Outre pour l’apéro, pour celles et ceux qui en boivent, c’est vrai que l’alcool s’avère être un ingrédient à ne pas négliger dans bien des recettes. Par exemple, on peut utiliser du vin dans une sauce, ou alors du rhum pour aromatiser les crêpes ! Pour autant, je n’ai jamais fini pompette après une crêpe party… En tout cas, pas à cause des crêpes. Alors, est-ce que l’alcool s’évapore bel et bien à la cuisson ?


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    Découvrez le podcast à l’origine de cette retranscription dans Science ou Fiction. © Futura

     

    L'alcool d'un point de vue chimique

    Tout d'abord, si l'on parle purement chimie, l'alcool représente un ensemble de composés organiques dans lequel on a un groupe hydroxyle, c'est-à-dire une molécule d'oxygène et d'hydrogène, qui est lié à un atomeatome de carbonecarbone. Ce groupe-là est lui-même relié à d'autres atomes de carbone ou d'hydrogène, pour former une molécule. On peut citer le méthanol, qui ne comporte qu'un seul atome de carbone, le propanol qui en a trois ou encore le butanol qui en a quatre mais, quoi qu'il en soit, aucun de ces alcools ne peut être consommé car ils sont très toxiques. Mais c'est pas juste une question de tenir ou pas « tenir l'alcool ». Croyez-moi, les symptômessymptômes de la gueule de bois, c'est une partie de plaisir à côté de ce qui vous attend si vous buvez un verre de ces alcools ! Tout ne se boit pas, mais le petit nom de celui que l'on consomme, c'est l'éthanol qui a, lui, deux atomes de carbone. 

    Des origines lointaines

    Mais, dis donc Jamy, l'alcool, d'où ça vient ? Tout d'abord, sachez que l'alcool, ce n'est vraiment pas une substance qui date d'hier. Il aurait été découvert au Paléolithique de manière un peu hasardeuse, à cause de la fermentationfermentation d'aliments qui aurait donné de l'alcool. Pour la maîtrise de sa production, il faudra plutôt attendre le Néolithique, mais ça reste quand même bien ancien ! On note la présence de boissons alcoolisées dans la plupart des civilisations de l’Antiquité, ce qui aurait d'ailleurs contribué au développement de l'agricultureagriculture ! Eh oui, parce que, par exemple, le vin, c'est du raisinraisin, et la bière, c'est de l'orgeorge et des fleurs de houblonhoublon. Les boissons alcoolisées étaient, déjà à l'époque, très appréciées. On voit d'ailleurs que, dans quelques civilisations, notamment chez les Grecs et les Romains, la fermentation de l'alcool est même considérée comme un acte divin. hé oui, Dionysos chez les Grecs et Bacchus chez les Romains, ça ne vous dit rien ?

    Bien sûr, la fermentation n'a en réalité rien de divin, c'est un processus biochimique bien identifié qui a été expliqué par Louis Pasteur au XIXe siècle. Sous l'action de levureslevures et dans un milieu dépourvu d'oxygène, le sucresucre se transforme en alcool. C'est pour ça que, parfois, quand on garde un fruit un peu trop longtemps hors du frigo, il peut avoir tendance à prendre une étrange odeur d'alcool. C'est de la fermentation ! Alors, n'allez pas boire ça évidemment, parce que ça reste un fruit pourri mais, dans l'idée, c'est le même processus qui nous permet de réaliser les premières étapes de production du vin par exemple.

     La fermentation est un processus biochimique bien identifié qui, sous l’action de levures et dans un milieu dépourvu d’oxygène, transforme le sucre en alcool. Ici, entreprise de production de bière artisanale. © djoronimo, Adobe Stock
     La fermentation est un processus biochimique bien identifié qui, sous l’action de levures et dans un milieu dépourvu d’oxygène, transforme le sucre en alcool. Ici, entreprise de production de bière artisanale. © djoronimo, Adobe Stock

    Dans le cas des alcools consommables, c'est la fermentation des sucres contenus dans les fruits, les grains, les racines ou les tubercules qui permet cette production. Le résultat de cette fermentation est une mixture appelée « moût » qui peut être distillée pour donner de l'eau-de-vie ou d'autres spiritueux, brassée pour donner de la bière, etc. Et de là, ces boissons peuvent être utilisées, préférablement de manière occasionnelle, comme des apéritifs, ou bien, on y vient, à des fins culinaires. 

