Le ministère de l’éducation nationale cherche la parade contre la propagation des idées « complotistes ». Le danger est immense et le chantier très compliqué. L’une des manifestations de cette méfiance envers les discours officiels ou les explications des experts est la mise en doute du programme Apollo. Récurrente, cette idée surgit parfois à l'improviste. Voici quelques arguments à conserver par devers soi pour les sortir quand l'occasion se présente, avec l'assistance d'un smartphone.

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    Oui, il existe encore des sceptiques qui succombent à la théorie du complot et qui voient comme un gros canularcanular les missions Apollo qui ont fait marcher douze hommes sur la Lune. Apparue rapidement après la fin du programme, cette contestation est restée très marginale, avec un regain en 1978 après le film Capricorn One, qui montrait le montage d'un faux voyage vers Mars. Elle a depuis pris de l'ampleur sur InternetInternet, exemplaire chambre d'échos pour les rumeurs (hoax en français moderne). Le doute se renforce aussi par l'éloignement. Quatre décennies se sont écoulées depuis le dernier voyage, alors qu'aujourd'hui, une expédition de ce genre semble infaisable. Même hors des cercles complotistes purs et durs, des gens honnêtes sont sensibles à cette tentation du scepticisme et certaines soirées sont parfois pénibles quand l'un des convives sort un « vous y croyez, vous, à ApolloApollo ? ». L'époque du duel étant révolue, il faut se préparer à une joute verbale. Heureusement, il y a les smartphones et quelques clics peuvent apporter quelques armes efficaces.

    Un premier élément, qui met les contestataires en difficulté, est la série d'images prises par la sonde LROLRO entre 2009 et 2012. Tous les sites d'atterrissage ont été survolés. Celui d'Apollo 14 l'a été deux fois, en 2009 et 2011. Les images sont nettes et laissent peu de place au doute, avec notamment des traces des allées-et-venues des astronautes. Une bonne adresse : notre article Les sites d’atterrissage d’Apollo photographiés par LRO.

    Le site d'atterrissage d'Apollo 14 photographié en 2011 par la sonde LRO, avec le module lunaire (le point blanc entouré de noir), les instruments scientifiques (indiqués par la flèche) et les traces de pas, notamment, à droite, vers le <em>Cone Crater</em>, situé à un kilomètre et exploré à pied par Alan Shepard et Edgar Mitchell. © Nasa, GSFC, <em>Arizona State University</em>

    Le site d'atterrissage d'Apollo 14 photographié en 2011 par la sonde LRO, avec le module lunaire (le point blanc entouré de noir), les instruments scientifiques (indiqués par la flèche) et les traces de pas, notamment, à droite, vers le Cone Crater, situé à un kilomètre et exploré à pied par Alan Shepard et Edgar Mitchell. © Nasa, GSFC, Arizona State University

    Les images des missions Apollo concentrent le feu des conspirationnistes

    Les arguments principaux des négationnistes lunaires tournent autour des photographiesphotographies. Certains détails manqueraient, seraient irréalistes ou trahiraient un trucage. Il est vrai que pour la plupart des Terriens, les missions Apollo ont été perçues à travers des retransmissions télévisées et des photographies. Pour beaucoup, la concrétisation s'arrête là. Créer une fausse mission, c'est facile : il suffit de fabriquer des images de synthèse. La réfutation de ces arguments iconographiques est difficile car il faut se battre sur chacune d'entre elles. Tous, pourtant, ont été plusieurs fois contredits. Il est simple de montrer que les ombres sont réalistes si l'on tient compte de la focalefocale, qu'il est logique que le ciel ne soit pas étoilé parce que la lumière est forte sur les zones éclairées, etc. Mais il faut les avoir sous la main et démonter l'argumentaire. C'est trop long, donc inefficace.

    Il existe un autre terrain : celui du bilan scientifique. On peut rappeler que les missions Apollo ne se limitent pas aux images et que la science en a profité, et en profite toujours. Du coup, si les missions Apollo sont des canulars, alors il faudrait que le complot soit encore actif et que des personnes, aujourd'hui encore, en viennent à mentir autour d'eux. Voici quelques exemples.

