Deux équipes d'archéologues ont révélé un ensemble de profondes cavités creusées dans le comté du Bedfordshire, en Angleterre. Après plusieurs analyses d’ossements d’animaux exhumés, les résultats ont permis de déterminer que les trous ont été creusés par des chasseurs-cueilleurs durant l'ère du Mésolithique, il y a environ 8 000 ans.


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    Des équipes d'archéologues anglais viennent de lever le voile sur l'existence de mystérieuses cavités artificielles découvertes il y a quatre ans. Le Museum of London Archeology (Mola) annonçait le 3 juillet 2023 que deux chantiers avaient permis d'exhumer vingt-cinq fosses artificielles dans le comté anglais du Bedfordshire, au nord de Londres. Les fouilles se déroulaient en banlieue de la ville de Luton, en amont de la constructionconstruction d'un complexe immobilier appelé Linmere. Les cavités sont réparties sur deux sites, l'un fouillé par la société Albion Archaeology, l'autre par les effectifs du Mola. Les historienshistoriens et archéologues s'affairent à Linmere depuis 2019, date à laquelle les premiers renfoncements sont découverts. Lors d'une seconde salve de recherches entreprises en 2021, les archéologues constatent la présence de nouvelles rangées de puits artificiels à quelques centaines de mètres de la première zone de fouille.

    Une marque de l'âge de pierre

    Les cavités, nommées « Linmere pits » (fosses de Linmere) par les archéologues, du nom du lotissement devant surplomber le site de fouille, ont été creusées entre 6500 et 5700 avant J.-C. À cette époque, le Mésolithique entre dans une ère dite « tardive » en Europe du Nord, qui prend place jusqu'à 4000 avant J.-C., millénaire de la transition vers la période du Néolithique. Circulaires, les fosses peuvent mesurer jusqu'à cinq mètres de diamètre et atteindre une profondeur avoisinant 1,85 mètre. Elles sont disposées en lignes droites d'environ 500 mètres de longueur et espacées de quelques mètres à peine.

    Les cavités de Linmere mesurent en moyenne cinq mètres de diamètre pour 1,85 mètre de profondeur. © Mola, Albion Archaeology
    Les cavités de Linmere mesurent en moyenne cinq mètres de diamètre pour 1,85 mètre de profondeur. © Mola, Albion Archaeology

    Des fosses datées de plus de 8 000 ans

    À l'intérieur des trous, les archéologues ont découvert une quantité variable d'ossements d'animaux. Les restes sont rapidement envoyés en laboratoire pour être analysés. Les analyses permettent de distinguer plusieurs espècesespèces, parmi lesquelles des sanglierssangliers, des biches ou encore des bovins. Pour découvrir l’âge des ossements, des datations au carbone 14datations au carbone 14 sont réalisées dès 2019. Grâce à cette technique, les archéologues confirment que les os datent d'environ 8 000 ans. Plusieurs chercheurs travaillant pour le Mola affirment qu'ils ignoraient se trouver face à des fosses du Mésolithique avant de recevoir récemment les premières datations au radiocarbone.

    Photos des fouilles de Linmere, dans le Bedfordshire. © MOLA
    Photos des fouilles de Linmere, dans le Bedfordshire. © MOLA

    À l’étude des chasseurs-cueilleurs

    La découverte de ces sites archéologiques offre aux chercheurs et universitaires une opportunité pour en apprendre davantage sur les mœurs des civilisations du Mésolithique en Europe du Nord. Pour l'heure, les experts ne savent pas précisément à quoi servaient les fosses de Linmere. Plusieurs hypothèses sont établies par les spécialistes. Les cavités auraient pu servir à la chasse, comme pièges, ou utilisées comme lieux de stockage du gibier. La probabilité d'un tel usage reste cependant peu probable, les archéologues privilégiant la piste d'une signification dédiée et spécifique, à des fins rituelles. Plusieurs éléments pointent en ce sens : notamment la proximité avec un cours d'eau ou encore l'alignement des fosses sur des lignes droites. Les chercheurs indiquent que les chasseurs-cueilleurs ont dû investir un temps considérable pour creuser les fosses, les peuplades parcourant l'Europe du Nord étant semi-nomades durant cette période du Mésolithique tout en étant techniquement limitées.

    Si d'autres cavités similaires ont été découvertes en France et plus récemment à proximité de Stonehenge, les fouilles du Bedfordshire sont une fenêtrefenêtre supplémentaire que les chercheurs comptent bien exploiter pour mieux comprendre la culture changeante des chasseurs-cueilleurs du Mésolithique. La période qui se déroule jusqu'en 4000 avant J.-C. occasionne de nombreux changements dans cette région du monde, les individus se sédentarisant tandis que la fonte des glaces isole définitivement l'île d'Angleterre au reste du Continent.

    À proximité de Stonehenge, des fosses vieilles de 10 000 ans avaient été exhumées en 2022. © Ghent University, Université de Birmingham
    À proximité de Stonehenge, des fosses vieilles de 10 000 ans avaient été exhumées en 2022. © Ghent University, Université de Birmingham

    « Les fosses de Linmere sont une découverte très excitante. Bien que nous ayons connaissance d'autres sites similaires creusés en Grande-Bretagne par les chasseurs-cueilleurs du Mésolithique, les fosses de Linmere sont frappantes de par leur nombre et l'étendue de la zone sur laquelle elles se dispersent », ajoute le docteur en archéologie Joshua Pollard dans le communiqué du Mola. La datation des cavités n'est donc que le début d'une grande opération de recherche et d'étude pour les scientifiques, qui s'attellent désormais à démontrer l'utilité réelle d'une telle œuvre.