Nos ancêtres reptiles utilisaient leur mâchoire pour mâcher mais aussi entendre. Dater l’origine de la transition vers le système auditif des mammifères actuels posait quelques soucis aux scientifiques. Une étude publiée dans Science semble avoir trouvé la réponse en analysant un petit mammifère vieux de 125 millions d’années.


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    Les mammifères modernes, dont les humains, doivent leur ouïe à trois petits os de l’oreille moyenne : le marteau, l'enclume et l'étrier. Absents de leur ancêtre reptile, les scientifiques n'arrivaient pas à dater le début de l'apparition de cette transformation. Une étude, publiée dans Science et menée conjointement par des chercheurs chinois et américains, met en lumièrelumière ce qui pourrait être le chaînon manquantchaînon manquant entre un système auditif ancien et celui qu'on connaît aujourd'hui. Il s'agirait d'une espèce qui vivait il y a 125 millions d'années dans ce qui est aujourd'hui le nord-est de la Chine.

    Une reproduction de l’environnement et de l’espèce protomammifère <em>Origolestes lii.</em> © Chuang Zhao
    Une reproduction de l’environnement et de l’espèce protomammifère Origolestes lii. © Chuang Zhao

    La séparation de deux fonctions : mâcher et entendre

    « Ce sont des preuves fantastiques », a tranché un biologiste spécialiste de l'évolution, Guillermo Rougier, de l'université de Louisville, qui n'a pas participé à l'étude. Les fossiles analysés sont au nombre de six et appartiennent à une espèce de protomammifère du Crétacé inférieur, baptisée l'espèce « Origolestes lii ». Ancêtres des mammifères placentaires et des marsupiaux, ces animaux ont côtoyé les dinosaures et avaient la taille et l'apparence de rongeursrongeurs, comme des souris.

    Les reptiles utilisent leurs mâchoires pour mâcher et transmettre des sons externes par vibrationsvibrations jusqu'à leur cerveaucerveau, ils ne possèdent pas les trois osselets de l'oreille moyenneoreille moyenne. Selon l'hypothèse scientifique prédominante, la séparationséparation progressive des deux fonctions, à savoir mâcher et entendre, aurait permis d'alléger les contraintes mutuelles pesant sur les mâchoires. Les mammifères auraient ainsi pu à la fois diversifier leur régime alimentaire et améliorer leur ouïe. Des caractéristiques qui leur ont conféré un avantage évolutif.

    Deux squelettes de protomammifères analysés dans le cadre de l’étude. © Chuang Zhao
    Deux squelettes de protomammifères analysés dans le cadre de l’étude. © Chuang Zhao

    Des fossiles passés à la loupe

    L'équipe de recherche a eu recours à des techniques d'imagerie de haute résolutionrésolution pour décrire en détail la structure des osselets et cartilagescartilages auditifs des animaux fossilisés. « Nous avons fourni la preuve fossilefossile dans l'histoire de l'évolution qui illustre cette hypothèse », explique Jin Meng. L'étude soulève aussi de nouvelles questions, selon lui, comme : cette évolution, s'est-elle produite chez tous ou quelques mammifères seulement ? « Est-ce arrivé une fois ? Dans plusieurs groupes ? Nous pouvons poser plus de questions », dit le chercheur. Outre le système auditif, Jin Meng et ses collègues sont en train d'analyser d'autres parties des fossiles, notamment la cavité cérébrale, qui livrera peut-être d'autres secrets sur l'évolution des mammifères.