La tension monte chez les aficionados de La légende de Zelda. Près de quarante ans après la sortie du premier épisode, et après le succès du dernier Breath of the Wild, Nintendo sort son nouvel opus, Tears of the Kingdom, ce vendredi 12 mai. Les revendeurs s'attendent à un record historique de ventes, tant du côté du jeu vidéo que de la console Nintendo Switch.


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    Le géant japonais du jeu vidéo NintendoNintendo lance vendredi le dernier épisode de « Zelda », sa saga créée il y a près de 40 ans, misant sur l'engouement qu'elle suscite pour soutenir les ventes de sa console Switch vieillissante.

    Un elfe en tunique verte armé d'une épée, une princesse à sauver : alors que ce nouveau volet, intitulé Tears of the Kingdom, déchaîne déjà les passions avec des millions de vues pour chaque extrait vidéo publié sur internet, comment expliquer le succès de la série inventée par Shigeru Miyamoto, créateur vedette de Nintendo et du personnage Mario ? « Il est difficile de mettre des mots sur ce qui fait l'aspect unique de Zelda, déclare à l'AFP Katsuhiko Hayashi, rédacteur en chef du magazine spécialisé Famitsu, une institution au Japon. Il y a les puzzles à résoudre, les éléments d'action, un universunivers propre » à la série.

    En près de quarante ans d'existence, <em>Zelda</em> a influencé un grand nombre de créateurs par ses mécaniques ou son univers à part. © Philip Phong, AFP
    En près de quarante ans d'existence, Zelda a influencé un grand nombre de créateurs par ses mécaniques ou son univers à part. © Philip Phong, AFP

    Histoire d'un pionnier

    Le premier épisode de La légende de Zelda, sorti en 1986, détonnait à l'époque en abandonnant le joueur quasiment sans indications au milieu d'une vaste contrée parsemée de forêts, lacs, grottes et montagnes, inspirée des explorations d'enfance dans la campagne nippone de Miyamoto, qui s'est aussi dit influencé par les aventures d'Indiana Jones.

    Sorti quelques mois seulement après Super Mario Bros, il est à l'opposé du célèbre jeu de plateformes où le plombier moustachu court simplement de gauche à droite : ce titre « encourageait le joueur à explorer, découvrir et cartographier son univers et relever ses défis », explique l'analyste Mark Brown. « À l'époque, les jeux n'en étaient qu'à leurs balbutiements, mais Zelda offrait cette excitation, cet émerveillement de vivre une aventure, dit M. Hayashi. Il y avait déjà toute une mise en scène, les portesportes de donjons qui claquent (...), un "game design" déjà abouti ». Le succès du jeu -- dont le nom de la princesse est emprunté à la romancière américaine Zelda Fitzgerald -- est immédiat, et son univers charmera des générations de joueurs, mais aussi de créateurs de jeux. 

    La série, riche d'une vingtaine d'épisodes principaux distribués sur toutes les consoles successives de Nintendo, s'est vendue à ce jour à 125 millions d'exemplaires dans le monde. © Behrouz Mehri, AFP
    La série, riche d'une vingtaine d'épisodes principaux distribués sur toutes les consoles successives de Nintendo, s'est vendue à ce jour à 125 millions d'exemplaires dans le monde. © Behrouz Mehri, AFP

    Comment Zelda a inspiré des générations de créateurs

    « Beaucoup de jeux ont cherché à reprendre des éléments de titres influents comme DOOM, Metroid ou Metal Gear Solid », rappelle à l'AFP Mark Brown, qui analyse la conception des jeux sur sa chaîne YouTubeYouTube Game Maker's Toolkit. Mais Zelda, dit-il, « a toujours été différent : les développeurs ont souvent été inspirés par une sensation plus générale qu'ils évoquaient, faite d'exploration, d'aventure, de mystère, de surprise et de progression » du héros. 

    Parmi les créateurs ayant « confessé leur amour pour la série et créé des jeux inspirés de leur expérience », il cite Hideki Kamiya (Okami), Hidetaka Miyazaki (Dark Souls) ou Fumito Ueda (Ico). « Plus récemment, on a aussi vu des développeurs indépendants qui ont aimé Zelda dans leur enfance tenter de capturer ces sensations dans leurs créations, comme Fez ou Tunic ».

    Pour le 25<sup>e</sup> anniversaire de La légende de Zelda. © Ricardo Saramago, Flickr
    Pour le 25e anniversaire de La légende de Zelda. © Ricardo Saramago, Flickr

    À la recherche d'un second souffle

    En travaillant sur Ocarina of Time, le premier volet en 3D sorti en 1998, les créateurs ont pu permettre au joueur de viser facilement un ennemi avec précision dans un univers en trois dimensions. Cela aboutit à la création d'un système dit « visée Z » : celui-ci replaçant la caméra derrière le héros automatiquement et l'aidant à se focaliser sur un personnage à qui il souhaite parler ou sur un ennemi à attaquer. « C'était vraiment la solution parfaite, estime Kiyoshi Tane. Par la suite, les jeux d'action se sont multipliés -- y compris sur d'autres consoles -- en adoptant le même principe. Peut-être que sans Ocarina of Time, les jeux sur PlayStation et Xbox auraient été très différents ».

    La série, riche d'une vingtaine d'épisodes principaux distribués sur toutes les consoles successives de Nintendo, s'est vendue à ce jour à 125 millions d'exemplaires dans le monde.

    Au tournant des années 2010, Zelda connaît cependant une crise d'identité, illustrée par des épisodes de plus en plus linéaires. En cherchant à conquérir un public plus large, elle perd son identité et les ventes s'en ressentent. « L'équipe de développement avait un sentiment de crise [qui l'a amenée à] repenser les fondamentaux, raconte M. Hayashi. C'était une période difficile pour Nintendo qui a procédé par tâtonnements en faisant divers essais ».

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    Le résultat de ces réflexions aboutit à Breath of the Wild, un jeu en monde ouvert, bouffée d'airair frais dans la série qui renoue avec la liberté des débuts. Lancé en 2017 en même temps que la console Switch, c'est de loin le Zelda le plus vendu (29 millions d'unités). « Ce jeu a vraiment placé la barre très haut pour le genre action-aventure en monde ouvert, et Zelda est toujours au sommet du genre », pense M. Hayashi.

    The Legend of Zelda : Tears of the Kingdom – Bande-annonce officielle. © Nintendo France

    Vers de nouvelles ventes « historiques » à venir ?

    Nintendo, jusque-là muet sur une éventuelle nouvelle console malgré des rumeurs persistantes, compte sur le nouvel épisode de la saga pour soutenir ses résultats et relancer les ventes de sa Switch. Zelda est « une énorme marque et Breath of the Wild a eu un tel succès » que le nouvel opus va « non seulement doper ses ventes de jeux mais aussi de consoles », estime Serkan Toto du cabinet Kantan Games à Tokyo. Pour Charles-Louis Planade, analyste chez Midcap Partners, il pourrait même devenir « la meilleure vente historique » de cette licence. « C'est un jeu qui peut s'approcher du milliard de dollars de revenus, c'est très conséquent pour une société qui fait un chiffre d'affaires d'un peu plus de 10 milliards par an », dit-il à l'AFP.