Saladin est un dirigeant d’origine kurde qui a marqué de son empreinte l’histoire des Croisades et du Proche-Orient. Il naît en 1138 en Mésopotamie septentrionale et fonde la dynastie des Ayyoubides lorsqu’il s’empare du pouvoir à la mort de son oncle.


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    Reconnu pour son habileté politique et ses qualités de chef de guerre, il est une des grandes figures de la remobilisation des musulmans face aux Croisés et aux États latins d'Orient au XIIe siècle.

    Le contexte de l’accession au pouvoir de Saladin

    Dès la fin du XIe siècle, les Francs s'implantent durablement au Proche-Orient et fondent les États latins d'Orient. En juillet 1099, ils s'emparent de Jérusalem, troisième ville sainte de l'islam après la Mecque et Médine. Les Francs profitent alors du morcellement politique proche oriental et d'une régionalisation du pouvoir islamique. Jusque-là, les puissances islamiques font preuve d'une certaine apathieapathie face aux assauts des Croisés, minés par leurs dissensions politiques. 

    C'est dans ce contexte que Saladin accède au pouvoir. Fils du gouverneur de Tikrit pour le compte des Turks seldjoukides puis des Zengides, et neveu du général Shirkuh, il suit son oncle en Égypte pour faire face aux Croisés. Celui-ci en profite pour s'emparer de la fonction de vizir et se met au service des califes fatimides. À sa mort, Saladin lui succède. 

    Portrait de Saladin, sultan d'Égypte et de Syrie. © Wikimédia Commons, domaine public
    Portrait de Saladin, sultan d'Égypte et de Syrie. © Wikimédia Commons, domaine public

    Mais les Fatimides sont chiites alors que le califat abbasside est sunnite tout comme Saladin. Ce dernier se sert alors de la mort du calife fatimide en 1171 pour replacer la région sous l'autorité califale abbasside. Fort de son autorité, Saladin (Salah al-Din) entreprend une expansion territoriale face aux descendants fatimides, mais également contre ses coréligionnaires au nord de l'Égypte. En 1183, il a unifié l'ensemble des terres autour du Caire, Damas et Alep. Il encercle ainsi les États latins. 

    Toutefois, l'affrontement contre les Francs n'est pas immédiat. Saladin joue de son habileté politique et alternealterne entre combats, alliances et trêves. C'est notamment le cas en 1184, lorsqu'il conclut une trêve avec les Croisés pour garantir la circulation des caravanes. Les enjeux économiques et commerciaux viennent supplanter les rivalités religieuses.

    La bataille d’Hattin

    Toutefois, cette trêve est rompue en 1186 lorsqu'une caravane est attaquée par le Croisé Renaud de Châtillon. Ce dernier refuse de restituer le butin et les prisonniers lorsque Saladin en formule la demande, et multiplie les provocations. 

    Après un ultime affront, Saladin rassemble son armée. Il convoque les princes musulmans et réactive toute la rhétorique du jihad pour remobiliser ses troupes. Il assiège plusieurs places fortes croisées et profite des dissensions côté franc. En effet, la succession au trône de Jérusalem a exacerbé les rancoeurs entre les grandes familles franques croisées. Ainsi, Raymond de Tripoli, avec qui la trêve de 1184 a été signée, ne reconnaît pas le nouveau roi de Jérusalem, Guy de Lusignan. Il signe alors une alliance de circonstance avec Saladin, qui fait encore une fois preuve d'un grand pragmatisme politique. Toutefois, le massacre d'un détachement templier et hospitalier par les troupes musulmanes rend cette alliance caduquecaduque et Raymond de Tripoli se range à nouveau du côté des Francs.

    Bataille d'Hattin. © Wikimédia Commons, domaine public
    Bataille d'Hattin. © Wikimédia Commons, domaine public

    Guy de Lusignan choisit alors de se positionner avec l'armée franque à Siphonie. Mais Saladin n'entend pas laisser les Francs choisir le lieu de la bataille. Il mène plusieurs raids puis assiège la ville de Tibériade où réside la femme du comte de Tripoli. Malgré les réticences de ce dernier à se retrouver à découvert, le roi de Jérusalem décide de porter secours à la ville. Il envoie donc ses armées qui se retrouvent rapidement dans un espace complètement ouvert, vulnérables aux attaques ennemies. Ses troupes sont contraintes de repousser les assauts incessants des archers. Il leur est impossible de parcourir la totalité de la distance pour atteindre Tibériade et les musulmans leur barrent l'accès à la seule source d'eau du coin. Les Francs sont épuisés et assoiffés. 

    La bataille est lancée le lendemain : l'issue est pendant longtemps incertaine. Mais la victoire de Saladin se dessine progressivement : Raymond de Tripoli est coupé du reste des troupes, le roi de Jérusalem et les grands barons sont faits prisonniers. C'est toute la chevalerie franque qui est massacrée et les territoires des États latins d'Orient privés d'une grande partie de leur défense. Saladin exécute de sa main René de Chatillon, les Croisés sur le champ de bataille sont décapités ou réduits en esclavage. L'humiliation est totale puisque c'est à cette occasion que Saladin s'empare de la Vraie Croix : elle ne réapparaîtra plus jamais. Seuls le roi et certains grands barons ont la vie sauve alors qu'une toute petite poignée de chevaliers parvient à s'échapper du champ de bataille.

    Saladin et Guy de Lusignan après la bataille d'Hattin en 1187. © Wikimédia Commons, domaine public
    Saladin et Guy de Lusignan après la bataille d'Hattin en 1187. © Wikimédia Commons, domaine public

    Saladin en profite pour déferler sur les territoires chrétiens sans défense et reprendre forteresses, places fortes et villages avec une grande violence. Pourtant la résistancerésistance d'un noyau de Francs tient bon et certaines villes restent du côté des Croisés, comme Tyr. 

    La prise de Jérusalem

    Le chef de guerre musulman parvient finalement sans encombre devant Jérusalem à l'automneautomne 1187. La cité est reprise sans effusioneffusion de sang. À la violence d'Hattin, Saladin oppose ici tout son sens de la diplomatie : les chrétiens latins peuvent quitter la ville avec leurs biens alors que les chrétiens d'Orient peuvent rester dans la ville. Saladin dote Jérusalem de nombreuses institutions islamiques. La troisième ville sainte de l'islam est à nouveau entre les mains des pouvoirs musulmans. Saladin meurt un an plus tard alors que se prépare déjà en Occident, la Troisième croisade pour effacer l'humiliation de Hattin.