lorsqu'une mouche s'y retrouve piégée », explique Markus Buehler, chercheur au MIT, dans un communiqué de l’ACS.

    Des images en coupe 2D — ici présentées dans différentes couleurs — ont été recombinées pour produire une image 3D d’une toile d’araignée et la traduire ensuite en musique. © Isabelle Su et Markus Buehler, <em>Massachusetts Institute of Technology</em>
    Des images en coupe 2D — ici présentées dans différentes couleurs — ont été recombinées pour produire une image 3D d’une toile d’araignée et la traduire ensuite en musique. © Isabelle Su et Markus Buehler, Massachusetts Institute of Technology

    Un nouvel exemple étonnant de sonification

    Avec son équipe, il a scanné une toile d’araignée avec un laserlaser pour en faire des coupes 2D. Puis un algorithme informatique lui a permis de reconstruire la complexité du réseau en 3D. Il a ensuite attribué différentes fréquences aux brins de la toile. En s'inspirant de ce qui se passe pour les cordes d'une guitare. Jusqu'à créer des notes qui, rattachées à la structure de la toile, sont devenues des mélodies. Et c'est à l'aide d'un instrument ressemblant à une harpe que les chercheurs les ont ensuite jouées.

    Des chercheurs du Massachusetts Institute of Technology (MIT, États-Unis) ont sonifié une toile d'araignée. Ils ont transformé ses différents brins en sons qui, rattachés à la structure de la toile, ont formé rythmes et mélodies. © Markus Buehler, Massachusetts Institute of Technology

    Pour aller un peu plus loin, les chercheurs du MIT ont imaginé un environnement en réalité virtuelleréalité virtuelle permettant littéralement de pénétrer dans la toile en captant les sons émis par ses caractéristiques structurelles. « En l'entendant et en le voyant, vous pouvez commencer à vraiment comprendre l'environnement dans lequel évolue une araignée », assure Markus Buehler.

    Les chercheurs ont aussi travaillé sur la phase de construction d'une toile. En scannant une toile en cours de construction par son araignée, ils ont converti chaque étape en musique avec des sons différents. Et c'est plus particulièrement ce travail qui les laisse espérer améliorer la conception des imprimantes 3D du futur. « La façon dont l'araignée "imprime" la toile est remarquable, car aucun matériaumatériau de support n'est utilisé, comme cela est souvent nécessaire dans les méthodes d'impression 3Dimpression 3D actuelles », souligne en effet Markus Buehler.

    Comme mentionné en introduction, l'équipe espère aussi désormais pouvoir apprendre à communiquer avec les araignées. Dans leur propre langage. Pour ce faire, les chercheurs ont enregistré les vibrations de la toile produites par différentes activités de l'araignée. Et ils essaient maintenant de générer des signaux synthétiques qui leur ressemblent. « Si nous exposons une araignée à ces signaux, pourrons-nous affecter son comportement et commencer à "parler" avec elle ? La question est excitante », conclut Markus Buehler.