Le plus grand tremblement de terre sur Mars jamais enregistré nous a donné un aperçu sur la structure interne de la Planète rouge et des informations remarquables sur la croûte martienne, dont son épaisseur et sa densité. Découvrez si cette croûte est plus épaisse que celle de la Terre ou de la Lune et pourquoi elle est la principale source de chaleur de la planète.

 


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    En mai 2022, un fort tremblement de terretremblement de terre sur Mars, au cours duquel des ondes sismiquesondes sismiques ont fait jusqu'à trois fois le tour de la surface martienne, a permis aux chercheurs de l'ETH Zurich de déterminer l'épaisseur et la densité globales de la croûte de la planète. Avec une magnitude estimée à 4,6, ce tremblement de terre est le plus fort jamais observé sur une autre planète. Il a été mesuré par le sismomètre Seis à bord d'Insight, dont la mission sur Mars s'est terminée en décembre 2022 après avoir fonctionné pendant quatre ans.

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    La formation de la croûte de Mars est bien plus complexe que prévu !

    Les ondes de surface observées lors de ce grand tremblement de terre ont non seulement voyagé de la source du séisme jusqu'à la station de mesure, mais elles ont également continué à faire le tour de la planète à plusieurs reprises. Ces données n'ont pas seulement fourni des informations sur des zones spécifiques de Mars. Elles ont aussi permis « d'obtenir une vue d'ensemble de la planète », explique Doyeon Kim, sismologuesismologue à l'Institut de géophysique de l'ETH Zurich. Afin d'obtenir des informations sur la structure traversée par les ondes, les chercheurs ont mesuré la vitesse de propagation de ces ondes à différentes fréquences avec comme résultat un « aperçu de la structure intérieure à différentes profondeurs » et des informations sur la « croûte martienne qui apparaît beaucoup plus épaisse que la croûte terrestrecroûte terrestre ou lunaire, et la principale source de chaleur de la planète est radioactive », souligne le sismologue et auteur principal d'une étude qui vient d'être publiée dans la revue Geophysical Research Letters. Auparavant, les ondes de surface observées lors des deux grands impacts de météoritesmétéorites permettaient également d'obtenir des résultats le long de leurs trajectoires de propagation spécifiques, mais régionaux et non pas globaux comme aujourd'hui.

    En bleu, les terrains martiens là où se posent les sondes martiennes et, en rouge, les hauts plateaux martiens, inaccessibles aux rovers et landers. © Nasa, Mola Science Team
    En bleu, les terrains martiens là où se posent les sondes martiennes et, en rouge, les hauts plateaux martiens, inaccessibles aux rovers et landers. © Nasa, Mola Science Team

    La croûte martienne beaucoup plus épaisse que celle de la Terre ou de la Lune

    En combinant leurs nouveaux résultats avec les données existantes sur la gravitégravité et la topographie de Mars, les chercheurs ont pu déterminer l'épaisseur de la croûte martienne, « en moyenne de 42 à 56 kilomètres ». Ils ont pu mesurer que cette croûte est en moyenne  « la plus fine au niveau du bassin d'impact Isidis, à ~10 km, et la plus épaisse dans la province de Tharsis, à ~90 km ». Pour mettre cela en perspective, les données sismiques indiquent que la croûte terrestre a une épaisseur moyenne de 21 à 27 kilomètres, tandis que la croûte lunaire, telle que déterminée par les sismomètressismomètres de la mission ApolloApollo, a une épaisseur comprise entre 34 et 43 kilomètres.

    Topographie de la surface de Mars et épaisseur de la croûte de la planète. © Nasa, MOLA, Doyeon Kim, ETH Zurich
    Topographie de la surface de Mars et épaisseur de la croûte de la planète. © Nasa, MOLA, Doyeon Kim, ETH Zurich

    L'un des résultats les plus importants de cette recherche concerne la différence entre les hémisphères nordhémisphères nord, constitué de basses terres plates, et sud, avec ses hauts plateaux. La division entre les terres du nord, à très basses altitudes, et les hauts plateaux du sud est appelée dichotomie martienne. Comme l'explique Doyeon Kim, « on pourrait penser que cette différence s'explique par deux compositions de roches différentes, avec une roche plus dense que l'autre ». Mais, étonnamment, ce n'est pas le cas. Sur la base des observations sismiques et des données gravimétriques, les chercheurs ont montré que la « densité de la croûte dans les basses terres du nord et les hauts plateaux du sud est similaire mais qu'en revanche, la croûte dans l'hémisphère sudhémisphère sud s'étend à une plus grande profondeur que dans l'hémisphère nord ». « Cette découverte est très intéressante et permet de mettre fin à une discussion scientifique de longue date sur l'origine et la structure de la croûte martienne », précise Doyeon Kim.

    Enfin, d'autres conclusions peuvent également être tirées de l'épaisseur de la croûte martienne dont « comment la planète génère sa chaleur et explique l'histoire thermique de Mars ». En tant que planète à plaque unique, la principale source de chaleur produite à l'intérieur de Mars aujourd'hui est « le résultat de la désintégration d'éléments radioactifs tels que le thoriumthorium, l'uraniumuranium et le potassiumpotassium ». L'étude a révélé que 50 à 70 % de ces éléments producteurs de chaleur « se trouvent dans la croûte martienne, de sorte que cette forte accumulation pourrait expliquer pourquoi il existe des régions locales sous la croûte où des processus de fontefonte peuvent encore avoir lieu aujourd'hui ».