Les tatouages sur le visage ont toujours posé des problèmes aux systèmes de reconnaissance faciale. Mais cette intelligence artificielle a été entraînée pour les « effacer » virtuellement. Au cœur de ce système, les réseaux antagonistes génératifs déjà utilisés pour la création de deepfake.


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    Qu'ils soient temporaires ou définitifs, les tatouages sur le visage sont les ennemis de la reconnaissance faciale, au même titre qu'un masque ou une cagoule. Mathias Ibsen et ses collègues de l'Université des sciences appliquées de Darmstadt, en Allemagne, avaient ainsi constaté que les peintures, maquillages et tatouages pouvaient nuire aux performances des systèmes de reconnaissance des visages quand ils sont placés sur des zones importantes du visage, comme les joues, le menton et le neznez.

    « Comme les tatouages faciaux sont une forme d'altération permanente qui ne peut pas être facilement enlevée, il est particulièrement intéressant d'étudier si la suppression numérique des tatouages faciaux peut améliorer les performances des systèmes de vérification des visages », écrit Ibsen dans sa dernière étude en date.

    L'IA est entraînée en appliquant des tatouages sur des visages. © Mathias Ibsen
    L'IA est entraînée en appliquant des tatouages sur des visages. © Mathias Ibsen

    Les réseaux antagonistes génératifs en action

    Avec son équipe, il s'est ainsi lancé dans un projet de reconnaissance faciale avec tatouage, et pour cela, il a choisi l'apprentissage profondapprentissage profond avec deux étapes distinctes. La première consiste à ajouter virtuellement des tatouages faciaux à des images de visages nus. Au préalable, le visage a été « découpé » en différentes zones où l'on trouve habituellement les tatouages. L'IAIA possède alors le visage original d'un côté, et l'autre, créé virtuellement, avec des tatouages différents placés sur le visage qui en occupent entre 5 et 25 %.

    Entrent alors en action ce qu'on appelle les « réseaux antagonistes génératifs » ou GAN en anglais (Generative Adversarial Network). Ce sont des algorithmes d'apprentissage non supervisé à base de réseaux de neuronesneurones artificiels, et le but est d'apprendre à l'IA à faire correspondre une image faciale tatouée à une image faciale correspondante sans tatouage. Dans ce système, deux réseaux neuronaux travaillent en parallèle, l'un créant les images et l'autre les confrontant à des images réelles. C'est ce que l'on utilise pour créer de faux visages comme dans le deepfake, mais aussi pour les débusquer puisqu'une IA est capable de reconnaître un visage créé par une machine, d'un vrai visage.

    À gauche, le visage tatoué d'origine d'un homme et deux femmes. Puis l'effacement des tatouages avec des logiciels de retouche photo, ensuite avec une Intelligence artificielle. © Mathias Ibsen
    À gauche, le visage tatoué d'origine d'un homme et deux femmes. Puis l'effacement des tatouages avec des logiciels de retouche photo, ensuite avec une Intelligence artificielle. © Mathias Ibsen

    Un faible taux d'erreurs

    Après avoir comparé et distingué le visage nu d'un visage tatoué, l'IA a ensuite supprimé le tatouage sur le visage d'images de visages tatoués, et les images modifiées ont été testées par rapport à un système de reconnaissance faciale. Résultat, le taux d'erreurs a été réduit de moitié lorsque les tatouages avaient été supprimés par l'IA.

    « L'étude préliminaire présente une technique utile pour entraîner les algorithmes à supprimer les tatouages faciaux et à améliorer la précision de la reconnaissance », explique Kay Ritchie, de l'université de Lincoln, au Royaume-Uni, dans The New Scientist. Cependant, cette chercheuse souligne que, comme les images utilisées pour entraîner l'algorithme sont elles-mêmes modifiées numériquement, cette technique pourrait ne pas être aussi efficace avec des images réelles non modifiées. Autre point à améliorer et approfondir : l'IA est inefficace face à des tatouages qui recouvrent quasiment tout le visage, comme c'est le cas chez certaines ethnies.