    Au final, l'alcool dans la cuisson

    Aujourd'hui, toutes sortes de recettes utilisent l'alcool pour donner un petit quelque chose en plus à leur plat. Mais si on voit bien que l'eau s'évapore à la cuisson, est-ce qu'il en serait de même pour l'alcool ? Eh bien, figurez-vous que non. Ou du moins, pas complètement. Alors, continue d'écouter parce que j'y arrive. La température d'ébullition de l'alcool est à environ 78 °C contre 100 °C pour l'eau, donc on pourrait facilement s'imaginer que l'alcool passe de liquideliquide à gazeux plus rapidement que l'eau. Surtout quand on sait que l'alcool s'enfuit mieux lorsqu'il est exposé à l'airair. Et pourtant, la réponse est catégorique : non, l'alcool ne va pas disparaître de votre plat pour ne lui laisser qu'un goût sympathique. Tout dépend de la méthode, du temps de cuisson, ou du type d'alcool que vous avez mis.

    En ce qui concerne le temps de cuisson, pour vous donner quelques valeurs : si l'on ajoute de l'alcool dans un plat et que celui-ci est retiré du feufeu quasi immédiatement après, on aura 85 % de l'alcool qui sera encore présent. Si l'on cuit 25 minutes, il en restera 45 %, à 55 minutes il en restera 35 %, et même quand on arrive à 2 heures de cuisson il en reste 10 %. Même au bout de 3 heures, il en restera, donc non, l'alcool ne disparaît jamais vraiment. Bien sûr, il y a d'autres paramètres qui entrent en jeu, comme la taille du plat dans lequel l'alcool cuit ! Plus la surface est grande, plus l'alcool est exposé à l'air et donc plus ses molécules s'échappent.

     L’alcool s’enfuit mieux lorsqu’il est exposé à l’air mais il ne disparaît jamais vraiment car tout dépend du temps de cuisson, du type d’alcool et de la teneur en alcool des boissons utilisées. © Domaine public, Wikimedia
     L’alcool s’enfuit mieux lorsqu’il est exposé à l’air mais il ne disparaît jamais vraiment car tout dépend du temps de cuisson, du type d’alcool et de la teneur en alcool des boissons utilisées. © Domaine public, Wikimedia

    Oui mais attendez, il ne faut pas oublier de tenir compte de la teneur en alcool des boissons utilisées ! Pour illustrer ça, un exemple très simple : pour une bière on est entre 3 et 9 % d'alcool, alors que pour du rhum, on est plutôt entre 40 et 75 %. On a une grande différence et ça se ressent justement sur la façon dont ces alcools cuisent. Ces deux alcools cuits à la même température pendant la même duréedurée et dans la même casserole vont, certes, voir leurs molécules s'évaporer à la même vitessevitesse, mais compte tenu de leur teneur, le plat terminé sera plus alcoolisé s'il a été cuisiné avec du rhum que de la bière ! Non mais alors, il ne faut pas trop exagérer non plus.

    Mais comment le remplacer alors ?

    C'est très très peu probable que vous fassiez une intoxication en consommant un plat qui contient de l'alcool. Parce que, finalement, quelle que soit sa teneur, l'alcool utilisé sera toujours ajouté en toute petite quantité. Après, mieux vaut jouer la carte de la prudence et éviter d'en mettre dans la préparation si vous la partagez avec des enfants, des personnes enceintes ou à risques, ou tout simplement des convives qui ne veulent ou ne peuvent pas en consommer.

    D'ailleurs, il existe plusieurs façons de remplacer l'alcool dans la cuisine sans changer le goût final du plat. Par exemple, on peut retrouver le goût houblonné de la bière en la remplaçant par de la coriandre et du sirop d'orge malté. Pour le vin, on peut utiliser un peu de vinaigre, et pour le rhum on peut mélanger de la cassonade avec de la vanille. Si vous n'êtes pas convaincu, vous pouvez toujours remplacer l'alcool par une bière, du vin ou un spiritueux sans alcool ! Il existe beaucoup de substituts de ce stylestyle disponibles en grande surface ; à vous de trouver celle que vous préférez !