Pour expliquer la formation des premiers astres de l’Univers, il faut introduire une bonne dose de matière noire. Mais était-elle froide ou chaude ? Froide, pensent la majorité des astronomes. Non, affirment certains, elle était tiède !

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    La formation des premières étoiles et des premières galaxies est un sujet fascinant mais complexe. Au début des années 1980, deux modèles avaient été proposés pour en rendre compte : celui avec matière noirematière noire froide (la théorie dominante actuellement) et celui avec matière noire chaude. D'après une simulation faite par des chercheurs de l'Université de Durham, un modèle avec de la matière noire tiède pourrait s'imposer en complément de celui de la matière noire froide. Pour le savoir, les astrophysiciensastrophysiciens devront débusquer les plus vieilles étoiles de l'Univers.

    La matière noire est une réalité de plus en plus tangible en astrophysique et en cosmologie, même si tous les problèmes ne sont pas encore résolus grâce à elle et même si aucune détection directe des particules la constituant n'a encore été faite.

    Pendant les années 1970, des théoriciens comme James Peebles et Yakov Zeldovitch ont proposé différents modèles pour expliquer l'apparition des grandes structures de l'Univers comme les galaxies et les amas de galaxiesamas de galaxies. Une des idées essentielles était que deux scénarios sont possibles, selon la massemasse des particules de matière composant des fluctuations de densité dans le plasma primordial des premières minutes de l'Univers. Soit de grandes structures se formeraient par effondrementeffondrement gravitationnel pour donner plus tard des amas de galaxies, soit les galaxiesse formeraient les premières pour se rassembler ensuite sous l'influence de la gravitégravité pour donner des amas.

    Dans les deux cas, les fluctuations de matières nécessaires pour former ces grandes structures nécessitent de la matière dite noire car n'interagissant pas avec la lumièrelumière. Dans le cas contraire, la pressionpression de la lumière sur la matière était telle dans les premiers instants de l'Univers qu'elle rendait très difficile la formation de concentrations de matière normale en contrecarrant l'action de la gravité. Si la masse des particules de matière noire est importante, on peut montrer qu'elles se comportent comme un gazgaz froid qui va se condenser pour donner d'abord les étoiles et les galaxies. Si la masse des particules est faible, elles se comportent comme un gaz chaud et ce sont d'abord de grands nuagesnuages de matière esquissant les amas de galaxies qui se formeront les premiers.

    Simulation de la formation des premières étoiles avec la matière noire froide Crédit : <em>Science</em>

    Simulation de la formation des premières étoiles avec la matière noire froide Crédit : Science

    Les observations des années 1980 et 1990 ont fait triompher le modèle de la matière noire froide (Cold Dark Matter, ou CDM) de Peebles aux dépens de celui de la matière noire chaude (Hot Dark Matter, HDM) de Zeldovitch. Toutefois, ces mêmes observations peinent à mettre en évidence les petites galaxies nainesgalaxies naines qui auraient dû se former en très grand nombre très tôt, et être toujours en orbiteorbite autour des grandes galaxies résultant de la fusionfusion des précédentes. En revanche, leur quasi absence est bien expliquée dans le cadre de la matière dite chaude. En fait, il suffirait de rajouter à la matière noire froide une petite composante de matière chaude pour résoudre le problème. Plus précisément, une composante avec des particules de matière noire de masses intermédiaires entre celles des modèles de matière chaude et froide suffirait. Tout naturellement on parle en général de modèle de matière tiède dans ces cas là.

    La simulation

    Tom Theuns et Liang Gao ont donc conduit une nouvelle simulation de la formation des premières étoiles et des grandes structures de l'Univers en ajoutant un peu de matière tiède. Le résultat est assez général et il est valable pour différents candidats possibles de matière tiède (Warm Dark Matter, ou WDMWDM), comme par exemple des neutrinos stérilesneutrinos stériles ou les partenaires supersymétriques des gravitons, véhiculant la force de gravité, les gravitinosgravitinos. Ils ont pour cela employé le logiciellogiciel de simulation GADJET. Le résultat n'est certes pas aussi spectaculaire que la fameuse simulation du millénaire mais il permet déjà  de faire quelques prédictions intéressantes.

    Simulation de la formation des premières étoiles avec la matière noire tiède Crédit : <em>Science</em>

    Simulation de la formation des premières étoiles avec la matière noire tiède Crédit : Science

    Dans le cadre du modèle de matière froide (CDM) les premières étoiles sont très massives, environ 100 à 1000 masses solaires, sans les éléments lourds comme le carbonecarbone et le ferfer qu'elles vont synthétiser, et elles explosent rapidement en quelques millions d'années tout au plus. En revanche, dans le modèle WDM, des étoiles beaucoup moins massives, et pouvant exister encore aujourd'hui sous une forme peu lumineuse, se forment. Des concentrations denses de ces étoiles apparaissent sous formes de filaments, et non seulement les petites galaxies naines prédites par le modèle CDM se forment en moins grande quantité mais, selon les deux chercheurs, l'apparition des premiers trous noirstrous noirs géants serait plus facile à comprendre dans ces filaments où des amas d'étoiles denses pourraient en être à l'origine.


    Rapidement, le nuage de matière constituant une fluctuation de densité s'aplatit pour former une sorte de crêpe dans laquelle des filaments d'étoiles se forment, c'est le scénario de la matière noire tiède.

    Si l'on détectait ces premières étoiles, on aurait alors des indications plus précises, non seulement sur la nature de la matière noire mais aussi sur les masses des particules la composant. On pourrait alors faire des comparaisons fructueuses avec les possibles créations de nouvelles particules supersymétriques qui auront peut-être lieu au LHCLHC l'année prochaine.