    Le réflecteur déposé sur la Lune lors de la mission Apollo 15. Avec 1 m x 0,6 m, c'est le plus grand de tous (source : Culture Sciences Physique, ENS Lyon). © Nasa

    Le réflecteur déposé sur la Lune lors de la mission Apollo 15. Avec 1 m x 0,6 m, c'est le plus grand de tous (source : Culture Sciences Physique, ENS Lyon). © Nasa

    La distance de la Terre à la Lune mesurée à l’aide de lasers

    Des réflecteurs ont été posés sur la Lune lors de trois missions Apollo (11, 14 et 15) et deux missions soviétiques (Lunakhod 1 et 2). Ces réflecteurs ont la propriété, comme les catadioptrescatadioptres des feux arrière de voituresvoitures, de renvoyer la lumière exactement dans la direction d'où elle est venue. Depuis la Terre, des tirs laser sont régulièrement émis sur les régions où ils ont été installés et leur réflexion est visible dans la ligne de visée à l'aide d'un télescope et d'un capteurcapteur très sensible. Le faisceau laser, sur une telle distance (380.000 km), s'évase, surtout lors de la traversée de l'atmosphèreatmosphère terrestre et la tache sur le sol lunaire est de l'ordre du kilomètre, soit une précision suffisante pour toucher la zone du réflecteur. Avec une série d'impulsions, la quantité de lumière récupérée peut être détectée.

    Le temps de l'aller-et-retour, d'environ 2,56 secondes, permet de déterminer cette distance au centimètre près, et même moins aujourd'hui. Des mesures régulières sont effectuées pour préciser l'orbiteorbite de la Lune, ce qui a de nombreuses applicationsapplications : meilleure connaissance de la structure interne de notre satellite, éphémérides, études des maréesmarées, références en mécanique célestes, etc. En 2005, une mesure avait permis de vérifier la relativité générale.

    On indiquera au sceptique le site de l'Observatoire de la Côte d'Azur, près de Marseille, dans lequel on trouve une page sur la télémétrie Terre-Lune, régulièrement mise en œuvre. Une autre page, en français, écrite par l'astrophysicienne Marie-Christine Artru, explique tout cela avec force détails sur le site de l’ENS Lyon, en tant que ressources pour les étudiants. Si complot il y a, il faut donc imaginer que les professeurs de physiquephysique enseignent sciemment des mensonges aux futurs scientifiques. L'argument porteporte assez bien.

    L’analyse des roches lunaires

    Les six missions lunaires ont permis de ramener 2.200 échantillons de roches, pour un total de 382 kgkg. Depuis, ces roches ont été examinées par des centaines de laboratoires dans le monde et continuent de l'être. D'après les complotistes, ce sont de simples météoritesmétéorites, ce que prouveraient les remarques de commentateurs avisés qui connaissent quelqu'un qui eux savent. Une recherche sur le Web avec les mots clés « roches lunaires », ou « moon rocks », remontent de nombreux articles.

    On peut se contenter de Futura-Sciences, qui a consacré de nombreux articles à des découvertes faites sur des échantillons de roches lunaires ramenées par les astronautes d'Apollo. On y a découvert du graphite (un caillou choisi par Harrison Schmitt, un géologuegéologue, qui a volé avec la dernière mission du programme, Apollo 17) et elles avaient auparavant dévoilé un épisode déterminant de l'histoire du Système solaireSystème solaire : le Grand bombardement tardif.

    Des arguments plus techniques

    Si le débat n'est pas éteint, on pourrait évoquer les 400.000 personnes qui ont collaboré de près ou de loin au programme, et les 20.000 entreprises privées qui y ont participé (voir ce bilan du centre Langley). Sacré hoax, quand même. On peut aussi remarquer que le canular a duré trop longtemps. Pourquoi tant de missions si toutes étaient fausses ? Les plus irréductibles ne seront pas convaincus, sans doute, mais on peut ainsi sauver la soirée.