Notre satellite naturel aurait-il eu dans son passé une magnétosphère analogue à celle de notre planète ? On peut aujourd’hui le croire après les travaux d’un groupe de chercheurs du MIT publiés dans Science et concernant le champ magnétique rémanent d’un échantillon lunaire ramené par les missions Apollo.

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    La roche baptisée troctolite 76535 trouvée par les astronautes de la mission Apollo 17 dans la région de Taurus-Littrow. Crédit : Nasa.

    La roche baptisée troctolite 76535 trouvée par les astronautes de la mission Apollo 17 dans la région de Taurus-Littrow. Crédit : Nasa.

    On sait que le champ magnétique de la Terre est généré par des mouvements turbulents complexes dans la partie liquide du noyau de la Terrenoyau de la Terre constitué d'un alliage de fer et de nickelnickel. C'est la fameuse théorie de la dynamodynamo auto excitatrice ou, en plus court, l'effet dynamoeffet dynamo comme l'expérience VKS l'a clairement démontré il y a quelque temps. La LuneLune étant plus petite que la Terre, ses réserves en éléments radioactifs et la chaleurchaleur qu'elle a accumulée lors de sa formation par accrétionaccrétion de matériaux n'ont pas pu la maintenir active et elle doit aujourd'hui être un astreastre mort. La nature de son noyau n'est pas bien connue non plus. Contenait-il une partie liquide et métallique capable de générer un champ magnétique par effet dynamo ? Personne ne le sait vraiment...

    Les échantillons de roches lunaires ramenés par les missions ApolloApollo portent bien les traces d'un champ magnétique, mesuré bien plus tard par la sonde américaine Clementine, dont les relevés de son magnétomètremagnétomètre ont permis d'en dresser la carte (voir la figure 1).

    Figure 1. Une carte du champ magnétique rémanent de la Lune réalisée à partir des relevés de la sonde <em>Clementine</em>, installé en orbite lunaire de janvier à juin 1994. Il n'y a pas de composante dipolaire comme c'est le cas sur Terre et du bleu au rouge l'intensité du champ magnétique augmente. Crédit : Nasa.

    Figure 1. Une carte du champ magnétique rémanent de la Lune réalisée à partir des relevés de la sonde Clementine, installé en orbite lunaire de janvier à juin 1994. Il n'y a pas de composante dipolaire comme c'est le cas sur Terre et du bleu au rouge l'intensité du champ magnétique augmente. Crédit : Nasa.

    Effet des météorites ou reste de magnétosphère ?

    La carte de ce champ est assez bien corrélée avec la topographie (voir la figure 2). Pour beaucoup, les champs magnétiques mesurés sur la Lune ne sont pas des champs fossilesfossiles enregistrés dans les roches lunaires témoignant de sa magnétosphèremagnétosphère passée mais, simplement, des témoins de champs magnétiques locaux transitoirement générés par des impacts de météoritesmétéorites. Pour d'autres, apportant quelques calculs à l'appui, il devait bien exister une magnétosphère propre dans le passé lointain de notre satellite.

    Pour essayer d'y voir plus clair, Ian Garrick-Bethell  et ses collègues planétologues du Massachusetts Institute of Technology (MIT) ont eu l'idée d'étudier une roche particulière ramenée par la mission Apollo 17. Son nom : troctolite 76535.

    Figure 2. Une carte de la surface de la Lune, établie également grâce aux relevés de la sonde <em>Clementine</em>. Les mers lunaires sont des bassins bien visibles en bleu et les montagnes en rouge-jaune. Crédit : Nasa.

    Figure 2. Une carte de la surface de la Lune, établie également grâce aux relevés de la sonde Clementine. Les mers lunaires sont des bassins bien visibles en bleu et les montagnes en rouge-jaune. Crédit : Nasa.

    Agée de 4,2 milliards d'années c'est la plus ancienne roche lunaire connue qui n'est pas liée à un impact de météorite. En utilisant une technique de démagnétisation par champ alternatif en liaison avec des calculs de thermochronologie basés sur le rapport isotopique 40Ar/39Ar, les chercheurs ont découvert que la roche avait été soumise deux fois à des champs magnétiques intenses et stables.

    Pour eux, ceci ne cadre pas avec l'hypothèse de champs magnétiques lunaires faibles et transitoires générés à cette époque par des chutes de météorites. La Lune devait bel et bien posséder sa propre magnétosphère...

    Toutefois, Dave Stegman, un géophysicien de l'université de Melbourne, en Australie, reste sceptique. Il fait remarquer que ces conclusions sont tirées de l'étude d'un seul échantillon de roche, ce qui est bien peu pour être vraiment probant.