Oubliez les pesticides chimiques et les produits polluants. Il existe un moyen bien plus écologique et très efficace pour lutter contre la pyrale du maïs et le charançon du palmier : les phéromones, des substances émises par les insectes et que l'on peut reproduire en laboratoire. Et ça tombe bien, le champion européen est une start-up française particulièrement innovante.


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    Dans son usine basée à Salin-de-Giraud, à côté d'Arles dans les Bouches-du-Rhône, la start-upstart-up M2i fabrique des parfums un peu particuliers. Il ne s'agit pas de ceux que vous allez acheter à Noël ou à la Saint-Valentin pour votre bien-aimé(e), mais d'odeurs destinées aux insectes : les phéromonesphéromones.

    Une phéromone est une substance naturellement sécrétée par une espèce et qui constitue un signal olfactif agissant comme un messager entre les individus d'une même espèce. Elles sont émises par la plupart des animaux et induisent des comportements particuliers : agression, fuite, reproduction ou encore marquage de territoire. Les mieux étudiées sont les phéromones sexuelles émises par les insectes, que les femelles utilisent pour attirer les mâles. De très nombreuses recherches ont permis d'isoler et de caractériser ces moléculesmolécules, qui servent dans la lutte contre les insectes. Et c'est justement ce que propose M2i qui recrée ces molécules en laboratoire pour les commercialiser auprès des particuliers, agriculteurs, vignerons ou collectivités qui cherchent une alternative aux pesticides chimiques.

    La Cochylis (<em>Eupoecilia ambiguella</em>) est un petit papillon dont la chenille est un ravageur connu sous « tordeuse de la vigne » . © Ilia Ustyantsev, Flickr
    La Cochylis (Eupoecilia ambiguella) est un petit papillon dont la chenille est un ravageur connu sous « tordeuse de la vigne » . © Ilia Ustyantsev, Flickr

    Pommier vigne, palmier ou buis : une soixantaine de phéromones disponibles

    « Nos produits sont totalement inoffensifs pour l'homme, pour l'environnement, pour les végétaux et les autres insectes, puisque chaque phéromone est spécifique à une espèce », atteste Johann Fournil, responsable du marketing et des partenariats. Dans son catalogue, figurent plus de 60 phéromones : contre la carpocapse des pommes et poires, la mineuse des agrumes, la pyrale du buis, le charançon rouge du palmier, le ver rose du coton ou encore l'eudémis, un redoutable papillon qui s'attaque à la vigne. La start-up a mis au point un procédé breveté d'encapsulation qui permet d'enrober la phéromone dans une sorte de cire naturelle pour une diffusiondiffusion prolongée et une meilleure efficacité.

    Les phéromones sont pulvérisées sous forme de « lait » comme un insecticide classique dans les vergers. Ici, une phéromone destinée à éliminer la carpocapse des pommes (<em>Cydia pomonella</em>). © M2i
    Les phéromones sont pulvérisées sous forme de « lait » comme un insecticide classique dans les vergers. Ici, une phéromone destinée à éliminer la carpocapse des pommes (Cydia pomonella). © M2i

    Des mâles complètement déroutés qui n’arrivent plus à retrouver les femelles

    La lutte peut s'effectuer de deux moyens différents. Le premier est d'attirer les mâles dans un piège où l'on a disposé les phéromones sous forme de gelgel. « Un peu comme un verre de grenadine pour attirer les frelonsfrelons », illustre Johann Fournil. Une autre technique est la « confusion sexuelle » qui consiste à diffuser les phéromones pour perturber les mâles afin qu'ils ne retrouvent plus les femelles, « comme lorsque vous entrez dans une parfumerie où toutes les odeurs se mélangent », explique Johann Fournil.

    Le produit peut être aspergé sur les cultures avec un tracteur ou manuellement comme avec un insecticideinsecticide classique. Contre la chenille processionnaire du pin, la start-up a même imaginé en partenariat avec l'Inra des billes à tirer avec un paintball afin d'atteindre l'arbrearbre en hauteur. Au début de la période de reproduction début juillet, des professionnels parcourent la forêt et traitent ainsi les arbres avant qu'ils ne soient attaqués.

    Des produits qui s’exportent dans 25 pays

    Malgré des prix légèrement plus élevés que les produits chimiques traditionnels (comptez 160 euros par hectare et par an pour la vigne, par exemple), le créneau semble porteur alors que de plus en plus de professionnels essayent de se passer de pesticides. Après cinq ans d'existence à peine, M2i compte déjà 130 salariés, exporte dans 25 pays et se targue d'être le premier producteur européen de phéromones. La startup veut à présent s'attaquer au marché des grandes cultures céréalières, une grande première dans ce domaine.