Le système immunitaire des Papous, adapté aux maladies infectieuses présentes sous les tropiques, pourrait avoir été hérité de l’hybridation entre Homo sapiens et l’Homme de Denisova il y a 200 000 ans.


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    Si les humains actuels font partie de l'espèceespèce Homo sapiensHomo sapiens, il est désormais établi que nous possédons dans notre ADNADN des fragments génétiquesgénétiques d'autres espèces d'hominidéshominidés aujourd'hui disparues, comme l'Homme de NéandertalNéandertal. Celui-ci ne serait d'ailleurs pas le seul à s'être hybridé avec nos ancêtres Homo sapiens. Il apparaît en effet que les populations vivant en Papouasie-Nouvelle-Guinée, et plus largement dans la région du sud-ouest du Pacifique que l'on appelle la Mélanésie, présenteraient dans leur ADN environ 5 % du génomegénome de l'Homme de Denisova, une autre espèce d'hominidés contemporaine à Néandertal et à l'Homme moderne.

    L’héritage de Denisova dans l’ADN des Papous

    Cette espèce doit son nom à la grotte de Denisova dans le sud-ouest de la Sibérie, où les premiers restes de cette population ont été retrouvés. L'Homme de Denisova semble avoir été particulièrement présent en Asie, où il aurait fait la rencontre d’Homo sapiens il y a environ 200 000 ans suite à l'extension géographique de ce dernier. Les deux espèces se seraient alors mélangées avant que Denisova ne disparaisse totalement, il y a environ 30 000 ans. De cette hybridationhybridation il reste aujourd'hui des traces génétiques, principalement dans l'ADN des populations asiatiques. Pour avoir perduré jusqu'à nos jours, cet héritage génétique a certainement été un bénéfice pour notre ancêtre Homo sapiens, et pourrait d'ailleurs l'être encore aujourd'hui. C'est du moins ce que révèle une nouvelle étude publiée dans la revue PLOS Genetics.

    De quelle manière les gènesgènes hérités de Denisova impactent-ils l'apparence ou la santé des hommes d'aujourd'hui ? Voilà la question que s'est posée une équipe de scientifiques. Ils ont donc comparé le génome de 56 individus originaires de Papouasie-Nouvelle-Guinée à celui des Hommes de Denisova et de Néandertal. Leurs résultats montrent que les Papous auraient hérité de l'Homme de Denisova d'environ 82 000 variants génétiques. Ces variants impacteraient notamment la production de certaines protéinesprotéines liées au système immunitairesystème immunitaire et l'aideraient à optimiser sa réponse face à des agents pathogènespathogènes spécifiques, comme la grippegrippe et le chikungunyachikungunya. Il apparaît que deux des variants génétiques transmis par Denisova permettent de réduire l'inflammationinflammation lors d'une infection. Cette capacité de régulation de la réponse inflammatoire pourrait avoir aidé les populations de Papouasie-Nouvelle-Guinée à surmonter l'apparition de nouvelles maladies infectieuses au cours de leur histoire. Les tropiques sont en effet des régions soumises à une forte charge de pathogènes et posséder des gènes permettant de mieux gérer la réponse immunitaire dans ce contexte aurait été un avantage certain.

    Un mécanisme génétique clé pour s’adapter rapidement à de nouveaux pathogènes

    Homo sapiens a d'ailleurs certainement très rapidement bénéficié de son hybridation avec l'Homme de Denisova. Alors que ce dernier était déjà depuis longtemps bien adapté à son environnement, Homo sapiens, lui, a dû faire face à de nouveaux pathogènes spécifiques à la région dans laquelle il venait d'arriver. Fort heureusement, le mélange et l'hybridation des deux populations a permis à Homo sapiens de s'adapter rapidement, notamment en absorbant dans son génome les variants de Denisova lui permettant d'avoir une réponse immunitaire adaptée. Ce processus génétique semble d'ailleurs être l'une des clés ayant permis aux humains modernes de s'adapter rapidement à de nouveaux environnements.    

    L'Homme de Denisova aurait été principalement présent en Asie et dans les régions du sud-ouest du Pacifique, où il aurait ensuite rencontré <em>Homo sapiens.</em> © John D. Croft, Wikimedia Commons, CC BY-SA 3.0
    L'Homme de Denisova aurait été principalement présent en Asie et dans les régions du sud-ouest du Pacifique, où il aurait ensuite rencontré Homo sapiens. © John D. Croft, Wikimedia Commons, CC BY-SA 3.0

    L'étude suggère que ce mélange génétique entre deux espèces d'hominidés survenu il y a plusieurs dizaines de milliers d'années, influence toujours la santé des individus d'aujourd'hui, notamment en leur donnant les moyens de se défendre face à des maladies bien spécifiques.