Le discret anneau F de Saturne change en permanence de forme, se hérissant de structures aux aspects les plus variés. Cette activité serait due à des collisions avec des petits corps. Leur observation pourrait nous éclairer sur les processus qui conduisent à la formation planétaire, et même sur la genèse de notre système solaire.


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    Gros plan sur Prométhée, vu par Cassini. Crédit Nasa/JPL

    Gros plan sur Prométhée, vu par Cassini. Crédit Nasa/JPL

    Les scientifiques n'ont jamais cessé de s'intéresser à l'anneau F de SaturneSaturne depuis que sa structure fine est devenue observable par les sondes spatiales, et tout particulièrement par Cassini, en orbite autour de la planète géante depuis le 14 janvier 2005.

    De nombreuses images prises par les caméras à grand champ de la sonde entre 2005 et 2006 ont permis de mieux comprendre l'évolution de cet anneau, dont l'aspect peut varier de façon très spectaculaire et présenter des figures pouvant durer de quelques heures à quelques années. Selon les astronomesastronomes, l'anneau F est un des objets les plus inhabituels et les plus dynamiques de tout le système solaire.

    L'anneau F de Saturne et ses irrégularités. Crédit Nasa/JPL

    L'anneau F de Saturne et ses irrégularités. Crédit Nasa/JPL

    Déjà, on savait que les perturbations observées étaient en rapport avec le satellite Prométhée, un corps de forme irrégulière (148 x 100 x 68 kilomètres) qui agit comme une lune bergère pour l'anneau F et qui fut découvert en 1980 sur des photos prises par la sonde Voyager 1Voyager 1. Mais celui-ci ne suffit pas à expliquer les véritables séances de contorsion auxquelles se livre en permanence cet anneau, se tordant en spirale ou produisant de nombreuses figures parfois éphémères, comme des "jets" ou des "éventails.

    Des déformations révélatrices

    L'anneau F, ainsi que tous les objets qu'il renferme, sont manifestement perturbés en permanence par l'influence de Prométhée, ce qui permet à leur signature gravitationnelle d'être détectée même lorsqu'ils sont eux-mêmes invisibles. Cette gymnastique peut donc nous renseigner sur la présence de corps de petites tailles. Mais les interprétations ne sont pas simples.

    Anneau F vu par Cassini. Crédit Nasa/JPL

    Anneau F vu par Cassini. Crédit Nasa/JPL
    Anneau F vu par Cassini. Crédit Nasa/JPL

    Anneau F vu par Cassini. Crédit Nasa/JPL
    Anneau F vu par Cassini. Crédit Nasa/JPL

    Anneau F vu par Cassini. Crédit Nasa/JPL

    Des déformations révélatrices

    Sur les images de Cassini, une équipe menée par Carl Murray, de la Queen Mary University of London et membre du Cassini Imaging Team, s'est attachée à comprendre la formation d'une série de jets. Au cours d'une précédente recherche, Carl Murray avait postulé la présence d'une autre lune restant à découvrir. L'alternative existait entre un objet d'au moins 100 kilomètres dispersant continuellement les particules de l'anneau et un plus petit en collision permanente avec ses parties constitutives. Les Américains nomment moonlets - petites lunes - ces corps minuscules.

    Selon la récente analyse du professeur Murray et de son équipe, dont les résultats sont publiés dans la revue Nature du 5 juin, l'hypothèse de la petite lune est la plus probable et l'identité même du coupable serait confirmée. les plus grands jets seraient générés par un minuscule corps d'environ cinq kilomètres, découvert par Cassini en 2004 (et nommé S/2004 S 6). Quant aux éventails, ils pourraient être dus aux mouvements de corps plus petits encore, de l'ordre du kilomètre.

    Sébastien Charnoz, co-auteur de la communication, enseignant-chercheur à l'Université Paris 7/CEA Saclay au sein de l'équipe AIM (AstrophysiqueAstrophysique Intéractions Multiéchelles) et membre associé du Cassini Imaging Team, confirme la pertinence de ces observations, expliquant la curiosité des scientifiques pour ce mince anneau : « les collisions à grande échelle se produisent dans l'anneau F de Saturne presque quotidiennement - faisant de lui un endroit unique pour étudier. Nous pouvons maintenant dire que ces collisions sont responsables des dispositifs changeants que nous observons là ».

    Keith Masson, président du STFC (Science and Technology Facilities Council), s'enthousiasme de ces observations et estime la compréhension de l'interaction entre les petits objets et les anneaux de Saturneanneaux de Saturne donne un aperçu des processus qui conduisent à la formation planétaire, au moment où la protoplanète rassemble le matériel disponible le long de sa propre orbite en créant de semblables structures.