On savait déjà imager et manipuler des atomes mais grâce à des chercheurs d’IBM, il devient possible d'observer des molécules. A l'origine de cet exploit, une découverte faite un peu par hasard... Les premières images de molécules ont été obtenues avec du pentacène, dans des conditions, il est vrai, assez délicates.

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    En gris et rouge la pointe en CO équipant un AFM étudiant la molécule de pentacène. Au milieu de l'image, une représentation des données enregistrées. Crédit : IBM Research–Zurich

    En gris et rouge la pointe en CO équipant un AFM étudiant la molécule de pentacène. Au milieu de l'image, une représentation des données enregistrées. Crédit : IBM Research–Zurich

    IBM poursuit sa conquête du nanomonde et c'est à nouveau à l'aide d'un microscope à force atomique que des chercheurs zurichois ont rapproché de l'échelle humaine le monde des atomes et des molécules qui fascinait tant les fondateurs de la mécanique quantique.

    Leo Gross, Fabian Mohn, Nikolaj Moll et Gerhard Meyer sont en effet membres du centre IBMIBM Research-Zurich et, en collaboration avec Peter Liljeroth de l'université d'Utrecht, ils sont parvenus à s'affranchir des obstacles limitant la résolutionrésolution que l'on pouvait atteindre avec un microscope à force atomique (AFP pour Atomic Force Microscopy en anglais). Ce microscope est une variante du microscope à effet tunnelmicroscope à effet tunnel inventé par Gerd Binnig et Heinrich Rohrer en 1981 à Zurich même. Ces deux chercheurs, eux aussi des membres du IBM Research-Zurich, ont d'ailleurs été récompensés par le prix Nobel de physique.

    Une représentation de la molécule de pentacène, avec en blanc les atomes d'hydrogène et en gris ceux de carbone. Crédit : <em>IBM Research–Zurich</em>

    Une représentation de la molécule de pentacène, avec en blanc les atomes d'hydrogène et en gris ceux de carbone. Crédit : IBM Research–Zurich

    Une molécule de monoxyde de carbone fixée sur une pointe...

    Sa pointe métallique permet de mesurer d'infimes forces électrostatiquesélectrostatiques, attractives ou répulsives, s'exerçant entre la pointe du microscope et les atomes d'une surface. Un ordinateurordinateur tire de ces informations une image représentant les atomes déposés sur une surface. Mais lorsque la pointe se rapproche trop pour augmenter la résolution, les forces deviennent en principe trop grandes. Il s'y ajoute un autre problème. La complexité géométrique et la composition mal connues de la pointe limitent la précision des informations que l'on peut obtenir.

    Par hasard, Leo Gross et ses collègues se sont aperçus qu'une molécule de monoxyde de carbonemonoxyde de carbone (CO) installée à la pointe du microscope permettait de surmonter ces obstacles et d'obtenir un gain de résolution lors de l'observation de molécules. En effet, la molécule de CO est particulièrement stable, bien comprise, et, entre la pointe et les objets atomiques ou moléculaires à étudier, des forces plus faibles apparaissent.

    L'image de la molécule déduite des observations avec l'AFM à pointe de monoxyde de carbone. Crédit : <em>IBM Research–Zurich</em>

    L'image de la molécule déduite des observations avec l'AFM à pointe de monoxyde de carbone. Crédit : IBM Research–Zurich

    Les chercheurs ont pu tester leur découverte sur une molécule de pentacène (C22H14) formée de la fusion de 5 molécules de benzènebenzène et dont la longueur est de 1,4 nanomètrenanomètre environ. Ils ont observé les atomes d'hydrogènehydrogène et de carbone individuellement ainsi que l'ensemble de la structure.

    Les conditions imposées ne sont cependant pas simples... L'expérience a eu lieu dans l'ultravide à des températures de l'ordre de -268°C et il a fallu observer la molécule pendant 20 heures pour acquérir un volumevolume de données suffisant.

    Une des perspectives ouvertes par cette découverte est la réalisation d'un catalogue de signatures propres à différents atomes et molécules s'il est possible d'améliorer encore la résolution. Dans un avenir plus lointain ce nouveau microscope à force atomique devrait alors permettre d'identifier des molécules lors de réactions.

    On peut aussi penser que l'on comprendra mieux ce qui se passe dans des composants moléculaires de l'électronique du futur. En attendant, Science publie un article sur la découverte des chercheurs d'IBM.