Un vaisseau spatial est composé d'une multitude de pièces de précision, qui subissent de brusques sauts de température et peuvent être heurtées par des micrométéorites. Plus la durée du voyage est importante, plus les risques de dommages sur des parties vitales sont accrus. Même dans le cas où le vaisseau est habité, la réparation reste souvent une opération délicate, voire irréalisable.

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    New Horizon vient tout juste de partir que des chercheurs rêvent déjà de vaisseaux se réparant de manière autonome...(Crédits : NASA)

    New Horizon vient tout juste de partir que des chercheurs rêvent déjà de vaisseaux se réparant de manière autonome...(Crédits : NASA)

    C'est pourquoi l'ESA a orchestré une étude visant à concevoir des matériaux aptes à se soigner eux-mêmes, à l'image du corps humain. Pour atteindre leur objectif, les chercheurs de l'Université de Bristol, en Angleterre, se sont largement inspirés de la nature.

    Des vaisseaux spatiaux qui se soignent comme le corps humain ? <br />(Crédits : ESA)

    Des vaisseaux spatiaux qui se soignent comme le corps humain ?
    (Crédits : ESA)

    Un vaisseau se régénérant comme le corps humain…

    « Quand nous nous coupons, nous n'avons pas à nous enduire de colle, car notre corps le fait à notre place. Notre sang coagule et constitue une couche de protection, le temps que la peau se reforme en dessous. ». Les propos de Christopher Semprimoschnig sont-ils ceux d'un docteur ? Oui, mais d'un docteur en physique des matériaux, travaillant pour le compte de l'ESA à l'ESTEC (European Space Technology Research Centre) !

    L'objectif de l'étude lancée par l'ESA était, dans un contexte d'ingénierie, de développer des matériaux susceptibles de "s'autoréparer", dans le cas de dommages mécaniques, thermiques ou chimiques, à l'instar du système de régénération du corps humain.

    Résine remplissant des fibres creuses régénérantes. <br />En haut à gauche : fibres creuses de 30 micromètres de diamètre ; <br />A droite : séquences du processus de régénération ;<br /> En bas à gauche : entrée de la résine dans la zone endommagée. <br />(Crédits : ESA)

    Résine remplissant des fibres creuses régénérantes.
    En haut à gauche : fibres creuses de 30 micromètres de diamètre ;
    A droite : séquences du processus de régénération ;
    En bas à gauche : entrée de la résine dans la zone endommagée.
    (Crédits : ESA)

    Des fibres de verre et de la résine en guide de sérum

    Pour répondre aux besoins de l'ESA, les chercheurs de l'Université de Bristol, en Angleterre, ont imaginé des fibres de verre creuses, contenant soit uniquement de la résine, soit un mélange de résine et de catalyseurs, soit un mixe de résine et de durcissant.

    Le type de méthode utilisé est fonction de la nature et de la localisation des dommages, du potentiel de régénération des résines employées, et de l'influence de l'environnement opérationnel. Les fibres régénératrices peuvent être ajoutées au composite sous la forme d'une épaisseur supplémentaire, être concentrées dans les zones critiques, ou réparties à intervalle régulier le long du matériau.

    Pour leur étude, les chercheurs ont utilisé un matériau compositematériau composite, contenant des filaments emplis de résine époxyde Cycom 823. Après impact, comme le sang affluant dans une plaire, la résine s'est infiltrée dans la zone du dommage et l'a colmatée.

    Section d'un matériau composite endommagé, contenant des filaments remplis de résine époxyde Cycom 823 <br />On voit clairement sur cette image UV l'infiltration de la résine régénératrice dans la zone endommagée  <br />(Crédits : ESA)

    Section d'un matériau composite endommagé, contenant des filaments remplis de résine époxyde Cycom 823
    On voit clairement sur cette image UV l'infiltration de la résine régénératrice dans la zone endommagée
    (Crédits : ESA)

    Afin d'étendre le système de régénération naturel au cadre des structures composites d'un vaisseau spatial, les scientifiques ont dû tenir compte des conditions particulières inhérentes au vol dans l'espace. Ils se sont penchés tout particulièrement sur le problème du cycle thermique, qui peut faire passer la température des composants de +100 degrés Celsiusdegrés Celsius à -100 degrés Celsius.

    Ainsi, au cours d'un test thermique de 100 cycles, durant lequel la température variait de -100 à +100 degrés, le Bostik 100HMA a démontré sa capacité à recouvrir l'extrémité de la fibre - et donc à atteindre la zone du dommage en cas de lésion.

    Test d'éjection de la résine hors de la fibre <br />En haut à gauche : éjection correcte de résine époxyde hors de la fibre ; <br />En haut à droite : échec de l'éjection de la résine époxyde ; <br />En bas : éjection correcte de résine siliconée hors de la fibre. <br />(Crédits : ESA)

    Test d'éjection de la résine hors de la fibre
    En haut à gauche : éjection correcte de résine époxyde hors de la fibre ;
    En haut à droite : échec de l'éjection de la résine époxyde ;
    En bas : éjection correcte de résine siliconée hors de la fibre.
    (Crédits : ESA)

    Une petite révolution pour les vols au long cours

    « Nous avons fait le premier pas, mais nous devrons attendre au moins une décennie avant que cette technologie prenne place sur un vaisseau spatial. », a ajouté avec prudence Semprimoschnig.

    Néanmoins, la promesse de vaisseaux pouvant se soigner eux-mêmes ouvre un nouvel horizon aux longs vols spatiaux. L'utilisation de ces fibres régénératrices permettrait de doubler d'une part la duréedurée de vie des vaisseaux en orbiteorbite autour de la Terre - et donc de diminuer les coûts, d'autre part le temps de voyage des sondes partant à la conquête des confins de notre Système solaireSystème solaire.