Anirudh Sharma, chercheur au Media Lab du MIT, a mis au point un ingénieux système d’aspiration et de filtration grâce auquel il parvient à extraire le noir de carbone de la pollution atmosphérique et à le transformer en encre noire pour imprimante. Il assure qu’avec un peu de développement (sans oublier la vodka et l'huile d'olive), la qualité de cette encre pourrait rivaliser avec celles des produits du commerce.


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    Article paru le 15 octobre 2015

    Tous les utilisateurs d'une imprimante à jet d'encre connaissent le prix rédhibitoire des cartouches de marques. Voilà pourquoi des alternatives se sont développées, comme les kits de remplissage ainsi que la vente de cartouches dites compatibles, à des tarifs plus abordables.

    Et s'il était possible de fabriquer soi-même de l'encre en transformant le noir de carbonecarbone présent dans les suiessuies des gazgaz d'échappement et des combustionscombustions d'hydrocarbureshydrocarbures ? Cette idée de prime abord surprenante a germé dans l'esprit d'Anirudh Sharma, un chercheur du célèbre Massachusetts Institute of Technology (MIT). « Il y a tant de pollution atmosphérique et de suie autour de nous, surtout dans les villes surpeuplées. Et si l'on pouvait les transformer en encre pour imprimantes ? » écrit-il.

    Le chercheur du MIT dit avoir eu l'idée d'exploiter le noir de carbone suite à ses voyages en Inde dont il est originaire. Il évoque la pollution de l’air et un taux de particules de suie si élevé que le simple fait de se passer un mouchoir sur le visage révèle leur présence en teintant le tissu d'un marron-noir peu rassurant. Se rappelant que l'encre de Chine est fabriquée à partir de noir de carbone, Anirudh Sharma pense alors à transformer cette nuisancenuisance en quelque chose d'utile. Il a imaginé un dispositif qui aspire la suie présente dans l'airair pour en extraire le noir de carbone qui est ensuite mélangé à de l'alcoolalcool et de l'huile d'olive. Il obtient une encre noire qui, comme le montre sa démonstration vidéo, semble tout à fait utilisable.

    Dans cette vidéo de démonstration, le chercheur du MIT Anirudh Sharma utilise son système d’extraction pour récupérer du noir de carbone à partie de la suie émise par la combustion d’une bougie. La substance polluante est alors transformée en encre noire grâce à un mélange d’alcool et d’huile d’olive. Le liquide est injecté dans une cartouche classique commandée par un contrôleur Arduino. L’impression se fait avec une finesse de 96 points par pouce. © Anirudh Sharma, Vimeo

    Une heure pour remplir une cartouche à partir d’un moteur Diesel

    Son appareil baptisé Kaala est le fruit d'un bricolage astucieux qui assemble un ventilateur de PC positionné à proximité d'une source d'émissionémission de gaz polluants qui sont aspirés pour en récupérer le noir de carbone grâce à un séparateur. Pour sa démonstration, le scientifique s'est servi d'une bougie dont il extrait la suie émise lors de la combustion. Celle-ci est alors mélangée avec de la vodka et une goutte d'huile d'olive pour obtenir la viscositéviscosité nécessaire. L'encre est transférée dans une cartouche HPHP contrôlée par un circuit Arduino et permet d'imprimer avec une résolution de 96 points par pouce. Anirudh Sharma précise qu'il lui a fallu agrandir les orifices de sortie de la cartouche car les particules de son encre artisanale étaient plus épaisses que celles des encres industrielles.

    Mais il assure qu'en poussant un peu la recherche et développement de son concept, la qualité finale pourrait rivaliser avec celle des cartouches d'encre du commerce. Selon lui, il faudrait environ une heure pour remplir une cartouche à partir des émanations d'un moteur Diesel vieux de seulement quatre ans et à peine une dizaine de minutes en récupérant les fumées d'une cheminéecheminée domestique.

    « L'encre d'impression de couleurcouleur noire est l'un des produits les plus consommés dans l'industrie. L'essentiel de la production de cette encre est réalisé en usines avec des procédés chimiques complexes. Des entreprises comme HP ou Canon réalisent 70 % de leurs bénéfices en vendant ces cartouches d'encre avec des marges de 400 % », souligne Anirudh Sharma qui n'évoque pourtant pas de projet commercial pour son invention.